Tribune libre car je ne sais trop où placer ce billet. Voilà, je suis très embêté : je viens de recevoir coup sur coup trois bouquins, l’un de Cabu, l’autre d’Étienne Liebig, et le troisième de Charles Duchêne. Histoire et de procrastiner et de ne pas trop vexer l’un ou l’autre, je choisis de vous parler de tout autre chose. Soit des procédés employés pour retoquer une opinion et son émetteur. Le titre est fallacieux : ces « méthodes » sont aussi vieilles que les babillards sur l’Internet première génération, et même que la rhétorique gréco-romaine.

J’ai la flemme d’aller me plonger dans un dictionnaire des figures de style. Néologisons plutôt (deux fois qu’une, car « néologisons » est un quasi-néologisme). Mais d’abord, les faits…
Tout d’abord l’un de mes articles faisant état d’un sondage de la Sofres (tendant à démontrer que Jean-Luc Mélenchon est perçu meilleur défenseur des « ouvriers », y compris par eux-mêmes, que Marine Le Pen). Ensuite un autre, sur la vente du Rafale aux Indiens, dans lequel je me contentais de faire état des réactions dans la presse anglaise.
Commentaire pour le premier : « vous avez tout faux, vos sondages sont bidon, et vous n’y faites même pas figurer Carl Lang… » (je cite de mémoire, donc, pas d’italiques). Dont acte, j’avais déjà évoqué ultérieurement Carl Lang (à présent à la droite du FN), j’ai oublié la piqure de rappel, et ce candidat ne figurait pas dans le sondage de la Sofrès. Qui puis-je ? Mais, évidemment, je raconte n’importe quoi et je me livre à de la désinformation, je suis nul de chez nul, et je devrais traiter de quelque chose en rapport avec mes compétences, comme par exemple de la prise de la smala d’Abd-El-Kader par les troupes du duc d’Aumale ou de la cueillette des olives en Provence.
Argument repris par deux spécialistes (peut-être autoproclamés) des appareils de combat des armées de l’air ou des ventes d’armes : je suis nul de chez nul, quasi-imposteur, à dégager. Mais qui puis-je vraiment si la presse britannique a bel et bien avancé des arguments (que je réfute au passage, mais pas assez fortement pour les commentateurs) ? Vendu, pourri, mauvais Français, imbécile heureux, ignare, dégage, casse-toi, &c.
Quel terme trouver pour ce genre de commentaire qui relève davantage du trollage (de « troll ») que d’autre chose ? Desqualificatio vétilleuse ? Le concours de néologisation est ouvert…
Disputatio absurt
Latin et russe pour le commentaire sous un article sur le même sondage. Lapsus de saisie, tout du long, j’ai confondu Force ouvrière (syndicat, FO) et Lutte ouvrière (formation politique, LO). Cela m’arrive de plus en plus : je saute aussi des mots, oublie parfois de consulter mes dictionnaires et orthographie de travers alors que, tout au long de ma carrière plus active (rémunérée), les sec’ de rédac’ me gratifiaient d’un parfait respect de l’orthotypographie, même quand je n’avais absolument pas le temps de me relire (quand la tombée de copie était vraiment tardive, très proche du bouclage).
Et je me suis même relu en diagonale, repassant sur mes FO sans vraiment les voir. En réponse, je signale que dans la presse de naguère, des agences de presse nous envoyaient des rectificatifs pour des dépêches censées avoir été relues cinq fois, et diffusées malgré tout avec une, voire deux bourdes.

Là, évidemment franchement, sur x feuillets, confondre FO et LO me disqualifie tout à fait, et bien évidemment, tout l’ensemble de ma prose. L’affaire est entendue, je n’ai plus qu’à me livrer à la culture de mes choux, et renoncer à contribuer à toute feuille de choux, tout site d’information, hormis les spécialisés en jardins ouvriers, cultures vivrières, &c.

Constatez par vous-mêmes : ces deux méthodes sont récurrentes, pratiquement toujours le fait d’anonymes (sous pseudo ad hoc la plupart du temps), et tendent à se généraliser.

Soit lire de travers, soit trouver la petite bête, et s’affirmer péremptoirement meilleur connaisseur (argument d’autorité), en cinglant, mode lapidaire, le jeanfoutre qui ose s’aventurer sur vos plates-bandes (votre spécialité).

Je ne m’en offusque plus, et tout ce qui précède n’est que prétexte, en fait, pour vous signaler de nouveau le Charles « Charly » Duchêne, On n’a plus besoin d’un plus petit que soi (BTF Concept), l’essai d’Étienne Liebig, De l’utilité politique des Roms (Michalon), et surtout le Cabu, dont je n’avais pas fait précédemment mention, Peut-on encore rire de tout (Cherche midi).

Je les chroniquerai (peut-être le Cabu d’abord, plus facile à traiter par-dessus la jambe, car il s’agit de dessins qui valent beaucoup mieux qu’un long discours, dont je pourrai donc me dispenser).

Si j’ai, supra, commis une bourde (je ne me relis pas, prêtant le flanc volontairement au trollage et au flammage), surtout déchaînez-vous en commentaires, cela fait mes délices ! Ou alors, on peut débattre sans fin de l’opportunité d’italiser ou non (garder en romain) ce ci-dessus « supra ». Est-il suffisamment passé dans la langue courante ou non ? Grave question, qui mérite bien une disputation, si possible interminable…

P.-S. – on pourra se chamailler de visu, au salon du livre de Paris, du 15 au 19 mars, sur les stands de BTF Concept (E96), de Michalon ou du Cherche-midi (voir les emplacements sur le site du salon). Encore autre chose : bien forcé de me relire un peu pour habiller les images. J’ai déjà décelé une redondance flagrante, que je laisse volontairement subsister… Trouvez-la !