Au premier rang des victimes des révolutions nord-africaines il y a sans conteste l’Union pour la Méditerranée. Mais derrière l’échec de cette entreprise il n’y a pas loin à chercher pour identifier le véritable responsable du fiasco européen : ses habitudes condescendantes vis-à-vis des pays peuplant sa périphérie.

Supplétif d’une Union européenne en panne de projet pour le monde arabe, l’Union pour la méditerranée (U.P.M.), lancée en grande pompe en juillet 2008, se fixait pour but de relier dans une plus grande proximité de destin et d’entente les deux rives de la Méditerranée. Or l’exceptionnel raté que représente incontestablement la passivité européenne, et plus spécifiquement française, lors de la révolution tunisienne a peut être totalement fini de discréditer cette Union.

Une UPM très fortement discréditée

Passe sur le fait qu’elle avait pour vice président Hosni Moubarak, désormais écarté du pouvoir, l’U.P.M.pensait pouvoir installer une « politique de voisinage », tels étaient ses termes, avec la rive sud de la Méditerranée. Mais l’erreur a incontestablement été de construire cette coopération en dehors de toute exigence démocratique à laquelle se tenir. A cette fin la France avait fait du régime de Ben Ali un interlocuteur de choix, voire même un quasi modèle. La Tunisie réussissant, selon Paris, le tour de force de la stabilité, de la laïcité, de la croissance et de la paix, alors qu’elle avait pour voisin une Algérie au bord du chaos en permanence et une Lybie érigée en épouvantail, vraisemblablement pour être bien trop anti occidentale dans sa rhétorique.

Et encore n’oublions pas les efforts de courtoisie entrepris par l’Italie à l’attention de la Lybie son ancienne colonie. Il est dès lors inévitable qu’une telle politique de lâcheté et une coopération pensée sur le seul mode du silence face à tout ce que les régimes d’Afrique du Nord pratiquaient comme violation des droits de l’homme ne saurait rester sans incidence sur l’U.P.M., tout d’abord, mais plus généralement sur l’Europe.

Une Europe condamnée à recommencer de telles erreurs en conséquence du mépris que lui inspirent ses voisins

Car ne nous y trompons pas cette « politique de voisinage » à l’attention de son pourtour septentrional et magrébin fait à grands coups de concessions, concerne les autres périphéries de l’Europe. En effet aux silences complices enregistrés quand les dictatures tunisiennes et égyptienne existaient correspondent, encore aujourd’hui, les silences concernant l’autoritarisme du régime biélorusse ou de la « démocratie » autoritaire d’Ukraine. Ces deux pays ayant, comme pour l’Afrique du nord, la particularité d’être essentiel à l’approvisionnement énergétique de l’Europe. Que serait le train de vie européen sans les deux gazoducs passant par la Biélorussie et l’Ukraine. Mais à poursuivre selon cette logique on constate que le problème se pose aussi pour le nord Caucase ou le Proche-Orient.

Bref dans l’échec de l’U.P.M. il y a plus que celui d’une politique arabe dépassée, il y a celui d’une Europe qui n’a toujours pas compris qu’elle devait arrêter de traiter ses voisins comme le refuge d’arriérés politiques et comme une arrière-cour tout juste bonne à la servir. Le problème est beaucoup plus qu’une simple erreur de posture idéologique. Il est d’ordre quasi moral et concerne le complexe de supériorité européen.