Afrique : Président un jour, président pour toujours

Sans aucune consultation populaire préalable, le Cameroun vient de modifier sa Constitution pour supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels. Une tendance qui gagne de nombreux pays d’Afrique. Paul Biya, 75 ans, au pouvoir au Cameroun depuis 26 ans, a finalement obtenu ce qu’il voulait. Le 10 avril dernier, il a fait modifier la Constitution pour supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels introduite en 1996. Il rejoint ainsi la liste des présidents africains qui ont changé leur loi fondamentale de leur pays pour se maintenir à leur poste : Idriss Déby (Tchad), Omar Bongo (Gabon), feu Gnassingbé Eyadema (Togo), Lansana Conté (Guinée), Zine El Abidine Ben Ali (Tunisie), etc. En Algérie, Abdelaziz Bouteflika serait sur la même voie.

Au Cameroun, l’Assemblée nationale où le parti au pouvoir est largement majoritaire (85 % de sièges) à la suite des législatives contestées de juillet 2007, a facilement adopté les modifications proposées. Cette révision doit permettre au Président camerounais de briguer un mandat supplémentaire en 2011. En annonçant en décembre dernier son intention de modifier la Constitution, Paul Biya s’était justifié en arguant que l’article à réviser limitait la volonté populaire, « limitation qui s’accorde mal avec l’idée même de choix démocratique ».

Un avis loin d’être partagé par tous dans son pays… Pour John Fru Ndi, le leader de l’opposition camerounaise, « la limitation du mandat présidentiel sert à contrôler les démocraties qui ne sont pas encore bien assises et où les pratiques de la gouvernance tardent à s’installer, comme au Cameroun« . « Le Cameroun ne saurait être une monarchie où une personne, quelle que soit sa compétence, peut prétendre rester à la tête de l’État indéfiniment« , complète un membre de Plateforme de la société civile pour la démocratie qui regroupe plusieurs associations.

Absence de débats

En Afrique, un nombre grandissant de présidents s’accrochent au pouvoir, le plus souvent à coups d’élections contestées. Seul le verrou de limitation constitutionnelle des mandats semble alors pouvoir garantir l’alternance. À l’association Collectif des citoyens patriotes, on avance une explication : « En Afrique, quel que soit le régime et le pays, au bout de dix années de pouvoir et par le fait des nominations, toute l’administration est déjà totalement inféodée au dirigeant en place. On aboutit ainsi à la dictature de cet individu sur l’ensemble du personnel administratif, des hommes d’affaires, des artistes, etc« . Comme cette même administration organise les élections, c’est tout ‘naturellement‘ que le pouvoir en place reste majoritaire.

Pour éviter la voie parlementaire qui s’assimile souvent à une voie de garage, l’Union européenne, à la suite de l’ambassadeur des États-Unis, a souligné en mars dernier l’importance « de soumettre les propositions de révision constitutionnelle à un débat large, libre et ouvert, incluant toutes les composantes de la société camerounaise« . Il n’en a rien été. Au contraire.

En février à Douala, un rassemblement de l’opposition contre la révision a fait deux morts tués par balle. Le même mois, la répression des jeunes qui manifestaient contre la hausse du prix du carburant et des produits de première nécessité et aussi contre la révision constitutionnelle a fait entre 40 et 100 morts. Lapiro de Mbanga, musicien auteur de « Constitution constipée« , et Joe la Conscience, qui a chanté « Emmerdement constitutionnel » sont en prison, officiellement, pour avoir commandité des émeutes pour l’un et pour « Réunion et manifestation interdite » pour l’autre.

Dans les médias d’État, les avis défavorables à la révision constitutionnelle sont passés sous silence. Des radios et des télévisions privées sont par ailleurs fermées pour divers motifs. Avec la modification de la constitution, les grandes villes sont fortement militarisées.

Marche arrière

Le continent semble faire marche arrière. En 1990, les dirigeants africains avaient en effet accepté, à contrec?ur il est vrai, le multipartisme à la suite de la conférence de La Baule où feu le président François Mitterrand avait lié l’aide à l’ouverture démocratique. Pour tenter de garantir l’alternance, dans de nombreux pays le pouvoir et l’opposition ont limité à deux le nombre de mandats consécutifs (de 5 ou 7 ans selon les pays).

Mais, de nombreux dirigeants n’ont plus voulu quitter leurs postes et sont revenus aux anciennes dispositions constitutionnelles. Certains parce qu’ils s’inquiètent aussi des possibles accusations pouvant les mener devant le Tribunal pénal international le jour où ils ne seront plus couverts par l’immunité présidentielle. Ce recul dans les pays francophones a même inspiré certains présidents de pays anglophones comme Yoweri Museveni, en Ouganda, qui, en 2005, a amendé la Constitution pour être reconduit à la présidence en 2006.

Au Bénin, l’ex-président Mathieu Kérékou s’est en revanche heurté à l’hostilité des députés et de la société civile, lorsqu’il a exprimé son intention de réviser la Constitution. Une exception qui confirme la règle. (Agence Syfia 06/05/2008)

Sans aucune consultation populaire préalable, le Cameroun vient de modifier sa Constitution pour supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels. Une tendance qui gagne de nombreux pays d’Afrique. Paul Biya, 75 ans, au pouvoir au Cameroun depuis 26 ans, a finalement obtenu ce qu’il voulait. Le 10 avril dernier, il a fait modifier la Constitution pour supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels introduite en 1996. Il rejoint ainsi la liste des présidents africains qui ont changé leur loi fondamentale de leur pays pour se maintenir à leur poste : Idriss Déby (Tchad), Omar Bongo (Gabon), feu Gnassingbé Eyadema (Togo), Lansana Conté (Guinée), Zine El Abidine Ben Ali (Tunisie), etc. En Algérie, Abdelaziz Bouteflika serait sur la même voie.

Au Cameroun, l’Assemblée nationale où le parti au pouvoir est largement majoritaire (85 % de sièges) à la suite des législatives contestées de juillet 2007, a facilement adopté les modifications proposées. Cette révision doit permettre au Président camerounais de briguer un mandat supplémentaire en 2011. En annonçant en décembre dernier son intention de modifier la Constitution, Paul Biya s’était justifié en arguant que l’article à réviser limitait la volonté populaire, « limitation qui s’accorde mal avec l’idée même de choix démocratique ».

Un avis loin d’être partagé par tous dans son pays… Pour John Fru Ndi, le leader de l’opposition camerounaise, « la limitation du mandat présidentiel sert à contrôler les démocraties qui ne sont pas encore bien assises et où les pratiques de la gouvernance tardent à s’installer, comme au Cameroun« . « Le Cameroun ne saurait être une monarchie où une personne, quelle que soit sa compétence, peut prétendre rester à la tête de l’État indéfiniment« , complète un membre de Plateforme de la société civile pour la démocratie qui regroupe plusieurs associations.

Absence de débats

En Afrique, un nombre grandissant de présidents s’accrochent au pouvoir, le plus souvent à coups d’élections contestées. Seul le verrou de limitation constitutionnelle des mandats semble alors pouvoir garantir l’alternance. À l’association Collectif des citoyens patriotes, on avance une explication : « En Afrique, quel que soit le régime et le pays, au bout de dix années de pouvoir et par le fait des nominations, toute l’administration est déjà totalement inféodée au dirigeant en place. On aboutit ainsi à la dictature de cet individu sur l’ensemble du personnel administratif, des hommes d’affaires, des artistes, etc« . Comme cette même administration organise les élections, c’est tout ‘naturellement‘ que le pouvoir en place reste majoritaire.

Pour éviter la voie parlementaire qui s’assimile souvent à une voie de garage, l’Union européenne, à la suite de l’ambassadeur des États-Unis, a souligné en mars dernier l’importance « de soumettre les propositions de révision constitutionnelle à un débat large, libre et ouvert, incluant toutes les composantes de la société camerounaise« . Il n’en a rien été. Au contraire.

En février à Douala, un rassemblement de l’opposition contre la révision a fait deux morts tués par balle. Le même mois, la répression des jeunes qui manifestaient contre la hausse du prix du carburant et des produits de première nécessité et aussi contre la révision constitutionnelle a fait entre 40 et 100 morts. Lapiro de Mbanga, musicien auteur de « Constitution constipée« , et Joe la Conscience, qui a chanté « Emmerdement constitutionnel » sont en prison, officiellement, pour avoir commandité des émeutes pour l’un et pour « Réunion et manifestation interdite » pour l’autre.

Dans les médias d’État, les avis défavorables à la révision constitutionnelle sont passés sous silence. Des radios et des télévisions privées sont par ailleurs fermées pour divers motifs. Avec la modification de la constitution, les grandes villes sont fortement militarisées.

Marche arrière

Le continent semble faire marche arrière. En 1990, les dirigeants africains avaient en effet accepté, à contrec?ur il est vrai, le multipartisme à la suite de la conférence de La Baule où feu le président François Mitterrand avait lié l’aide à l’ouverture démocratique. Pour tenter de garantir l’alternance, dans de nombreux pays le pouvoir et l’opposition ont limité à deux le nombre de mandats consécutifs (de 5 ou 7 ans selon les pays).

Mais, de nombreux dirigeants n’ont plus voulu quitter leurs postes et sont revenus aux anciennes dispositions constitutionnelles. Certains parce qu’ils s’inquiètent aussi des possibles accusations pouvant les mener devant le Tribunal pénal international le jour où ils ne seront plus couverts par l’immunité présidentielle. Ce recul dans les pays francophones a même inspiré certains présidents de pays anglophones comme Yoweri Museveni, en Ouganda, qui, en 2005, a amendé la Constitution pour être reconduit à la présidence en 2006.

Au Bénin, l’ex-président Mathieu Kérékou s’est en revanche heurté à l’hostilité des députés et de la société civile, lorsqu’il a exprimé son intention de réviser la Constitution. Une exception qui confirme la règle. (Agence Syfia 06/05/2008)

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