Décidément, les appellations des Grands vins de France n’en finissent pas de nourrir la rubrique des faits divers. Dommage, que la modération ne soit pas ici de mise.

 Depuis quelques mois, on découvre des actualités étonnantes sur le vin, alors que les trouvailles de petits vins sympathiques se font de plus en plus rares. On se souvient de la polémique, déclenchée lors de la création d’une nouvelle appellation  bourguignonne il y a quelques mois. Plus récemment encore, la vente d’un vignoble bourguignon à un homme d’affaires étranger déclenchait les réactions hostiles de toute une région, et on entendait ici ou là des prédictions alarmistes, nous mettant en garde contre la disparition d’une partie de notre patrimoine. On était alors en droit de s’interroger sur la gestion du domaine des Vins de Bourgogne, tout en se réjouissant que l’illustre Bordelais se tienne bien à l’écart de ces mésaventures et de ces errements. Seulement, c’est en catimini, que l’Institut National de l’origine et de la qualité (I.N.A.O.) a rendu une décision pour le moins étonnante ce 6 septembre 2012.

 

 Le Saint Emilion, un vin d’exception

Un petit peu d’histoire avant de commenter cette décision. Après la seconde guerre mondiale, les villes d’Aquitaine ne furent pas les seules victimes des bombardements et des  dégâts directs (ou indirects) de ce conflit majeur. Le vignoble aussi était atteint, et ce fut particulièrement vrai pour le vignoble de Saint Emilion. C’est pourquoi, pour relancer le marché, les vignerons se mirent d’accord et pour accéder à l’excellence, il fut décidé d’établir un classement renouvelable tous les dix ans. Le premier fut proclamé en 1955, et depuis les vignerons mais aussi les consommateurs attendent cette reconnaissance de ses premiers grands crus classés A ou B ou encore des fameux Grands crus classés. L’enjeu est de taille, lorsque l’on sait, par exemple, qu’une bouteille d’un des grands Crus classés, en l’occurrence Cheval-Blanc, se négocie autour de 400 € la bouteille pour la récolte 2010, et de 1.000 € pour ce qui concerne 2009.

 

 Un classement arrangé ou une véritable sélection


 L’histoire de la décision, rendue la semaine passée, a commencé en 2006, lorsque le classement a fait état du déclassement de 13 châteaux. On aurait pu alors croire, que l’exigence de qualité avait primé. Seulement, les vignerons ne l’ont pas entendu de cette oreille. Les châteaux déclassés avaient ainsi espéré des rentrées financières substantielles, et réalisé des investissements à la hauteur de leur statut. Aussitôt, la justice fut saisie, et en 2008, le tribunal administratif de Bordeaux annula alors le classement de 2006, remettant celui de 1996 au goût du jour. Le scandale était déjà sous-jacent. Car, on peut lire les tenants et aboutissants de chacun, mais la qualité du vin n’était alors plus prise en compte. Encore une histoire de gros sous.

 

Il était donc acté, que l’INAO devait proclamer le nouveau classement ce jeudi 06 septembre 2012. Bien entendu, ne voulant plus connaître pareille mésaventure, les règlements ont été revus, et désormais le barème de notation tient compte de multiples critères. Pour ne plus être aussi sévère, l’INAO a même organisé des séances de « rattrapage » pour les châteaux ne présentant pas des notes satisfaisantes. Le résultat est époustouflant, puisque 82 crus ont été reconnus dont 18 au titre des Grands Crus Classés. Je vous laisse imaginer les raisons, ayant poussé la commission à se déjuger. J’entends déjà les vignerons bordelais nous expliquer, que leur effort sur la qualité des produits est enfin récompensé. Mais, soyons honnête, de deux choses l’une : ou alors la commission de 2006 était totalement incompétente (et je vous avoue avoir beaucoup de mal à y croire, ou bien, le classement de 2012 est….A vous de compléter par les surnoms de votre choix, et pour une fois ce sera sans modération.