Après les casseroles traînées par deux membres du gouvernement, André Santini et Bernard Laporte, voilà que le conseiller spécial de Fadela Amara vient d'être condamné pour escroquerie. Dire que Sarkozy accusait la gauche de "soutien à la délinquance" !

"L'autorité et le respect, c'est de notre côté. La fraude et le soutien à la délinquance, c'est de l'autre côté", déclarait un Nicolas Sarkozy en campagne électorale fin mars, à la suite des incidents de la gare du Nord. "Où a-t-il vu que j'ai soutenu les fraudeurs? C'est lui qui a prononcé l'amnistie pour Guy Drut", avait alors protesté Ségolène Royal, et c'était bien vu : intraitable avec le resquilleur pour 1,40 euros, compréhensif avec les 120 000 euros perçus à titre d'emploi fictif par le député olympique et ancien ministre UMP, comme il sait l'être envers les malversations de son ami Patrick Balkany. C'est comme ça avec la droite sarkoziste : tolérance zéro pour les petits voyous mais pas un mot sur les délits financiers dans sa loi de prévention de la délinquance… Mais ça, c'était avant l'arrivée au pouvoir. Et que constate-t-on aujourd'hui ?

Que "le soutien à la délinquance" que Sarkozy dénonçait du côté de la gauche (et aussi du Moudem, pour faire bonne mesure) est une accusation que l'on pourrait retourner contre lui, à en juger par le pédigree de certains de ses amis, jusqu'au coeur du gouvernement.

Il y a André Santini, secrétaire d'État auprès du ministre du Budget, chargé de la Fonction publique, mis en examen pour "prise illégale d'intérêt", "faux" et "détournement de fonds publics", dans l'affaire du projet (avorté) de création d'un musée d'art contemporain à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), la ville dont il est député-maire.

Il y a Bernard Laporte, secrétaire d'Etat chargé des Sports sous le coup d'enquêtes fiscales pour "présomptions de détournements d'actifs, dissimulations de recettes d'établissements, majoration artificielle des charges, double comptabilité, travail au noir", et contre qui une plainte a été déposée pour "favoritisme" et "tentative d'extorsion" (toutes affaires en passe d'être soigneusement étouffées, ainsi que l'explique Marianne).

 Pour ces deux cas, Sarkozy met en avant la présomption d'innocence. Mais il faut désormais ajouter à cette liste Mohammed Abdi, conseiller spécial de Fadela Amara, secrétaire d'Etat à la Politique de la ville (et secrétaire général de "Ni putes ni soumises"), pour lequel le bénéfice du doute est impossible. Il vient en effet d'être condamné à 18 mois de prison (dont 12 avec sursis) pour escroquerie. C'est Le Parisien d'aujourd'hui qui révèle l'arrêt de la Cour de cassation, rendu dans la semaine du 5 novembre, confirmant le verdict de la Cour d'appel datant de mai 2006. Les faits remontent à 1992, lorsque Abdi travaille pour une société de gardiennage, FBL-Services : "Directeur des ressources humaines, il s'occupe des contrats de travail, explique Le Parisien. Par souci de rentabilité, FBL-Services, en mauvaise situation financière, a recours à des contrats de qualification. Dans ce domaine, la loi oblige l'employeur à fournir au jeune embauché une formation assurée soit à l'extérieur, soit au sein de l'entreprise à condition d'être agréée. En contrepartie, l'employeur est exonéré de certaines charges patronales et peut obtenir le remboursement des frais de formation engagés auprès de divers organismes. Pour former ces jeunes, FBL passe par la société Distri Conseil, puis Access Centre Auvergne, fondée en mars 1997 par Abdi. Deux coquilles vides. (…) Le mécanisme de la fraude reprochée est simple. FBL a produit de fausses attestations de formation et de fausses feuilles de présence pour se faire payer les frais de formation. Au début de l'enquête, le PDG de FBL, Jean Bousige, a admis que la formation dispensée par Distri Conseil pouvait être qualifiée de «bidon» ou de «virtuelle»." La Cour d'appel de Lyon n'est pas tendre avec Abdi, dénonçant "son implication de tous les instants dans ce mécanisme d'escroquerie, en parfaite connaissance de cause et sans état d'âme" et faisant observer qu'il était "particulièrement aisé d'abuser de jeunes en situation de difficultés".

fadela_amara1La secrétaire d'Etat à la politique de la ville a refusé de commenter la condamnation de son proche collaborateur. On comprend qu'elle soit gênée aux entournures : puisque le verdict de la Cour d'appel est tombé en mai dernier, elle était pertinemment au courant de la casserole que traînait derrière lui Abdi, ce qui ne l'a pas empêché de le nommer conseiller spécial. Bravo Fadela Amara ! Un escroc au coeur d'un cabinet ministériel ? On ne doit décidément plus s'étonner de rien en Sarkozie.