En Algérie, le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs rétribue environ 50 000 fonctionnaires, dont 30 000 sont des imams dont le salaire des prédicateurs oscille entre 18 000 et 40 000 dinars (entre 180 et 400 euros), la plupart plafonnant à 200 euros. Ils veulent une revalorisation de leurs émoluments et pourront désormais le faire valoir collectivement en se formant en syndicats. Mais pour le moment, la première formation autorisée est de rite malékite, prédominant en Algérie, et semble surtout ne pas vouloir partager le gâteau.

Pour le secrétaire général de la première formation syndicale religieuse algérienne, un cheikh, imam lui-même, l’un des objectifs de son organisation consistera à « défendre les droits matériels et moraux des imams et de dresser un rempart contre les idées importées, salafiste ou autres. », rapportent l’AFP et Jeune Afrique.
Comprenez à regrouper les imams malékites afin de contrer la concurrence, salafiste, wahabite ou chiite. Cette formation s’est affiliée à l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et on peut se demander si d’autres parviendront à trouver un point de chute. 

Le ministre, Bouabdellah Ghlamallah, a aussi indiqué que les imams pourront briguer des mandats politiques à condition de ne pas prêcher pendant leur campagne électorale ou au cours de leur mandat électif.

La Coordination nationale des imams (CNI), malékite, dirigée par cheikh Hadjimi, annonce d’emblée qu’elle va « défendre notre Islam, loin de toute idéologique politique ou courant de pensée venu d’ailleurs. Nous devons retrouver nos pratiques religieuses ancestrales, celles de nos parents et de nos grands parents ».

On espère qu’il s’agit du même islam que celui de la famille d’Ismaël Kandé, 18 mois, fils de Sinaly et Abiba, dont, signale Seneweb, le ventre s’orne depuis sa naissance de versets du coran. Ils changent épisodiquement, et depuis la fin février dernier, les imams de Côte d’Ivoire ont reconnu le phénomène en le constatant à Treichville (quartier d’Abidjan). L’enfant, originaire de Ouédallah (proche de Tiénigoué, du Mankono, région de Béré, au sud de Bouaké), voit spontanément des versets coraniques apparaître sur son corps. On en lave un (est-il bien permis d’en laver ?) qu’il s’en présente un autre. La presse d’Afrique sub-sahélienne a largement fait état du phénomène qui mérite bien que la Coordination nationale des imams algériens se prononce à son tour.

Un autre imam syndiqué algérien a estimé qu’il fallait « rester ouverts sur la société et sur le monde extérieur sans qu’ils ne soient influencés par les courants de pensées et les idéologies qui se répandent partout dans le monde musulman et qui visent à avilir notre population pour qu’elle soit à la merci de puissances extérieures qui ne veulent pas forcément du bien pour notre pays ». Ismaël Kandé sera-t-il considéré « puissance extérieure » en dépit de son très jeune âge ? Ou va-t-il représenter ce « monde extérieur » auquel il convient de se rallier après un tel miracle ?

Déjà en 2007, puis 2010, enfin en juin 2012, le ministre, âgé à présent de 78 ans, ce qui témoigne d’une belle longévité personnelle et ministérielle, appelait de ses vœux une syndicalisation des imams, remémore Les Dernières Nouvelles d’Algérie. C’est chose faite, mais cela ne semble pas tout à fait complaire à tous les imams de tous rites. Imaginez une grève des muezzins, qu’aurait souhaité Hubert Bonisseur de la Bath (dit 0SS117) au Caire, rompue par d’autres, tentant de couvrir les appels à la prière par d’autres, à se joindre au mouvement ?

La coordination CNI appelle déjà le gouvernement et le ministre à remplacer les imams ne lui plaisant pas dans les mosquées où ils s’expriment. Va se poser aussi la question des wakfs, ou biens religieux, qui sont pour la plupart des logements de fonction des imams (attribués gratuitement ou à loyers modiques, de l’ordre de 600 dinars). Des expulsions de mal-pensants sont-ils à redouter ?

La rétribution des imams était bloquée depuis 2008. Celle de nombreuses Algériennes, d’un grand nombre d’Algériens, l’est depuis beaucoup plus longtemps, s’ils ont pu préserver leur emploi. C’est aussi le souci des Tunisiens, dont le pays est doté d’un syndicat d’imams, qui avait réclamé, en novembre dernier, la démission du ministre Nourredine Khademi, et s’opposait au pouvoir d’Ennhadah, parti trop prompt à favoriser les concurrents salafistes et à les implanter dans les quelque 5 500 mosquées du pays. Le syndicat tunisien est affilié à la centrale UGTT, qui n’est pas toujours complaisante à l’endroit du gouvernement.

On peut voir tout cela, de France, avec une certaine dose d’ironie, mais, que l’on sache, le pape François, fortement ici salué pour sa simplicité, n’a pas encore annoncé que le Vatican reconnaitrait des syndicats de prêtres ou curés.