Avant de vous livrer mon témoignage,  un rappel succinct de la définition des soins palliatifs, et du mot euthanasie s’impose !

La loi Léonetti votée en 2005, nous dit (en gros) :

« Les soins palliatifs ont pour mission de soulager la douleur afin d’améliorer la qualité de fin de vie des patients par une prise en charge pluridisciplinaire. »

Elle dit aussi :

« Ils ont pour objet une vaste prise en charge de la personne malade, tant sur un plan médical, en soulageant les douleurs ou toute source d’inconfort, en préservant la dignité de la personne, dans l’accompagnement des difficultés psychologiques, du malade et de sa famille. Les autres aspects, notamment religieux, spirituels, ou mêmes sociaux, sont pris en compte. Les proches sont aussi accompagnés dans leur processus de deuil. »

Ces belles paroles sont loin d’être respectées, ou plutôt, sont loin d’être personnalisées selon le malade en « fin de vie ».  (j’en reparlerai dans le témoignage qui suit…)

Au mot Euthanasie, qui rappelle de mauvais souvenirs, ses détracteurs préfèrent employer  le vocable « suicide assisté », (en toute hypocrisie bien sûr).

Le journal Libération nous en donne une définition assez vague, mais que j’ai trouvé plus « humaine » que celle du dictionnaire.

Je ne retiendrai dans le cas qui me préoccupe que la première et la  dernière phrase :

« L’euthanasie est un mot fourre-tout. Formellement, selon le Petit

Robert, il s’agit d’une «mort douce et sans souffrance, survenant naturellement ou grâce à l’emploi de substances calmantes ou stupéfiantes».

Mais dans le langage courant, l’euthanasie est perçue plutôt comme «un usage des procédés qui permettent de hâter ou de provoquer la mort pour délivrer un malade incurable de souffrances extrêmes, ou pour tout motif d’ordre éthique».

Pour schématiser, on aurait tendance à distinguer l’euthanasie passive qui correspondrait à ce que les médecins appellent «l’arrêt ou la limitation de traitements», associé à l’emploi de médicaments pour éviter que la personne souffre. Et l’euthanasie active qui consiste en un geste actif du médecin (une injection par exemple), entraînant la mort à très court terme. »

 

Ces derniers jours, François Hollande, a enfin parlé de ce thème  qui figurait dans son programme présidentiel !

C’est avec moultes précautions, et en « retenant son souffle », que le Président de la République a annoncé la création d’une commission qui allait se pencher sur l’amélioration et la multiplication  des services de soins palliatifs, dans les hôpitaux et cliniques.

Pas une seule fois le mot euthanasie n’a été prononcé, et pourtant, tout comme nos voisins belges, et hollandais, il semblerait que l’on commence  enfin  à écouter la « supplique » de l’injection létale du malade en fin de vie.

 

Témoignage :

 

C’est l’histoire d’un proche, auquel on a découvert, après un scanner suivi d’une échographie, un cancer généralisé foudroyant, puisque rien, ou presque, ne laissait présager un tel diagnostic.

La famille fut avertie de l’incurabilité de la maladie, et de l’impossibilité de mettre en route un traitement quel qu’il soit, puisque tous les organes vitaux étaient « métastasés ».

Pas un mot au malade, que l’on a immédiatement hospitalisé, en lui laissant croire que des examens complémentaires étaient nécessaires.

Une semaine après, les doses de cortisone employées en perfusion pour  réduire la progression des cellules cancéreuses,  n’étaient plus suffisantes.

Les premières douleurs se faisaient sentir, et le malade attendait vainement le commencement d’une thérapie.

Après un conseil de famille restreint, à la clinique, nous avons fait venir le médecin responsable des soins palliatifs.

 

Et là, le calvaire a commencé !

 

Il a fallu dire (enfin) au malade qu’aucun traitement n’était envisageable vu l’ampleur du « mal ».

La brutalité avec laquelle cette annonce a été faite laissait présager ce qui allait suivre…

Je ne vous parlerai pas du formulaire de 2 pages, où la famille ET le malade après lecture, acceptaient par une simple signature, de partir en soins palliatifs.

Cette formalité où mille précautions engageaient le malade et sa famille, à ne pas intervenir dans le choix du traitement anti-douleur proposé, nous a donné à tous l’impression d’une condamnation à mort (lente).

Ne pas souffrir, et mourir vite, très vite, furent les souhaits de celui qui allait monter au dernier étage de l’établissement, situé en continu  du service d’oncologie.

A partir de ce moment, et pendant les 6 semaines qui ont suivi, ce proche, conscient, qui donnait encore des ordres à transmettre, des papiers à remplir et à envoyer, et signalait l’endroit où se trouvaient les documents importants dont la famille aurait besoin après sa mort, n’a cessé de réclamer l’injection létale.

Ce malade, en fin de vie, qui avait  fait venir son notaire juste  avant de signer ce qui allait devenir  sa longue, très longue déchéance., n’avait en tête qu’un seul désir : s’éteindre dignement et surtout rapidement.

Ce ne fut pas le cas.

Les soins palliatifs ayant pour principal objectif  de soulager toutes les douleurs physiques, par de savants cocktails, modifiés chaque jour par le médecin responsable du service.

Le service des soins palliatifs de la clinique X, est récent, les chambres sont vastes et claires et bien sûr individuelles.

Le personnel est d’une gentillesse exemplaire.

Infirmières et aides-soignantes sont à l’écoute du malade, et font preuve d’une patience sans bornes.

MAIS, que dire du passage quotidien du médecin, qui imposait au malade, de se souvenir des moments heureux passés en famille ou entre amis.

Que dire de ce médecin qui parlait de « l’eau delà », et qui, malgré le refus du patient faisait écouter de la musique classique, alors que celui ci  pleurait les yeux fermés à l’écoute de ses morceaux préférés.

Que dire devant l’insistance du praticien, qui répétait sans cesse, c’est le moment de dire à vos proches que vous les aimez, et que vous les retrouverez un jour dans un autre monde.

Comment peut-on tenir le même langage, à tous les occupants de ces 8 chambres.

Heureux ceux qui ont la foi !!

Les autres, n’acceptent pas de végéter jusqu’à la minute fatale.

Calvaire pour le malade, calvaire, pour la famille proche qui ne peut accéder aux désirs de celui qui veut mourir dignement.

 

Les êtres humains ont tous une personnalité, et on n’applique pas la même méthode à chaque malade, comme cela se fait dans ce service, pourtant ultra moderne  avec un personnel qualifié, certes, mais qui n’est plus , ou ne veut pas être à l’écoute de la demande du malade en fin de vie.

 

Alors OUI, Monsieur le Président de la République, penchez vous sur ce sujet récurent d’un être humain se sachant « condamné » par la maladie, et trouvez très vite une solution éthique, pour permettre à ceux qui le désirent de mourir dans la dignité, et cela quand ils l’auront décidé.

Que vous l’appeliez euthanasie ou suicide assisté, le terme importe peu.

Mais ne soyez pas insensible à tous ceux qui désirent garder leur intégrité, morale et physique, sachant que la fin de leur vie est imminente.

 

Cessons l’hypocrisie qui consiste à dire que la peine de mort est abolie en France.

Ici nous n’avons pas un condamné qui a fauté, mais une personne physique et morale qui se sait condamnée, non pas, par la justice des hommes, mais par l’inéluctable sort qui nous attend TOUS un jour ou l’autre.

 

Cessons de mettre en exergue ce commandement judéo-chrétien qui dit : « Tu ne tueras point ».

N’imposons pas ce calvaire à celui qui demande à mourir, et pensez à sa famille qui l’entend inlassablement  répéter : « que c’est long de mourir », en regardant sa montre toutes les heures. »

Chaque individu est unique, respectons le, respectons ses dernières volontés jusqu’à son dernier souffle.

L’acharnement thérapeutique s’applique également aux soins palliatifs, quoi que l’on en dise.

 

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