En 1974, Bertrand Tavernier recevait le Prix du Jury à Berlin et le Prix Louis-Delluc pour L'Horloger de Saint-Paul. Vingt-cinq ans plus tard, il vient d'ajouter une ligne à un impressionnant palmarès: Dans la brume électrique, son nouvel opus, a été couronné dimanche par le Grand Prix du Festival International du Film Policier de Beaune. A-t-il besoin de ces couronnes? Peut-être pas. Mais elles viennent logiquement ponctuer une carrière exemplaire, marquée notamment par l'influence du roman policier.
L'autre jour, en prélude, précisément, à ce Festival International du Film Policier de Beaune, Bertrand Tavernier discutait du genre sur un plateau de télévision (dans une émission de LCI). Les autres invités étaient Claude Chabrol, qu'il n'est pas nécessaire de présenter, et François Guérif, qui mérite un mot. Directeur littéraire chez Rivages, il a fait découvrir un grand nombre d'auteurs policiers de tous horizons, notamment à travers la collections Rivages/noir.
Face à ce fin connaisseur, les deux cinéastes faisaient assaut d'une érudition bien digérée. Ils n'étaient pas là pour épater la galerie. Plutôt pour partager du plaisir.
Et pour cause. Bertrand Tavernier, ne parlons que de lui, a tiré plusieurs films de romans policiers. En commençant par L'Horloger de Saint-Paul, déjà cité, adapté d'un roman de Georges Simenon, L'Horloger d'Everton. En finissant (provisoirement, on l'espère) par Dans la brume électrique, qui fut d'abord un livre de James Lee Burke. Et en passant par Coup de torchon, qui s'appelait 1275 âmes sous la plume de Jim Thompson. On en oublie…
Le roman policier, le polar, appelez-le comme vous voulez même si les spécialistes y voient des nuances, est une manière très efficace de sonder les sociétés, à commencer par la nôtre. Souvent situé dans les marges, il met au jour ce que, généralement, nous ne voyons pas. Soit parce que c'est caché, soit parce que nous préférons ne pas voir.
La manière noire, comme l'appelle Didier Daeninckx, prolifique auteur de polars, projette une lumière singulière sur les choses et les êtres, leur donne un relief nouveau.
Il n'est donc pas étonnant que Bertrand Tavernier – et Claude Chabrol – soient de grands lecteurs du genre. Ils s'en nourrissent même quand leurs films n'en sont pas directement adaptés. Et cela participe à leur identité de cinéastes.
Festival International du Film Policier de Beaune (Côte d’Or) – Rendez vous manqué mais prendre date pour l’an prochain.
Bien cordialement.