No pétanque today! (en anglais : no jack today ?). C’est le titre du nouvel album pas cochonné d’Arsène Perbost. Perbost, qui ça ? Ah, Arsène ! Il se nomme donc Perbost, et à voir ce que cela donne sur Google, il n’est pas connu que du faubourg Montmartre à la rue du Château-d’Eau… En sus, l’écoutant interpréter son répertoire d’auteur-compositeur, c’est très différent des goualantes que nous entonnons avec lui les soirs de bamboches sous les balcons des fêtards pour tenter d’écornifler. Mais ce n’est pas mal non plus, et même mieux que cela…
Il a la tête de l’emploi, Arsène.
Une vraie gueule.
Pas trop à la Bernard Lavilliers susurrant des chansons douces du Salvador, plutôt celle d’un Nougaro, celui qui, torchonné, beugle sous le balcon de Marie-Christine la complainte du pauvre gars Armand, de Vassiliu.
Cela étant, il connaît tout de la chanson française, depuis Gaston Couté à Isabelle Mayereau, en passant par Boby Lapointe, Richard Gotainer, jusqu’aux prochains titres de Carla Bruni (pas encore sorti… mais… chut !).
Très éclectique.
Cela se ressent peu dans son dernier album dont le titre n’en est pas un (il n’y a pas de banane, ni d’os de pétanque dedans, mais « Belle et bien vraie », « Bout d’essai », « Libre fuite », « Les Pieds dans l’eau », &c.). Il a pratiquement tout fait et composé, sauf « À Cause » (paroles d’Allain Leprest) et des petits bouts de duos interprétés avec Anne So (Anne-Sophie Crantelle, qu’on l’aime !).
Comme cela fait des lustres que je n’ai plus chroniqué de la chanson, j’ai tardé à me lancer, non sans avoir auparavant testé avec Inna et Julya, qui ont aimé.
Il module tendre et doux, d’une chaude voix grave, profonde, de celles qui leur fait venir la larme au coin de l’œil quand, vers le très tard, elles enchaînent des clips slaves.
Crooner, dépouillé au piano… sauf qu’en réécoutant plusieurs fois, j’ai ressenti qu’il ne chantait pas que pour les filles, mais aussi pour les gars, plutôt ceux qui ont un fort vécu et pas trop peur du devenir. Qui a vécu, vivra, verra…
Bref, aussi, pas que, des chansons à masser, à embrasser derrière l’oreille, puis oser…
« Va pour la vie et le diable à mes trousses/Qui sait où j’irais » (« Qui sait »). En « doux jobard » (« Les cinglés »), il dévale et « course le mètre au galon (…) des boulevards » (« Paris’Jungle »). Cela n’a pas tout à fait la limpidité des poèmes épurés de William Sheller, mais, sait-on jamais, arrangé et interprété autrement, peut-être qu’on s’y tromperait. Dur, dur, la chronique de chanson quand on a perdu l’habitude, celle de se laisser aller, bercer, et qu’on se rattrape aux branches en alignant des références…
Peut-être faut-il remettre un peu de craie dans l’encrier avant de se recoincer au clavier. Ach, cela me reprend (on l’entend moins, Catherine Lara, et c’est fort dommage). Gammes. Plutôt réécouter.
Cela tombe bien, je ne me souviens absolument plus de ce vieil air entièrement sifflé, et l’Online Guide to Whistling Records ne m’aidera pas, tant mieux. Arsène siffle dès le premier morceau mais pas dans les deux suivants, très rythmés, scandés, allègres. Dommage. Mais selon les titres, heureusement, cela le reprend. Pour des trucs dansants, enlevés, ou pas. Ou pas, comme cette pavane avec pour seul accompagnement une guitare sèche détachant chaque note. Il y a aussi du banjo et même du glockenspiel. ComSpelling & trilled (fine allusion coquillhasardeuse, voir le livret de l’album).
Mais, suis-je niais, moi, à débiter mes phrases comme si elles devaient paraître seulement sur papier.
Alors que, sur Myspace, vous pouvez écouter trois titres de ce dernier album.
Et aussi « Terre », d’un précédent que n’aurait pas renié Léo ; et qui vous ferrera (facile, ok, mais je n’ai pu m’en empêcher).
Ses prochaines dates de concert sont plutôt sur Facebook où il partage des liens vers les musiques qu’il aim-euh (dont celles d’Hubert-Félix Thiéfaine ; mais bon sang, c’est bien sûr, comment avais-je pu oublier HFTsupra).
J’y apprends qu’il travaille « au chapeau » assez souvent au Connétable et à l’Ogresse.
Au Limonaire, de même (très bien pour filer ensuite, très tard, jusqu’au Tambour, rue Montmartre, car cela descend en pente douce).
Il y a aussi un type qui écrit ‘hachement mieux que moi sur Arsène. C’est Filipe, sur Krinein. « C’est un type incroyable qui se lève la nuit pour s’installer nu au piano, qui miaule d’amour et mêle ses mots de hululements d’animaux, qui siffle comme s’il connaissait le langage des… », allez, on va dire « faunes » pour ne pas répéter « animaux ». Bien vu. Ah, zut, plus bas, cela se gâte derrière. Filipe apprécie mitigé le second album, Installez-vous (2005). Eh, on ne peut pas plaire à tout le monde. Et la première phrase devait être pompée sur un argumentaire. Pas grave, cela m’a permis de retrouver un air d’Arsène totalement sifflé (titre inconnu) sur la page du French Whistler. Ailleurs, un pot pourri sifflé sur YouTube. Et aussi de m’apercevoir qu’il avait changé de label (précédemment, c’était Bivouac Prod, là, c’est Majunga Productions).
Calva Calvacade (serait-ce la fille de la photo ? qu’Arsène me présentera « peut-être » ; faux frère, va…), contrairement à Filipe, a beaucoup apprécié TOUTES les chansons d’Installez-vous. « Même s’il a vraiment son style à lui et son monde (…) on pourrait dire qu’Arsène serait un Jacques Higelin timide, moins survolté que son aîné… ». Toujours ces comparaisons… de circonstance, car, « moins survolté », pas tout jour ni en tout lieu. Ni « par pensée, par parole, par action et par omission, » comme on dit, faussement contrit. D’ailleurs, dans son premier album, L’Éveil amoureux de la bête (2000) – enfin, le troisième, mais le premier sorti dans les bacs – il était bien moins sage, et à tout moment, il pourrait le redevenir. Bob Solo, lui (enfin, l’un des Bob Solo, car il en est plusieurs, comme quoi Brel avait raison, on est rarement tout seul), a vraiment aimé TOUTE la « Pas de pétanque ce jour ». Moi, pas déjà : cela viendra, assurément, en concert. Là, plus j’écoute, moins les trucs qui me collent des bleus à l’âme me défrisent, et ceux qui me jettent direct du baume au cœur me sonnent plus, comment, anodins ? Ou inversement.
Pour qui n’adhère pas d’emblée, le Perbost nouveau peut vous laisser tiède (comme en sabots caoutchoutés sur lepermafrost ; non, c’est juste pour l’allitération), genre bercé dans une sorte de bain-marie salé (pour la flottaison), pas du tout déplaisant. Gentiment balloté. À la réécoute, c’est déjà légèrement différent, voire limite déférent : quelle voix ! Puis il vous advient que les arrangements se goupillent beaucoup plus subtils que perçus initialement. Puis, puis… Notez bien qu’on peut être conquis immédiatement, car rien ne cloche vraiment dedans. Et y revenir incontinent. Ce doux barde charrie du lourd, du consistant, du râpeux. Pas seulement ! du fin ! du délié ! de l’inventif ! du découpé à l’eustache, qui ne trompe ni ne ment ! Sans risque, per il best, Perbost !
…vraiment une drôle d’oiseau !!!
Ben, voui, Anton. Un doux jobard (là, ça y est, je l’ai placé). Danse-le avec Océane.