Furtif conseil préliminaire aux auxiliaires de justice dont le(s) client(s) s’inquièteraient de cet article « sportif » : bien consulter vos Dalloz, se renseigner sur l’auteur, le site, &c… Au fait, vous connaissez la différence entre la presse britannique et la française ? Eh bien, nous allons vous l’écrire au prétexte de narrer comment un collant quasi miraculeux siglé Elle Sport, censé faire fondre la « culotte de cheval » de ces dames, n’a pu tenir ses promesses lorsque l’Advertising Standard Authority l’a soumis à des tests sérieux.   

Préambule. Le site français du magazine Elle comporte bien un espace « Elle Sports » mais il ne saurait être établi à ce stade que la marque Elle Sport (sans italiques pour « Elle ») puisse se réclamer de cet hebdomadaire. Ce en dépit d’une (très forte, très forte) apparente similitude entre les graphies du titre bien connu et le « ELLE » et le « Sport » ornant la ceinture des leggings (un fourreau taille et jambes, ou caleçon long) qui furent un temps commercialisés par le distributeur britannique Debenhams.

Il ne saurait donc en aucun cas être soutenu que Come4News ait le moins du monde tenté d’établir un amalgame avec un titre du groupe Lagardère (Hachette Filipacchi Médias), quel qu’il soit.

Voici moins de quatre mois, le site du quotidien The Daily Mail (ci-dessous Daily Mail ou Mail Online) publiait un rédactionnel.
Il mettait en avant les vertus des leggings SlimTech siglés Elle Sport, censées, grâce à sa composition textile augmentée (telle la réalité augmentée, peut-être) d’apports en algues rouges, en extraits de sophora japonica et de copaiba, &c., « accélérer la perte adipeuse » et « contribuer à réduire la cellulite » (traduction de mon cru, sans italiques, qu’il m’est permis devant des tribunaux, tout comme à mes témoins hautement qualifiés, d’estimer conforme à l’original en anglais). Je glisse sur les autres bénéfices qu’étaient présumés apporter le port régulier de ce fourreau).

La différence entre la presse britannique et la presse française, généralement, généralité pouvant être infirmée par de contre-exemples, est que la première, lorsqu’il s’agit d’une information présentant élogieusement un produit, considère aussi qu’une information et un démenti font deux informations. Je pose la question sans y répondre, car je ne voudrais pas encourir les foudres des syndicats patronaux de la presse française, hors produits médicaux (Mediator, implants PIP, &c.), constatez-vous très fréquemment, dans la presse française, qu’un tel article soit rapidement suivi d’un autre, cette fois fort peu « promotionnel » (guillemets de distanciation, ici), contredisant l’initial ? Je parle bien d’article, et non de publirédactionnel… Par exemple lorsqu’il s’agit de cosmétiques ou de produits pouvant y être assimilés, de cures, de régimes minceur, d’aliments ou préparations alimentaires…

Là, à encombrement (nombre de feuillets, illustrations) sensiblement égaux, Mail Online, après avoir fait récemment état du produit, rend compte des tests menés par le « gendarme de la publicité » (voir remarque supra), l’ads watchdog, à savoir l’Advertising Standards Authority (dont les prérogatives recouvrent celles de l’Arpp, ex-BVP, mais sont notoirement plus étendues ; on pourra comparer les sites du Jury de déontologie publicitaire et de l’ASA). Au passage, prenez donc connaissance de l’avis de l’ASA sur les produits de la mer Morte censés réduire les rides : toute coïncidence avec d’autres produits similaires serait bien sûr totalement fortuite.

Selon le fabriquant du collant siglé Elle Sport, et le site de vente en ligne Debenhams, le collant était censé diffuser des « microcapsules » de produits « actifs » qui peuvent avoir effectivement être diffusés sans, selon les tests de l’ASA, produire les effets escomptés. Quelques résultats positifs très légers ont certes été constatés, mais qu’il semblait difficile d’attribuer au collant par lui-même.

Debenhams a suivi les recommandations de l’ASA et si le produit est toujours mentionné, il est devenu indisponible à la vente. Le distributeur avait établi les publicités et les informations figurant sur son site en tenant compte des éléments transmis par son fournisseur faisant état de tests menés par une tierce partie indépendante estimée fiable. Dans un premier temps, le produit fut signalé en rupture de stock ; dans un second, la page s’y référant n’est pas disponible.
Il aurait été certes plus judicieux que l’ASA contraigne Debenhams a faire état de son avis, mais, la presse s’en est chargée… Enfin, l’anglophone (dont l’asiatique).

Mais, mais, mais, le précédent article du Daily Mail restait ce jour encore en ligne (« Lazy girl leggings: £45 “wonder” pants claim to burn fat and whittle waists by 4cm just by wearing them », par Deni Kirkova, daté du 27 décembre 2012, celui de ce jour, démentant, étant signé de Sean Poulter, les deux ayant été accédés ce jour). On continue donc de penser que Catherine Tyldesley, de Coronation Street, utilise encore régulièrement le Slim-Tech Elle Sport (on ne voit pas trop pourquoi elle avait besoin de perdre 4 cm de tour de taille et 2,6 cm sur les hanches, mais bon… cela devait être préventif).
Mais, mais, mais, de multiples sites de par le monde continuent de commercialiser le produit prétendument miraculeux.

Je ne doute guère de retrouver, par exemple, dans Adevarul ou Agenda (.ro), un tel produit copieusement vanté. Avant que – peut-être – ces mêmes titres ou sites ne publient un article rectificatif.

Deux moments sont propices pour lancer de tels produits : les lendemains des fêtes de fin d’année, l’approche des beaux jours ou de l’été.

Là, le produit, et ses microcapsules présumées résister à trente lavages, est plutôt « malin ». Si, au bout d’une douzaine de lavages, l’effet escompté ne s’était pas produit, on pourrait être tenté d’en acheter un autre. Possiblement, par exemple, en se fondant sur les « avis d’utilisatrices » que le site du distributeur escomptait recueillir (et qui les valide, au fait ?).

Les derniers sites en date vantant le produit sont losebellyfatcenter (.com) voici moins de 24 heures, et shopperbase (.com), le 9 avril dernier. Mais il en est bien d’autres.

The Guardian a recueilli quelques commentaires du style « comme d’habitude, le mal est déjà fait » ou « porter du noir vous fait paraître plus mince » et même « peut-être fallait-il les manger ? ». Mais non seulement les consommatrices (ou consommateurs, car des hommes achètent de tels produits) ont été nombreuses à faire l’acquisition du collant mais, du fait que d’autres sites continueront à le recommander, ou que le distributeur fourgue son stock, d’autres pourraient suivre.

Suzi Dixon, du Telegraph, qui semble avoir reçu le produit seulement fin février dernier, concluait qu’elle ne l’avait pas déjà porté huit heures quotidiennement pendant une semaine, et que, par conséquent, elle ne pouvait se prononcer sur l’efficacité. « But they look FANTASTIC » (elle ne précisait pas qu’assorti à un petit top, il révèle l’inscription Elle Sport qui fait peut-être toute la différence). 

Ne lisant pas le flamand, je ne sais ce que Julie Vandormael pouvait bien écrire mais « magische » ne m’a pas échappé sur le site Stylefever (.be). Ni ce qu’en disait en cyrillique medikforum (.ru).

Ah, oui au fait, quand même… Que lit-on à présent sur le site de Debenhams, en tête de la rubrique des vêtements de sports pour femmes ? “Celebrate Spring with 15% off in association with the Daily Mail. Click here for more info.” Pas rancunier, Debenhams.

N’empêche. Tout un pan de l’analyse comparative des médias gagnerait à se livrer à d’utiles comparaisons. Juste un dernier truc : vous en avez très fort entendu parler, vous, dans la presse française, après le scandale de la viande de cheval, des viandes avariées de Castel Viandes, de l’affaire de remballe de barquettes de viande au Super U de Langeac ? Les étiquettes étaient actualisées. Le parquet du Puy-en-Velay est saisi. Gageons qu’il se hâtera et que, après ces quinze derniers jours de silence, il se manifestera avec force. D’ailleurs, c’est simple, quid à présent de Castel Viandes, de la plainte contre X de l’association de consommateurs CLCV. L’association « espère que la procédure ne s’éternisera pas ». Cela ne fait que deux semaines, restons confiants.