Au départ, la vision des pères fondateurs de la défunte Organisation de l’Unité Africaine (OUA) était de mettre sur pied et à court terme les Etats Unis d’Afrique. Conscients des difficultés qui jonchaient ce parcours à la fois délicat et périlleux, ils ont tout d’abord opté pour une intégration à l’échelle sous-régionale. C’est ainsi que le continent Africain a été divisé en quatre grands  ensembles économiques : l’Afrique de l’Est et australe au sein de la SADEC, la CEEAC ou la CEMAC pour l’Afrique centrale, la CEDEAO pour l’Afrique de l’ouest et l’UMA pour le Maghreb.

Pour atteindre leurs objectifs, chacune de ces organisations sous-régionales devrait créer des mécanismes pour assurer une véritable intégration au sein de son espace. Une intégration qui devrait quant à elle se traduire par la suppression des barrières douanières, l’usage d’une même monnaie, la libre circulation des biens et des personnes…

Près de quarante ans après leur mise sur pied, les résultats sont plus ou moins satisfaisants, selon qu’il s’agit de telle ou de telle sous-région. Cependant,  de toutes ces organisations, la zone Cemac est celle qui accuse encore un retard inquiétant au niveau de l’intégration des populations. Car au sein des  autres sous-régions et particulièrement en Afrique de l’ouest, la libre circulation s’est rendue effective depuis plusieurs années maintenant. Ainsi, un Malien qui désire se rendre au Sénégal ou en Côte d’Ivoire n’a pas besoin du visa pour le faire…

En Afrique centrale, la situation est tout à fait le contraire  et s’aggrave même de jour en  jour. Les camerounais sont expulsés presque quotidiennement de la Guinée Equatoriale et du Gabon ; tandis que les centrafricains et les tchadiens subissent quant à eux chaque jour  au Cameroun moult  attaques xénophobes. Plus loin, plusieurs camerounais se sont vu refuser les visas d’entrée au Gabon et en Guinée Equatoriale durant la dernière Coupe d’ Afrique des Nations de football qu’ils ont organisé en janvier 2012.

Par ailleurs, jusqu’ici, cette « guerre » de leadership ne se déroulait qu’entre le Gabon, la Guinée Equatoriale et la Cameroun, les puissances économiques de la région. Il a donc fallu attendre la semaine dernière pour que la république centrafricaine, dernière économie de la région, sorte aussi de son silence, pour démontrer elle-aussi sa puissance à son voisin camerounais, en expulsant de son territoire un haut fonctionnaire Camerounais en service là-bas.

En effet, de retour d’Addis-Abeba où il prenait part à une réunion continentale, Antoine Ntsimi, président de la commission de la CEMAC et originaire du Cameroun a été expulsé de force en début de semaine dernière de la Centrafrique où il est en fonction depuis quelques années déjà. Selon des indiscrétions, la présidence de la République centrafricaine lui reprocherait son « incompétence » et son inertie.  

Depuis quelques jours, l’affaire fait les shows gras de la presse camerounaise. Notamment du quotidien public Cameroon Tribune,  qui en a fait presqu’une affaire personnelle. Au cours d’une conférence de presse organisée tout récemment, les autorités camerounaises ont condamné cette attitude irresponsable de la Centrafrique, avant d’indiquer que tout sera mis en œuvre afin que la lumière soit faite sur cette affaire. Cependant, du côté de la Centrafrique,  c’est un silence plat et quelque peu méprisant, même si les autorités de ce pays ne réfutent pas pour au tant les faits. Avec cet  autre acte xénophobie au sommet de deux « pays frères et amis », on comprend sans trop de peine que le chemin est encore très long pour l’Afrique Centrale.