dans la rivalité droite gauche.

 

 

L’élection présidentielle a du bon, le cas des 93 ouvrières de la fabrique de sous vêtements Lejaby auront une chance de ne pas être au chômage. La rivalité Hollande Sarkozy s’est exprimée, c’est à celui qui trouvera un repreneur avant l’autre. La dernière usine d’assemblages de la marque à Yssingeaux, Haute-Loire, est devenue en quelques jours le souci principal de ces deux personnes dans la symbolique plaisanterie de produisons Français. Comment laisser ces ouvrières si expérimentées avec ce savoir faire, impensable se sont-ils dit. Alors ce fut en premier François Hollande qui décrocha son téléphone et chargea Arnaud Montebourg le chantre du combat contre la mondialisation et la finance, de trouver un repreneur. Aussitôt l’Élysée se met en mouvement et décoche Laurent Vauquier auprès des ouvrières, qui toutes étonnées se méfient de la récupération politique dont elles sont l’objet.

 

On le serait à moins quand on sait que Guillaume Sarkozy le frère ainé de notre président et Président de l’UIT, Union des Industries Textiles, Vice-président du MEDEF et dont Nicolas Sarkozy occupait alors, le poste de Ministre de l’Économie, déclarait «je suis fier d’être un patron industriel qui délocalise, assez de faux semblants, la perte d’emploi, la déstabilisation industrielle, c’est normal, c’est l’évolution», d’après le blog de Bernard Gensame et l’Expansion du 28/11/02. Le conflit d’intérêt entre les deux frères est dénoncé dans ce blog. Guillaume Sarkozy est accusé d’avoir «coulé l’industrie textile Française», et après avoir déposé le bilan de son Entreprise en 2006 devenait Président du conseil d’administration ainsi que Directeur général du groupe Malakoff-Médéric fusionné en juin 2008. Il a bénéficié, 6 mois plus tard, à la faveur de la mise en place du dispositif «mutuelle obligatoire employeur», des souscriptions de contrats d’assurance des 50 000 employés de Pôle emploi et de 120 000 employés de la Sécurité sociale. Une bonne affaire familiale, la présidence de ce groupe Malakoff-Médéric. La réduction du régime de répartition ne peut que conduire à l’éclosion de retraites sur des fonds de pension dont les mutuelles privées sont les principales gestionnaires, une parenthèse.

 

L’industrie de l’habillement avec celle du textile fut l’une des premières industries à délocaliser à partir des années soixante. Cela fait donc plus de 50 années que ce domaine industriel souffre des coûts de la main d’œuvre des pays comme le Maroc et la Tunisie. En 2002 un article du Monde.fr soulignait que «les entreprises Françaises de confection ont, dès les années 1960, fait coudre leurs vêtements en Tunisie et au Maroc principalement». Actuellement, elles replaceraient leur système de production en Chine, en Europe centrale, en Turquie. Sans pour autant renoncer au Maghreb, qui réagit à cette nouvelle concurrence en affinant son offre, non seulement pour l’assemblage des pièces de tissu, mais aussi pour les découpes, l’étiquetage, l’emballage et même le dessin des modèles. Les principaux fournisseurs de la confection en France sont la Roumanie, la Bulgarie, le Maroc et la Tunisie, affirme-t-on à l’Union des industries textiles, UIT.

 

Il n’existe plus de pantalons, de chemises ou même de soutien-gorge qui soient de fabrication 100 % Française, à l’exception des produits de luxe. On le sait maintenant, la Tunisie excelle dans la lingerie, le Maroc dans la fabrication des pantalons et des vestes, le Pakistan dans le linge de lit, la Chine dans les tissus de coton, et la Corée du Nord, comme le Vietnam, dans les vêtements de travail.

 

En avril 2004 à Shanghai, au moment ou l’industrie du textile s’apprêtait à perdre encore 17 000 emplois lors de la fin des quotas textiles de janvier 2005, Jean Pierre Raffarin, alors Premier ministre estimait que la Chine était «un acteur responsable de l’économie mondiale», laissant ainsi entendre qu’elle pourrait auto limiter ses exportations textiles en pleine expansion, TF1 news 24 avril 2005. Déjà à l’époque l’industrie textile qui employait environ 100.000 personnes perdait 10 % d’emplois par an. Une étude de l’Institut Français de la mode, exprimait à l’époque, qu’au moins 7% d’emplois soit 7.000 pouvaient être perdus.

 

Il est évident qu’il fut impossible de lutter contre les coûts de main d’œuvre pratiqués. L’écart du coût du travail horaire, en dollars Américains, charges sociales incluses, en 2000, pour les salariés travaillant dans l’habillement, était de 1 à 87 entre le moins cher, Pakistan, et le plus cher, Japon, selon les données de Werner International, citées par l’Union Française de l’Habillement, UFIH.

 

  • Japon : 26,1 dollars,
  • Union européenne : 14, dollars, 13,8 dollars en France contre 4,3 dollars au Portugal,
  • Amérique latine : 3 dollars,
  • Turquie : 2,6 dollars,
  • Mexique : 2,2 dollars,
  • Europe centrale : 1,9 dollar, 1,6 dollar en Slovaquie,
  • Maghreb : 1,7 dollar, 1,8 dollar au Maroc, 1,6 dollar en Tunisie,
  • Asie : 0,6 dollar, 0,6 dollar en Chine, 0,5 dollar en Inde et 0,3 dollar au Pakistan.

On ne voit pas ce que pouvait faire Arnaud Montebourg dans ce contexte, la poursuite de cette activité dans ce domaine textile si concurrentiel est une hérésie, il n’avait aucune chance. Seul un domaine d’activité sur du luxe protégé peut encore tenir la route quelque temps.

 

Heureusement que les socialistes ont tirés les premiers, ce qui décida, il faut le reconnaître, l’Élysée a entrer en jeu. L’annonce du tribunal de commerce de Lyon le 18 janvier concernant la fermeture de l’usine n’avait pas fait sourcilier un œil au président, ni à Laurent Vauquier maire du Puy en Velay voisin, il s’était résigné. «Nous allons faire le maximum dans les prochains jours pour que l’on accompagne, au mieux, chaque salariée pour retrouver un emploi le plus vite possible» avait-il déclaré. Quant à Xavier Bertrand ministre du travail, «il y a un contrat de sécurisation professionnelle qui a été mis en place qui va garantir aux salariés pendant un an, d’avoir 98 % de leur salaire», il est le dispositif légal sans plus. Même le président a clamé qu’il ne laisserait pas faire, «moi je n’accepte pas la fatalité, je ne serai pas Monsieur Jospin face à Vilvorde», l’usine de Renault qui a fermé en 1997 a-t-il assuré !

 

Alors tout se précipite, Laurent Vauquier qui avait promis une bonne nouvelle sur son compte twiter, s’est rendu mercredi 01/02/12 à l’usine Lejaby pour annoncer qu’il y avait un repreneur, Le parisien.fr.

 

C’est un maroquinier originaire d’Yssingeaux, qui dirige une entreprise en Auvergne. il reprendra l’intégralité du personnel de Lejaby, soit les 93 salariées. Elles changeront de secteur d’activité, quittant celui de la lingerie pour la maroquinerie de luxe. Vincent Rabérin est «quelqu’un de chez nous», a ajouté le ministre. «Il travaille pour Louis Vuitton, qui s’est engagé à un carnet de commandes sur la durée ?», a-t-il déclaré au côté de l’intéressé. «Aujourd’hui, vous êtes toutes sauvées, c’est une réussite collective», a conclu Laurent Wauquiez à l’adresse des salariées.

 

«Il faudra vous remettre en question»

 

Cette entreprise implantée dans l’Allier, compte 200 salariés. Il a averti les salariées, «ce n’est pas de la corsetterie, il faudra vous remettre en question». Il a été applaudi et a insisté sur le fait qu’il était «un industriel, pas un financier». Puis ce fut la visite au président.

 

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Sept représentantes de Lejaby ont été reçues par Nicolas Sarkozy le 04/02/12, Photo AFP, document Le Progrès.fr

 

«On n’est pas venu faire du tourisme à Paris, ni visiter l’Élysée, même si c’est un très beau bâtiment. On est là pour défendre l’emploi en France» a déclaré Bernadette Pessemesse, déléguée syndicale, CGT. «Si M. Sarkozy nous fait venir pour qu’on le remercie, il fait erreur. Fallait pas qu’il se dérange ! Cette victoire c’est le résultat de notre lutte à nous».

 

Il reste encore 350 postes à sauver.

 

Ne mâchant pas leurs mots, «a l’avenir il faudra vous préoccuper plus de l’emploi en France», ont-elles déclaré.