Peut-être avez-vous lu le livre de Jean-Claude Carrière intitulé « Mon Chèque ». Dans ce roman, largement inspiré de sa vie, le scénariste français narre les mésaventures d’un double fictif qui doit se battre pour être payé et toucher son chèque.
Ce livre sorti en 2010 est toujours d’actualité, si on en croit les récentes déclarations du fondateur de la société de distribution de films Wild Bunch, Vincent Maraval. Dans un article paru dans le Monde, Vincent Maraval explique les différences astronomiques entre les salaires que touchent les acteurs, les réalisateurs, et les autres. Dans cette belle grande famille du cinéma français, le scénariste est le parent pauvre, voire très pauvre.
Il faut dire que certains comédiens sont tellement bien payés qu’ils peuvent se permettre de prendre des vacances prolongées en Mordovie. Il faut bien découvrir les trésors cachées de la Russie et ses fameux camps de prisonniers… Bref.
A moins d’être scénariste et réalisateur, les scénaristes sont les grands inconnus du grand public. Le travail des scénaristes n’est pas vraiment reconnu en France. Comme dans le roman de Jean-Claude Carrière, le simple fait d’être rémunéré relève du parcours du combattant, surtout pour les scénaristes de télévision. En effet, c’est seulement après acceptation qu’ils sont payés. Les motifs de cette acceptation sont flous. On ne sait pas vraiment qui la définit et comment. Payer un scénariste de télévision c’est comme se refiler une patate chaude entre un diffuseur et un producteur.
Le pire qui puisse arrivé c’est après avoir fourni tous les efforts nécessaires, au final, votre projet vous est retiré pour des raisons encore plus floues. Un autre scénariste est embauché pour réécrire l’histoire qui est pourtant sortie de votre cerveau ! Vous n’avez aucun crédit. Si la structure de départ n’est pas utilisée, vous n’êtes pas payé. Il n’y a pas de place pour l’amertume. Il vaut mieux avoir plusieurs projets sous le coude, et la plupart des projets sont des projets de commande.
Se faire payer après acceptation peut être traumatisant pour les jeunes scénaristes qui n’ont aucune idée de la façon dont la rémunération est attribuée. Ensuite, il faudra faire le deuil de ses aspirations littéraires. Un scénario n’est pas une œuvre de littérature. Il faut être prêt à le changer parfois intégralement dans des délais très brefs, selon les caprices de tout le monde et n’importe qui. Votre scénario ne vous appartient pas.