Dans la polémique qui oppose le gouvernement, diverses collectivités territoriales, aux détracteurs du projet d’aéroport nantais Notre-Dame-des-Landes, les considérations écologiques l’emportent souvent sur les perspectives économiques. Mais les résultats de fréquentation de l’aéroport d’Alicante-Elche, dit El Altet (ALC) devraient faire réfléchir les décideurs.

Le projet du futur aéroport du Grand Ouest, à Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes, a tout pour plaire sur le papier d’un point de vue économique. Certes, mais on en promettait autant pour celui d’Alicante-Elche, El Altet, inauguré en 1967 et constamment agrandi.
El Altet est un ensemble impressionnant, avec trois terminaux (le premier en 1967, le second en 2007 et le troisième et dernier en mars 2011). Mais il paraît parfois bien vide et les espaces pour les boutiques du dernier terminal attendaient toujours, à l’été 2012, leurs locataires. Les 26 portes d’embarquement ou débarquement de passagers au total, la superficie de 334 000 mètres carrés du T3 s’ajoutant au 54 800 des T1 et T2 en font l’un des plus importants aéroports européens.

Du fait des nombreux résidents britanniques, allemands et néerlandais ayant acquis ou fait construire dans la région, Ryanair en a fait une destination fréquemment desservie. Mais de nombreuses compagnies à bas coût (dont EasyJet ou Vueling, Air Berlin) transportent aussi nombre de touristes attirés par les côtes toutes proches et les villes historiques andalouses au sud. 

Cependant, après une période de croissance continue (sauf en 2009), El Atet voit sa fréquentation en chute de 4,3 % d’une année sur l’autre (chiffres novembre 2011-2012, après une chute de 6,8 % en octobre). Le nombre total des vols a régressé de 8,1 % (pour un total de 3 880 opérations d’atterrissage ou décollage). Ce recul n’est pas dû à une régression de la fréquentation internationale (+5,9 %, même si les Britanniques sont 2,2 % de moins), qui est constituée surtout d’Allemands, Néerlandais, Norvégiens (et autres Scandinaves dans une moindre mesure), attirés par le climat, les plages, &c.

Mais ce sont essentiellement les compagnies à bas coût qui assurent la rentabilité de l’équipement. Elles ont capté les trois-quarts du tourisme étranger. Or, Nantes n’est pas tout à fait Alicante, même si la Bretagne, la Vendée et l’Anjou sont des destinations attrayantes d’un point de vue touristique… de visite plus que de séjour ou d’implantation (de retraités, notamment).

La région d’Alicante se caractérise par une multitudes de « La Baule » et d’autres stations résidentielles de moindre importance et une impressionnante quantité de golfs, parcs de loisirs, &c. Du fait de la crise, les Espagnols y séjournent moins fréquemment, les Britanniques aussi, quand ils ne cherchent pas à vendre leurs résidences. Seront-ils vraiment replacés par des Russes ou des Scandinaves ?
La région tend à développer des formes d’écotourisme visant à diversifier la fréquentation.

Annuellement, les aéroports espagnols ont vu leur fréquentation baisser de près de 10 %. À la crise intérieure s’ajoute celle des pays hors Europe du Nord. Si elle devait durer (et elle semble devoir durer), le tassement de fréquentation des aéroports devrait suivre en conséquence. Il serait étonnant que l’aéroport du Grand Ouest ouvre, en 2017, dans les meilleures conditions de fréquentation, conformément aux projections actuelles.

Autre similitude entre N.-D.-des-Landes avec l’aéroport d’Alicante : le faible niveau de desserte par les transports en commun. Lequel pourrait handicaper les débuts du futur aéroport nantais. Pour celui d’Alicante, il est enfin prévu d’envisager une desserte ferroviaire.