Au secours, la terre se meurt

Profondément déçue par le comportement de ses enfants, la terre meurtrie par toutes les blessures qui lui ont été infligées, évoque un passé encore tout proche, le début du 19ième siècle, quand elle se sentait tellement plus légère, en harmonie avec le cosmos.
 Par nécessité, se pratiquait un recyclage naturel. 
Ordures, immondices, représentaient des gisements de matières premières de grande importance servant d’engrais destinés au développement agricole pour répondre à des besoins alimentaires en augmentation. 
 Les maisons n’avaient pas encore d’eau courante, ni de chasse d’eau et donc urines et excréments étaient récupérés dans une fosse d’aisance qui était vidée périodiquement par l’industie de vidange. Sans oublier la récupération dans les rues des villes, des boues fertiles car riches en matières organiques du fait de la présence des animaux tels les chiens, les chevaux, les moutons, chèvres, vaches à l’origine de certains engrais.
Presque tous les sous- produits urbains faisaient l’objet d’un intérêt particulier dès lors qu’ils étaient transformables tel les os qui étaient vendus avec la viande et à partir desquels on fabriquait le superphosphate.
Ainsi sillonnaient les rues les chiffonniers, en quête non seulement de chiffons mais d’os aussi, transformés en objets divers tels les peignes, les tabletteries, les boites, la colle, le charbon animal, etc. 
Ce fameux charbon animal, poudre obtenue par calcination des os permettait clarification et raffinage des sucres.
Aussitôt après l’invention de la technique de mise en conserve des aliments au début du 19ième siècle, s’enclenche la récupération des sous-produits que sont les boîtes usagées, à partir desquelles on récupère l’étain de la soudure qui subira fonte et réutilisation alors que les boîtes serviront à développer l’industrie du jouet.
Le papier donne naissance au sous-produit, papier usagé, lequel assure l’expansion de la cartonnerie. Aussi se débarrassait-on des cartons pour égayer les intérieurs avec notamment la fabrication de meubles, cloisons, portes en carton. Une valorisation pour servir l’industrialisation et l’urbanisation. 
C’était la modernité ; c’était la belle époque…
Puis avec la révolution industielle, l’intensification des besoins, ces méthodes de revalorisation s’essoufflèrent en montrant leurs limites alors, progressivement l’on bascula dans une autre ère. Autre ère, autres pratiques qui allaient mettre en péril mon existence. La gigantesque force du cours des évènements prit le dessus sur des méthodes devenues archaïques.
Les matières premières qui étaient valorisables deviennent encombrantes et à détruire alors qu’émergent de nouvelles matières premières issues de la carbochimie, de la pétrochimie. 
Ainsi verront le jour de nouveaux produits comme la matière plastique dont le celluloïde redoutable rivale de l’os.
Fumiers de fermes, engrais urbains, tombent en désuétude avec la mise au point du procédé Haber-Bosh 1909 permettant l’extraction de l’azote de l’air à partir duquel se concrétiseront les fabrications d’explosifs, d’engrais azotés.
Les hommes, en découvrant les matières telles les phosphates fossiles, les grandes mines de potasse, ont peu à peu tourné le dos aux méthodes naturelles de réutilisation de matières premières organiques et de leur réinjection puis se sont mis à convoiter tout ce qui se trouvait dans mes entrailles, mes matières premières minérales non renouvelables et se sont déployés à me dépouiller pour satisfaire leurs besoins mais surtout leur instinct de pouvoir, de domination.  
Alors, ils se sont mis à innover, à produire des choses utiles et surtout inutiles avec une frénésie vertigineuse puis sont parvenus à débaucher les humains à leur insu en les détournant de l’essentiel pour les transformer en consommateurs habités par de grands faux besoins.
Puis, les poubelles se sont mises à s’amonceller, à déborder à polluer et l’on peine toujours à trouver des solutions efficaces pour leur traitement. Un traitement qui, dans certaines régions pauvres mobilisent d’innombrables mains. Des mains d’enfants, parfois, pour faire le tri des détritus en vue de les revaloriser.
Tels les chiffonniers du Caire.
Les Catadorès du Brésil quant à eux, pour survivre, se munissent de leur chariot arpentant inlassablement les grands centres urbains du Brésil, les débarassant de leurs déchets pour les acheminer vers un centre où s’opère un minutieux travail de tri destiné à revendre au poids les différents matériaux recyclables.
Ainsi grâce à leur labeur, 95% de l’aluminium est recyclé et 80% du papier.(itunes.apple.com/fr/podcast/plusconscient-net/id311033091). Alors qu’en France seuls 20% des déchets sont recyclés (consoglobe) et les 80% atterrisent dans les décharges ou les incinérateurs car tout ce qui est recyclable ne l’est pas, étant donné qu’une même entreprise gère à la fois collecte et incinération et se voit rémunérée au tonnage incinéré d’où la libre voie aux abus. Il suffit d’une présence de déchets indésirables dans le bac jaune par exemple, tel un sac en plastique pour finir incinérés ou dans les décharges plutôt que d’être recyclés.
Pourtant la terre qui croule sous le poids des ordures, des agressions émanant des activités humaines, ne cesse d’émettre des signaux  de détresse. Et tous ces déchets qui se répercutent sur ses mers, ses océans sans parler des eaux usées des déchets des égouts qui s’y déversent dans certaines régions, bouleversent tragiquement l’écosystème en allant jusqu’à décimer certaines espèces animales, végétales.
Guerres, catastrophes nucléaires apportent leurs gros lots de ravages avec des conséquences désastreuses sur la santé. En dépit de toutes ces misères environnantes, les terriens tardent à s’impliquer massivement pour stopper cette hémorragie, pour s’élever contre les guerres, contre le nucléaire pour se dégager de cette détestable spirale dans laquelle ils ont été empêtrés…

23 réflexions sur « Au secours, la terre se meurt »

  1. « au lieu de cette philosophie spéculative, qu’on enseigne dans les écoles, on peut en trouver une pratique, par laquelle connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. »
    [u][b]les fermiers US aux prises avec de nouvelles variétés d’herbes résistantes au Roundup [/b][/u](New York Times)
    Descartes, Discours de la méthode

  2. Bonsoir Coquelicot,
    Votre article est magnifique.
    Vous nous montrez si bien la voie que nous avons choisis…
    On est devenu esclaves et la terre victime de cette soif de rendre la vie toujours plus confortable, pour notre bon plaisir.
    « Une mystérieuse île de déchets dans le Pacifique »
    [url]http://www.rue89.com/2008/02/02/une-mysterieuse-ile-de-dechets-dans-le-pacifique[/url]

  3. Bien, alors que fait on ?

    Vous avez bien entendu abandonné votre voiture, vous produisez votre électricité a l’aide de panneaux solaires sur votre toit, vous avez renoncé au progres, vous ?

    Parce que le progres, seul, permet de nourrir, loger, chauffer etc les milliards d’etres humains qui n’etaient pas présents à cet « age d’or » du début du 19e siecle.

    Parce que la nature est notre ennemie depuis toujours, source de dangers innombrables, et elle nous le rappelle bien souvent encore aujourd’hui.

    Bien sur, science sans conscience n’est que ruine de l’ame, mais ne cedons pas à une nostalgie d’un état de nature fantasmé ; comme Voltaire le faisait dire à Candide : « cultivons notre jardin »…

  4. Julien,
    Je n’ai pas jugé nécessaire d’être plus explicite pour mettre l’accent sur la dégradation de la nature en l’espace de qques décennies. Peut-être ai-je eu tort??

  5. mlsb,
    Sans avoir entiàrement renoncé au progrès, j’ai adopté une posture de plus en plus écolo : vélo, transports en commun, tri sérieux des déchets ménagers, eau du robinet, achat de fruits et légumes de saison etc…
    Des petits gestes multipliés par un grand nombre peuvent être efficaces.

  6. [quote]Bien, alors que fait on ? [/quote]

    Ben ça dépend. Je pense qu’on est quand même de plus en plus nombreux, enfin j’espère, à vivre et à consommer intelligemment.

    [quote]Vous avez bien entendu abandonné votre voiture, vous produisez votre électricité a l’aide de panneaux solaires sur votre toit, vous avez renoncé au progres, vous ? [/quote]
    Tout ça est aussi source de pollution…
    Sauf pour le renoncé au progrès.
    La vrai solution ça serait de changer profondément de mode de vie, de voir notre façon de vivre autrement. De ne plus avoir besoin de choses inutiles, de caprices qui détruisent des hommes et la nature, de divertissements stupides à but HYPER lucratifs.
    Nous vivons comme des hamsters en cage, on tourne la roue car on s’ennuie, et une jour la vie s’arrête.
    La solution faut pas l’attendre, faut la vivre!
    Souvent les gens disent » oui mais c’est quoi la solution »? Quand on vous pose cette question, souvent vous vous sentez bête, car vous vous rendez compte de vos limites, qu’est-ce qu’un être humain tout seul pourrait-il bien faire?
    La c’est le vide. C’est pour ça, la solution est se trouvera quand beaucoup de gens l’auront chercher en eux…
    Ne plus être les esclaves de certains. Vivre ensemble et avancer avec sérénité.

  7. Excellent article, merci Coquelicot.

    Mlsb: nous les écolos, faisons l’effort de prôner de nouvelles alternatives créatrices de nombreux emplois et les industriels, lobbies, nous livrent,avec l’aide de leurs mercenaires les politiques, une guerre sans merci.

    10.000 cancers de plus cette année, des tonnes de médicaments chimiques déversés dans les eaux (la pilule contraceptive et ses conséquences désastreuses sur les poissons) mais quand nous proposons des alternatives médicales – hypnose, bio-psychogénéalogie – on crie  » sectes « ! et on publie des articles bidons pour déconsidérer ces thérapies.

    Faire évoluer les consciences sera ardu : le seul fait que je transporte mes courses dans une carriole (fabrication scandinave) me vaut des quolibets de la part de voisins qui sortent leur voiture pour faire 100m.

  8. Mathilde, je vous en remercie infiniment.
    Affolant de voir des personnes, ne rien changer à leur comportement malgré toutes les catastrophes déjà énumérées. On appelle certaines futilités absurdes : confort, plaisir…
    De pauvres illusions.
    Combien de générations sacrifiées faudra-til pour extirper cette moche mentalité?

  9. Cinquièmevitesse,
    Adoré votre vidéo que je compte revisionné tout à l’heure après avoir pris ma dose vitale de nature…

  10. En passant ,je me permets de faire de la pub pour les Amérindiens de Guyane Française qui se battent pour des causes nobles dont l’avenir de la nature,si vous avez la curiosité d’allez jeter un coup d’oeil sur leur site ,je pense que vous ne serez pas décus.
    http://www.okamag.fr
    Merci pour cet exellent article

  11. « 10.000 cancers de plus cette année, des tonnes de médicaments chimiques déversés dans les eaux (la pilule contraceptive et ses conséquences désastreuses sur les poissons) mais quand nous proposons des alternatives médicales – hypnose, bio-psychogénéalogie – on crie  » sectes « ! et on publie des articles bidons pour déconsidérer ces thérapies. »

    L’hypnose et la « biopsychogénéalogie » pour remplacer la pilule contraceptive, c’est une blague ?

    10000 cancers en plus, il y a une part liée au dépistage plus précoce des cancers (sein, ovaire, peut etre prostate bientot) tout de meme. De plus, le cancer est également une maladie du vieillissement. A l’etat de nature, les gens ne vivaient pas assez vieux pour développer un cancer…

    Quelle était l’esperance de vie au 19e siecle ? au moyen age ?

    Pour le fait de ne pas prendre la voiture pour 100m je vous approuve totalement.

    Et sinon, l’utilisation d’internet ca pollue pas mal non ? c’est indispensable internet ?

    En tout cas si vous avez des liens serieux et fiables (sur pubmed ou Nature, NEJM, JAMA ou autres revues scientifiques) pour vos theories sur la contraception, je les lirai avec plaisir.

  12. Mecarryce, merci beaucoup à vous. Lien très intéressant.
    Sans foi ni loi, les hommes. Ils déciment tout ce qui, sur leur passage, risque de faire obstacle à leur ascension virtuelle…

  13. BOnjour Coquelicot,

    Contente que la vidéo vous est plu!
    Dans le même style, il y a évidemment « La Belle verte » de Coline Serrault.
    Extrait:
    {dailymotion}x84dge{/dailymotion}

  14. Et au passage « C’est quoi la vérité? »
    [url]http://www.come4news.com/index.php?option=com_content&task=view&id=28975[/url]
    😉

  15. Cinquièmevitesse, bravo pour cet excellent article!
    Comme vous, à 20ans je me sentais enfermée dans un carcan étroit, dans un pays en guerre avec des mentalités un peu rigides, à mon goût. J’ai foutu le camp pour les études et pour la liberté…Je ne l’ai toujours pas trouvée, la liberté, et curieusement, je me suis mise à aimer tendrement le pays et le peuple que j’avais abandonnés. Je me suis mise ici, en France, à apprendre ma langue que je ne connaissais même pas…Longue histoire sans intérêt.
    Je déborde pour dire que je cours toujours…La vérité?

  16. [b]Bonsoir Coquelicot,
    Avec du retard, j’ai enfin retrouvé cet article que j’ai survolé hier en rentrant de « vacances ».

    Que dire, si ce n’est que votre écriture coule comme une eau pure, que la construction de cet article est parfaite, que vous mettez des images sur « des mots », et comme le disait un commentateur un peu plus haut, la chronologie est époustouflante.

    Nous voyageons d’un siècle à l’autre, en vivant à chaque ligne la dégradation de cette terre nourricière, qui n’en peut plus d’absorber nos déchets, devenus indigestes pour elle

    Félicitaions, « gentil » Coquelicot.

    Vous êtes EXCELLENTE!!
    Amicalement
    Sophy[/b]

  17. Sophy,
    Votre commentaire me touche, me flatte.Je vous le retourne car je vous trouve SUPERBE.
    Merci.

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