Le serment de Tobrouk, un drôle de panégyrique à la gloire de son seul auteur, le philosophe BHL ! Du début jusqu’à la fin, le héros du film n’a de cesse de nous prouver, au travers des multiples épopées de son parcours, que lui revient l’incommensurable mérite de la concrétisation de ladite entreprise de sauvetage supposée extraire Benghazi d’un imminent carnage au printemps dernier. 

Qu’il soit dans un champ de bataille ou perdu dans le désert, BHL ne semble pouvoir en aucun cas se départir de sa blanche chemise largement entrouverte, de son chic costume noir, de ses reluisantes godasses quand bien même sévirait outrageusement la simplicité, la misère tout autour de lui ! 

Et le voilà qui s’active tous azimuts nous déroulant la fastidieuse panoplie de ses interventions auprès de Nicolas Sarkozy, de David Cameron, des grands de ce monde  pour accélérer la chute du guide vers le précipice et déblayer le terrain afin de le rendre propice à sa chère démocratie. 

Telle une fée, il s’ingénie avec zèle à assouvir tous  les vœux  émis par les insurgés, qu’il s’agisse d’armements, de  préparations à l’ultime rencontre du CNT avec le chef de l’Elysée de l’époque. Aussi fusent pêle-mêle de sa bienveillance, de bons, mauvais points, des consignes, des consolations théâtrales d’endeuillés… 

Les populations de ces contrées éloignées semblent donner à ce sauveur, maître en l’art de manipuler, le bon Dieu sans confession ; en témoignent quelques scènes dont celle phare où en réunion, trône l‘élégantissime philosophe au milieu de membres de tribus, des va nu pieds ou presque, buvant avec extase la moindre de ses multiples promesses avec force acquiescements ostentatoires. Et comble de tout, pour clore «ce débat» parmi tant d‘autres, BHL empli d’empathie propose une minute de silence pour les victimes libyennes, et aux affalés de se relever précipitamment pour réciter la Fatiha. Un décalage ahurissant, une dichotomie, une mascarade théâtrale à pouffer de rire si seulement il ne s’agissait de tragédie ! 

A certaines séquences de ce documentaire, spécialement quand le philosophe laisse exploser sa joie au milieu d’une gigantesque foule composée de marionnettes venues l’écouter et à qui il enjoint de scander en arabe le slogan de la victoire «França, Libya», ce n’est qu’user d’euphémisme en l’assimilant à un véritable gourou ivre de son pouvoir démesuré devant ce parterre de paumés. 

Aujourd’hui en Libye, le chaos continue de régner mais BHL bien informé des tenants et aboutissants d’une telle opération  continue lui, de se targuer de ses prouesses en  en revendiquant le bien fondé avec toujours la volonté inépuisable de poursuivre sa croisade contre certains dictateurs triés sur le volet. 

C’est vers Damas qu’il louche désormais et aspire à l’ingérence avec ou sans Résolution du Conseil de sécurité, du moment qu’à titre gracieux s’éveillent en sursaut certaines consciences dont la sienne ! Avec aussi pour ambition de dénier tout droit de légitimité à la Chine, à la Russie qui nous renvoient vers le Tibet, la Tchétchénie alors que la sienne de légitimité demeure intacte pour nous parler des droits de l’Homme même quand s’agissant des injustices commises par Israël contre les Palestiniens, il semble frappé de cécité comme de surdité. 

Puis de s’envoyer à profusion des roses de manière décomplexée, convaincu qu’il est de s’être attelé à une mission semblable à celle de la brigade Abraham Lincoln durant la guerre d’Espagne. 

En tout cas cette opération séduction lancée par Bernard Henri Lévy génère une sorte de très profond malaise tant la manipulation suinte de partout avec en off sa voix, toujours sa voix, rien que sa voix qui nous martèle inlassablement ses vérités incontournables. Pendant un peu moins de deux heures…

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