C’est un véritable pavé dans la mare du gouvernement fédéral canadien que le quotidien Le Devoir vient de jeter en révélant que chaque contrôleur des diverses allocations sociales se voit fixer un quota individuel : il doit « dégraisser » le nombre d’allocataires pour réaliser 485 000 CAD (ou davantage) par an d’économies.
Diane Finley, ministre fédérale des Ressources humaines, s’en défendait. Mais « elle est prise en flagrant délit de camouflage », indique Le Devoir qui révèle un document officiel. Un formulaire destiné aux employés fédéraux canadiens chargés de contrôler les demandeurs d’emploi indemnisés leur enjoint de débusquer des fraudes, de récupérer des prestations ou de trouver moyen de mettre fin à leur versement. L’objectif est de récupérer 485 000 dollars canadiens (soit plus de 358 000 euros) par année et par fonctionnaire.
Les fonctionnaires du service d’intégrité sont chargés du contrôle de diverses indemnités ou allocations (les benefits en anglais) et de vérifier la situation des allocataires.
Le document intitulé « Entente sur le rendement et l’apprentissage », reproduit par le quotidien, indique clairement que les dossiers doivent être réglés trimestriellement et aboutir à « réaliser une moyenne de 485 000$ en économies annuelles ». Il est enjoint d’appliquer la mesure la plus dissuasive pour les fraudes ou omissions délibérées. Les fonctionnaires sont soumis à des évaluations fréquentes, au moins quatre fois l’an, la première phase étant qualifiée «&bnsp;attentes de rendement ».
Afin de favoriser l’émulation, les dossiers traités sont ensuite validés par un collègue, lui aussi soumis à des objectifs. Les économies consistent à ne pas verser d’indemnités ou d’en récupérer.
Le Devoir avait reçu et publié un témoignage d’un agent voici trois semaines, s’attirant les démentis les plus formels. La ministre avait nié catégoriquement devant les députés. Puis admis que des quotas indicatifs régionaux, « des objectifs globaux », avaient été déterminés.
Pour le Québec, l’objectif est de faire baisser le montant des prestations (versées ou récupérées) d’environ 3,5 %. Environ 1 200 visites domiciliaires devaient être menées jusqu’à fin mars. D’autres mesures visent à moins indemniser les travailleurs saisonniers devant accepter des salaires réduits d’un tiers.
Déjà, en 1998, un système de quotas avait été instauré au Canada. Il était lié à des menaces de licenciement de 150 contrôleurs.
Les mesures actuelles visant les saisonniers risquent de priver les employeurs d’une main d’œuvre légale, ont estimé des spécialistes du recrutement.