Un déménagement…
D’un côté, la perspective des cartons, emballer vos souvenirs avant de faire le ménage entre vos futurs ex-quatre murs. Et de l’autre, la recherche d’un nouveau cocon.
De nos jours, rien de plus simple. Une petite tape dans le dos de ce cher Google et le voilà qui vous dégobille une liste impressionnante de sites ne demandant qu’à accueillir votre armoire qui prend trop de place et votre envie de vue dégagée. Tout commence donc comme dans un conte de fées des temps modernes. Vous avez toutes les cartes en main, et Blanche-Neige en a même des envies de tartes aux pommes.
Seulement voilà, la Reine des embrouilles et les pépins qui l’assaisonne ne sont jamais très loin.
Ainsi, dans cette jungle immobilière où les offres de location grandissent de concert avec l’augmentation de leur coût, la pointure des fraudeurs a su se faire une place au coeur de ces hautes herbe, vous guettant et attendant le moment idéal pour vous la couper sous le pied.
Retour sur le business crapuleux du "paillasson virtuel".
Après vous.
Plusieurs articles dans la presse, dont un dans Le Parisien et de nombreux témoignages fleurissant sur les forums et autres sites consacrés. Alerte rouge. Les arnaques au logement n’ont jamais été si présentes sur la Toile. Parmi elles, une épidémie d’affaires au mandat-cash a déjà fait son lot de victimes. Cette dernière, sévissant dans le domaine des annonces de particulier à particulier, se niche discrètement sur des sites que l’on ne présente plus tels que Leboncoin, eBay, Paruvendu…
Reconstitution d’une contamination
Noyé(e) sous un flot d’annonces en tous genres, l’une d’entre elle vient piquer votre curiosité. Elle a tout d’une grande : la surface de vos rêves, un emplacement d’un idéal à en croire que la ville s’est construite autour de ce logement et ne parlons pas de ses prestations plus qu’attractives. Le coup de grâce ? Les photos. Entre trois et huit clichés d’un intérieur immaculé, agencé et décoré (dans le cas des locations meublées) avec beaucoup de goût. Et son prix ? Un paradis en emporte-pièce. Le texte légendant les illustrations passe le vernis sur les deux premières couches de perfection avec eau courante. La dernière phrase vous invitant à un premier contact par mail UNIQUEMENT, vous vous empressez naturellement de faire dire à votre clavier combien cette annonce a retenue votre attention.
Quelques heures plus tard, le propriétaire du bien tant convoité vous gratifie d’une première réponse des plus cordiales. Dans la plupart des cas, il vous dira chercher un locataire uniquement "pour ne pas laisser le logement innocupé". Le rédacteur ira peut-être jusqu’à vous dire que l’argent récolté n’est en aucun cas sa priorité. Quel charmant personnage. Assaisonnant son discours de quelques informations complémentaires et d’une ou deux photos histoire de vous achever, il est déjà question d’une éventuelle visite à l’issue de laquelle la signature du bail ne dépendra que de vous. Vous avez donc les pleins pouvoirs, et remerciez rapidement votre interlocuteur/trice avant de lui fournir les quelques primaires informations demandées avant la visite. Ces dernières tiennent en général en votre nom, le nombre de personnes qui investiront les lieux, vos coordonnées, et la durée du bail.
Là encore, la réponse ne se fait pas attendre. Et c’est alors que le chateau de cartes que votre encéphale avait bâti s’effondre (et DOIT s’effondrer) à mesure que vous prenez connaissance du dit mail. Oui, parce que vous comprenez, les auteurs de ces annonces ont, dans leur grande majorité, des vies parallèles. Le même schéma s’installe, inlassablement. Ces propriétaires vivent tous loin (option France et étranger incluses) du lieu de location, mais tenant à se présenter à vous lors de la visite, le trajet est important est donc loin d’être anodin. Ne mettant bien évidemment pas votre honnêtement en jeu, les malheureux se sont déjà vu attendre en vain un potention locataire. De plus, certains n’avaient pas les moyens avancés de louer le bien. Vous saisissez donc l’importance d’obtenir une garantie de votre engagement et de votre honnêteté. C’est à ce moment précis, juste après ce concerto pour violon littéraire qu’entre en jeu le fameux mandat cash. Sous vos applaudissements. Rompez.
Ainsi, pour obtenir une certaine garantie qu’ils auront pris soin de légitimer quelques lignes plus haut, les propriétaires vous demanderont donc de vous rendre au plus vite dans un bureau de poste afin d’y remplir ledit mandat cash, correspondant généralement à la somme d’un mois de loyer et d’une caution (leurs montants étant naturellement variables selon les biens et les régions). Bien sûr, vous diront-ils, vous conserverez vos identifiants (qui permettent d’avoir accès à l’argent) jusqu’à votre visite, à l’issue de laquelle, si le logement vous séduit, vous remettrez les identifiants, alors mués en un pass VIP pour l’arnaque avec un grand culot. La magie opérant, vous verrez alors les pseudo propriétaires disparaitre de la surface du globe, votre capital en poche. Sous votre ahurissement. Pleurez.
Ainsi, si beaucoup se disent assez fûtés pour sentir l’arnaque et ne pas se laisser piéger, les cibles préférées de ces fraudeurs sans scrupules restent les étudiants, sans doute plus vulnérables et rapidement attirés par des tarifs tutoyant l’utopie contemporaine. Pendant que les médias ne cessent de marteler les futurs locataires de mises en garde appostrophant qu’une demande d’argent avant signature est interdite par la loi, les fraudeurs poursuivent leur pollution, s’inventant une identité mariée à une adresse mail – lesquelles à première vue ont tout de véritables.
Et si vous conservez un doute quant à la véracité d’une telle technique, l’avocat des grandes causes déguainera sous vos yeux son dernier argument : dans la totalité des situations, lorsque vous ferez sonner aux oreilles de ces propriétaires virtuels les doux noms de "répression des fraudes" ou "articles de loi", vous deviendrez le magicien d’une évaporation immédiate de tout contact avec ces derniers, en espérant les faire réfléchir à deux fois avant la publication d’une autre annonce en carton et clôturant cette affaire, cash. Et à double tour.