Le mois passé, dans un geste désespéré, un mineur et son épouse se sont immolés dans la ville d'Oruro située à 230 kilomètres de la capitale La Paz.
L'ouvrier mineur avait convoqué les principales chaînes de télévision et les stations de radio sur la principale place de la ville, la place 10 de febrero en leur expliquant que sont geste était une manière de protester contre la demande légale qu'avait fait les agriculteurs de la région pour empêcher l'exploitation de la mine d'étain où il travaillait.
Un journaliste du canal bolivien Red Uno raconte que la femme a crié : « Mon mari a une barre de dynamite entre les mains, faites quelque chose pour nous aider, pour l'empêcher. ».
Mais, à 13 heures trente, alors que les étudiants des écoles voisines envahissaient la place, l'homme a activé l'explosif et en un instant les corps des deux personnes ont été éparpillés sur toute la place 10 de febrero. La vue était épouvantable, il y avait des restes humains partout, dans les jardins, les arbres, étalés sur les fenêtres des bâtiments – eux-mêmes teintés de sang -, qui pendaient des câbles électriques, sur les véhicules, et sur tous les trottoirs. Même les témoins involontaires de ce drame étaient couverts de débris humains.
C'est la deuxième fois qu'un mineur s'immole sur la voie publique en Bolivie, le précédent l'avait fait il y a quatre ans au beau milieu du siège du Congrès national.
Les autorités compétentes enquêtent sur ce suicide horrible autant que spectaculaire, pour tenter de déterminer les raisons exactes d'un geste si désespéré, laissant supposer que, selon eux, les causes sont plutôt à rechercher du côté du drame passionnel.
La Bolivie a été longtemps l'un des pays les plus pauvres d'Amérique latine, mais une politique très active d'ouverture sur le monde lui a permis de gravir les échelons du développement… qui profite d'abord, bien entendu, aux multinationales et à quelques familles de nantis… tandis que dans les campagnes paysans et mineurs s'affrontent pour quelques hectares d'une terre ingrate.
Et pendant ce temps, à la télévision, le président Evo Morales annonçait fièrement qu'Oruro, grâce à l'aide du Venezuela, était le premier département de Bolivie à être entièrement délivré de l'analphabétisme. Si on peut se féliciter d'une telle avancée, on se demande seulement si les priorités ne se trouvaient pas ailleurs.