Bureau de répartition des pénuries à dakar…

Inutile de vous dire que tout ce que vous allez lire n'est qu'oeuvre d'imagination et ne saurait…. bla bla bla

Tout est calme dans les bureaux, il est 10 h 32. Le chef de service vient d'arriver, 10 minutes après la secrétaire Mme Diop, qui pour des raisons sociales arrive en retard tous les mardis. Quelques bureaux ne sont pas occupés, celui de Mme Awa Diagne qui effectue son deuxième pélerinage annuel à la Mecque, Mr Alphonse Sané, que tout le monde appelle Capone surnom dont nul ne connait l'origine, est au village pour enterrer sa mère. Les mauvaises langues croient se rappeler qu'il l'a déjà enterrée l'an passé. Quant au coursier Mr Malick Zebrinskilovitch, on ne s'est aperçu de son absence qu'au 4ème jour vu qu'on sait pas trop ce qu'on pourrait l'envoyer faire en course, renseignement pris au téléphone, il se trouve à Touba pour soigner une crise d'angoisse métaphysique qui le faisait douter de l'infaillibilité de son marabout.

C'est un mardi comme tous les autres au bureau de gestion des coupures d'électricité. Ce bureau a été créé sous l'impulsion du regretté frère Samuel à l'époque où il présidait la Sénémachin avant d'être nommé ministre des pénuries d'énergie. Fort de ses brillantes études de management il pensait, à juste titre, qu'une entreprise moderne doit tout gérer. Comme il n'était pas capable de supprimer les coupures il décidat donc qu'un bureau serait chargé de les gérer de manière scientifique et rationnelle.

Décision fut prise, bureau fut créé. Cette création posat d'ailleurs un problème au syndicat des cadres. Le DG voulait récupérer quelques membres inutiles de son pléthorique personnel pour les affecter à son nouveau service. Le syndicat y vit une atteinte à ses droits acquis qui veulent que chaque nouveau poste donne lieu à une embauche même si les batiments regorgent de nombreuses personnes inutiles qui errent dans les bureaux comme des ames en peine faute du moindre travail à effectuer, même pour rire.

DRINGGGGGGG !

Une voix au fonds du bureau : Diouf réponds, tu vois pas que je suis occupé !

Après un coup d'oeil sur son collègue occupé à lire un quotidien people qu'il n'ose pas lire chez lui, sa femme trouvant que ce n'était pas une lecture digne pour un père de famille, pieux musulman de surcroit, Diouf décroche le téléphone.

Diouf : Oui ?

Une voix hurlante à l'autre bout du fil :Salam Aleikoum…. Je travaille comme toi à la Sénelec bureau des statistiques section électrocution, voilà, j'aurais besoin d'un petit service j'ai organisé un après-midi de prières en mémoire de mon défunt marabout, ça commence dans une demi heure et on a pas de courant dans le quartier, tu peux faire quelque chose pour moi ?

Diouf toujours serviable : Pas de problème tu habites quel quartier ? Medina… je vais couper les parcelles assainies….

DRINGGGGGGG fait un autre téléphone

La même voix au fond du bureau : T'es long au téléphone Diouf, réponds tu veux, je le ferais bien mais je suis occupé.

Diouf sautant sur le 2ème téléphone : Oui ?

Une voix hurlante à l'autre bout du fil :Salam Aleikoum…. chargé du protocole de la mairie d'arrondissement de ***, notre maire doit faire un important discours à l'intention de l'association des intellectuels chomeurs pour la réélection du président Wade, ça commence à 17 heures et le maire voudrait être sûr qu'il y aura de l'électricité, vous pouvez arranger ça ?

Diouf qui s'y perd un peu, il a déjà promis beaucoup de choses hier : Pas de problème, je couperai les parcelles assainies…

Après avoir raccroché les 2 téléphones, Diouf qui se levait pour aller prendre son petit déjeuner est interpellé par son collègue, le même au fonds du bureau

Diouf tu peux me rendre un service ? Tu peux répondre à ce monsieur, il m'a prêté de l'argent l'année dernière ou celle d'avant je sais plus et il veut son argent, tu peux lui dire que j'ai été envoyé en mission et que tu ne sais pas quand je rentre… Dis, tu peux ?

Diouf toujours prêt à rendre service : Allo ? ……..

22 minutes plus tard, Diouf part prendre son petit déjeuner. Pendant la demi heure qu'il consacre à se restaurer personne ne répond au téléphone, tout le monde est trop occupé.

DRINGGGGGGGG DRINGGGGGGGG

Personne ne bouge, la secrétaire Mme Diop ne peut pas attraper le combiné, elle vient de passer la deuxième couche de laque sur ses ongles, le collègue au fond du bureau est affairé à préparer son tiercé multipliant l'âge des chevaux par le code qu'il a attribué aux signes zodiacaux des jockeys tout en tenant compte des indications sur la forme des bourrins, renseignements que lui a donné hier soir son marabout en jetant les cauries.

Diouf en soupirant : Oui ?

Eh Boy, je suis le chargé de l'organisation des concerts de Youssou N'derr, on a un concert ce soir au stade de l'Amitié, faudrait nous assurer qu'on aura du jus pour faire marcher tout le bouzin… Man ! tu peux faire quelque chose pour nous ? T'as combien d'enfants pour que je t'envoie des invitations…

Diouf alléché par les invitations, son salaire servant à nourrir 12 personnes à Dakar et une bonne quarantaine au village ne lui permet pas d'offrir à ses enfants des places de concert : Pas de problème, on va couper Medina, Rebeuss et Patte d'oie…

Eh Man ! ça suffira pas ! Avec ça on aura même pas la moitié de projos de scènes…

Diouf, toujours serviable mais commençant à être un peu inquiet :Alors je coupe aussi Yoff, Pikine et le Plateau …

Tu peux pas nous mettre un peu de rab, histoire d'avoir un peu de sécurité ?Diouf atterré : Je fais sauter Point E ! Ca ira ? Et pour mes places gratuites ?

Peine perdue, l'autre a déjà raccroché.

15 h 20 Bientôt la descente, Mme Diouf qui vient d'entamer la peinture des ongles de ses orteils se demande si elle aura le temps d'y passer 2 couches avant de partir. Normalement, elle aurait pu si Mme Assatou Diouf, son ,n'était pas venue lui parler de ses inquiétudes concernant sa fille. Elle a été obligée de l'écouter, la petite à 14 ans et sort toutes les nuits les seins à moitié à l'air, le pantalon s'arrêtant 20 cm en dessous du nombril et sa mère se demande si elle n'a pas de mauvaises fréquentations…

Au fond du bureau, le collègue qui a fini ses prévisions de tiercé se demande comment il va pouvoir encore demander à son frère clandestin en Belgique de lui prêter 600 000 cfa. Bien sur "prêter" c'est pour faire joli…