Dexia & Co : les retraites du secteur public menacées

Pour l’armée, ce fut un logiciel de gestion des soldes qui avait retardé les versements aux militaires. Pour l’ensemble des fonctionnaires, dont les retraites ne sont pas comptabilisées dans la dette publique, ce sont les marchés financiers en général qui décideront du versement des pensions. Mais pour le reste du secteur public, les banques françaises renâclent déjà : elles ne prêtent plus aux collectivités (hospitalières, par exemple) ou aux grandes entreprises semi-publiques (SNCF). En conséquence, les retraités risquent de devoir attendre.

Brièvement en tête de la page d’accueil du Figaro, assortie d’une large photo, la nouvelle a été rapidement rétrogradée et republiée sans visuel : « La crise bancaire rattrape le secteur public ». Un exemple : « le 30 décembre dernier, les retraités du rail n’ont reçu qu’un tiers de leur pension trimestrielle. ».
Hier soir, la communauté financière bruissait au sujet d’un nouveau plan gouvernemental destiné à restructurer autrement la franco-belge Dexia. Un démenti du ministère des Finances, le refus de Dexia de s’exprimer, ont escamoté la rumeur. Mais la question est cruciale pour les collectivités territoriales et notamment les hôpitaux. Dexia ne prête plus du tout sur le court terme depuis deux semaines. Les salaires des hospitaliers ont été versés, mais les gestionnaires vont devoir jongler avec les primes, des reports de dépenses, &c. En fait, selon Les Échos, la nationalisation de Dexia Crédit Local (DCL) serait bien a l’étude. Banque Postale et Caisse des dépôts ne trouvent pas le crédit suffisant pour prendre Dexia en charge.

Le manque de liquidités pourrait inciter les collectivités et entreprises publiques à trouver des recettes nouvelles (ou augmenter la ponction des existantes). Pour la SNCF, selon Le Figaro, ce serait le Crédit agricole qui a réduit sa ligne de crédit.
Les retraités d’EDF ou GDF, qui bénéficient encore de régimes spéciaux, risquent aussi d’attendre le versement de leurs trimestres…

Mais ce seront aussi les investissements envisagés qui seront touchés. Les banques françaises ont emprunté (à 0,1 %) auprès de la BCE. Elles étaient censées d’une part acheter de la dette d’État (ce qui fut fait en partie hier), d’autre part se prêter entre elles, et favoriser les investissements. Elles le font très parcimonieusement, préférant placer leurs fonds à très court terme auprès de la BCE, qui ne leur reverse dans ce cas qu’un intérêt d’un quart de point. Les banques européennes ont placé 455 milliards d’euros auprès de la BCE.

Pourtant, selon Christian Noyer, en visite à Frankfort, l’action de la BCE porterait ses fruits. Dormez, bonnes gens, dit en substance le gouverneur de la Banque de France. Effectivement, l’emprunt français souverain a été souscrit. Mais à un taux de 3,28 % contre 3,19 % en décembre. Un taux noté de fait AAA, même s’il dénote un écart croissant avec les taux des emprunts allemands. Tout va très bien, mais la hausse du taux versé aux détenteurs d’un livret A, prévue en février, ne se justifierait plus car, paraîtrait-il à Christian Noyer, l’inflation hors tabac serait contenue. Ah bon, et pourtant, les hausses de TVA et l’introduction de la TVA sociale ne seront donc pas répercutées sur les consommateurs ?

Nous le disions encore hier, la Grèce (mais aussi d’autres pays) pourrait être contrainte de quitter la zone euro. Non, non, non, nous assurent Christine Lagarde et nombre de ministres européens. Peut-être. Car en fait, Lagarde s’est bien préservée d’assurer formellement que la Grèce resterait dans la zone euro. Car déjà, en Grande-Bretagne, des établissements financiers se refusent à proposer des placements en zone euro aux particuliers : on ne sait jamais. Trop risqué. L’italienne UniCredit a lancé un avertissement aux investisseurs : le démantèlement de la zone euro est un risque qui ne peut être totalement écarté. Son augmentation de capital se fait au prix d’une décote de 43 % de ses actions. La plupart des valeurs bancaires fléchissent, à peu près partout.

Les actifs et les retraités dépenseront moins, leur épargne sera moins rémunérée, et les banques les ponctionneront davantage pour amortir leurs pertes en cas de sortie de l’Euzone d’un ou de divers pays où elles sont engagées. Certes, selon la Fédération bancaire française, les services des banques ne représentent que 0,66 % des dépenses annuelles des particuliers. Moins d’un pour cent selon la police, beaucoup plus selon les manifestants alors que les groupes bancaires doivent en priorité à présent faire croître le profit de leurs agences. Attendez-vous à devoir payer vos relevés de compte imprimés, c’est déjà le cas aux États-Unis.

Les banques ont financé les États au-delà du raisonnable, se disant que le contribuable finira par payer. De même que ce sont les épargnants ou tout simplement les titulaires de comptes courants qui finissent par payer pour les surendettés, ce sont en fait tous les contribuables européens qui sont devenus surendettés. Les seuls susceptibles d’y trouver un bénéfice seront peut-être les locataires et les accédants à la propriété, car les prix de l’immobilier finiront par stagner, puis fléchir… À condition de ne pas se retrouver à découvert pour payer son loyer ou devoir emprunter plus cher. Car les banques, elles, ne veulent rien lâcher.

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

2 réflexions sur « Dexia & Co : les retraites du secteur public menacées »

  1. Bonjour,
    1 étoile
    En complément d’info je me permets de faire de la pub: ;D
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