la libération de la France, les batailles de Cherbourg, Caen, la bataille des haies et la percée d’Avranches,
La prise immédiate de Cherbourg fut capitale pour la poursuite du débarquement. De sa prise par les Alliés dépendait le succès de l’opération Overlord, elle leur apporta un port pour l’accostage des navires pétroliers indispensables dans la logistique de cette opération. Ce fut un vrai challenge d’approvisionner les unités en carburant chars et camions, le second aspect de cette opération gigantesque. 15.000 tonnes de carburant à J+41 soit le 15 juillet pour l’essence des 200.000 véhicules. Dès que les Alliés établirent leurs plans dans le Nord-ouest, il fut évident que le choix de la zone du débarquement fut lié à la logistique qu’il permit, un port proche en eaux profondes avec ses infrastructures de déchargement fut indispensable. Cherbourg fut donc la première ville à être libérée. Un tel port permit d’assurer un corridor de ravitaillement direct depuis les États-Unis. Sans ce port, l’équipement dut transiter par la Grande-Bretagne pour y être déchargé sous protection aérienne et navale pour être rechargé sur des engins de débarquement, en nombre et capacités limités, avant d’être acheminé en France. Néanmoins, depuis le débarquement de Dieppe en 1942, les Alliés n’envisagèrent plus de prendre frontalement un grand port. Ceux du mur de l’Atlantique furent trop solidement défendus pour une attaque frontale par mer. Comme décrit au précédent article suite 66 , deux ponts artificiels, code Mulberry, furent apportés par les péniches du débarquement et montés sur place. Dans les premières réflexions des Alliés le débarquement direct sur le Cotentin ne fut pas retenu, cette région était séparée des autres lieux du débarquement par la vallée de la Douve inondée par les Allemands afin d’empêcher un débarquement aéroporté. Cependant, en janvier 1944, le général Montgomery reprit l’idée du Cotentin voulant élargir le front afin d’éviter un encerclement par une trop étroite parcelle d’engagement, et faciliter la prise rapide de Cherbourg.
Utah Beach.
Le choix du débarquement fut Utah Beach l’une des cinq plages de débarquement, voir la suite 66. Plus à l’Ouest et la seule sur la cote est du Cotentin comme le montre l’image ci-dessous.
Document Wikipédia, on y distingue bien la vallée de la Douve qui rejoint le canal de Carentan à la mer.
Cette plage de débarquement fut particulièrement propice à un assaut amphibie et fut renforcée. Les dunes entre la baie des Veys et Saint-Vaast-la-Hougue furent truffées de nids de mitrailleuses et les hauteurs de l’arrière-pays furent aménagées de quelques batteries lourdes, notamment à Azeville, Crisbecq, Morsalines, La Pernelle. Néanmoins cette zone restera moins fortifiée que d’autres zones de la côte normande du fait que les Allemands estimèrent que les marais et les zones inondées rendaient difficile un accès à l’intérieur des terres.
La zone d’assaut s’étendit sur deux kilomètres de Sainte-Marie-du-Mont jusqu’à Quinéville à hauteur de Varreville. Afin de permettre une sortie de plage des troupes fraîchement débarquées, mais aussi, afin qu’elles ne se trouvèrent pas bloquées entre la plage et les marais, les Alliés décidèrent d’engager deux divisions parachutistes, la 82ème et la 101ème divisions aéroportées Américaines qui durent établir un point de fixation sur la zone de Sainte-Mère-Église et Chef-du-Pont, et contrôler les quelques routes d’accès aux plages. Ils durent également prendre le contrôle de la N13, route reliant Paris à Cherbourg via Caen d’importance stratégique, cela afin d’éviter tout mouvement de troupes ou de contre-attaque ennemis par cette voie et d’isoler la forteresse de Cherbourg. Dans ce même but, ils durent contrôler la ligne de chemin de fer reliant Caen à Cherbourg, les ponts de la Douve et le contrôle du canal de Carentan à la mer. L’assaut aéroporté porta les noms d’opérations Albany et Boston.
C’est la 4ème division d’infanterie Américaine du major général Barton, appartenant au VIIème corps Américain commandé par le général J. Lawton Collins, qui fut chargé de prendre d’assaut Utah Beach. La première vague d’assaut fut menée par le brigadier général Théodore Roosevelt , petit-neveu du président Américain en exercice, Franklin Delano Roosevelt, fils de l’ancien président Theodore Roosevelt le seul général, au jour du 6 juin, à accompagner une vague d’assaut. Ce débarquement bénéficia de l’appui feu du groupe de bombardement de l’amiral ML Deyo et d’un écran de fumée lancé par le squadron 342, groupe Lorraine des ex-forces aériennes Françaises libres. En tout ce sont plus de 865 navires, la «Force U», de convoyage, de protection ou d’appui aux troupes à terre qui furent impliquées dans le débarquement sur Utah Beach.
L’opération, voir également le résumé du débarquement en Normandie .
C’est à 6h30 le 6 juin, après une intense préparation d’artillerie et d’un bombardement aérien sur les principales positions Allemandes, que la 4ème division d’infanterie US fut engagée.
Char DD amphibie avec la jupe abaissée, référence Wikipédia .
Deux escadrons de chars DD amphibies furent mis à l’eau à 3 kilomètres du rivage. Ils rejoignirent la plage par leurs propres moyens grâce à deux hélices et une jupe de caoutchouc. Ils s’approchèrent en deux vagues d’assaut, 12 chars pour l’une, 16 pour l’autre, de la plage où ils commencèrent à tirer sur les positions des Allemands alors que ceux-ci peinèrent à réorganiser leur défense après le terrible bombardement Allié qui venait juste de cesser. En raison d’une erreur de navigation, les premières vagues d’assaut prirent pied à environ 2 kilomètres au sud de l’endroit prévu. Heureuse erreur pour les Alliés puisque les défenses Allemandes furent ici nettement moins redoutables. Pendant le début du débarquement de la division d’infanterie Américaine, les tirs Allemands furent nourris mais peu précis et peu à peu, les positions de mitrailleuses Allemandes furent rapidement neutralisées. Il subsista tout au long de la journée des tirs aléatoires mais meurtriers de canons et mortiers de la 709ème division d’infanterie Allemande située dans les terres mais qui furent réduits par l’avancée des troupes et les tirs guidés des navires Alliés. La plage fut aux mains des Alliés assez rapidement. La marée se retirant, découvrit les défenses des plages que les unités du génie commencèrent à éliminer, moins d’une heure après le début du débarquement, afin d’ouvrir des passages aux chalands de débarquement de matériels et véhicules lourds. Deux heures après le débarquement, le mur antichar fut dynamité en plusieurs endroits, et les chars commencèrent leur progression à l’intérieur des terres. La jonction des troupes débarquées et des parachutistes se fit en début d’après midi du côté de Pouppeville. Les pertes de la 4ème division, tués, blessés et disparus, ne dépassèrent pas 200 hommes pour la journée du 6 juin.
Utah Beach fut un succès.
Dans les 12 premières heures, ce sont 23.250 hommes, 1.700 véhicules de combats et 1.695 tonnes d’approvisionnement qui furent débarqués sur cette plage. Par la suite, une véritable logistique d’approvisionnement fut mise en place par la brigade spéciale de génie Américain, forte de 19.500 hommes, la brigade fut portée dans les semaines qui suivirent à près de 70.000 hommes. Cette unité, commandée par le major général Eugene Meode Caffey, permit de juin à novembre 1944 le débarquement sur la plage et l’acheminement jusqu’au front de 836.000 hommes, 220.000 véhicules de la jeep à la locomotive, 775.000 tonnes d’approvisionnements. Privé rapidement du port artificiel de Saint-Laurent-sur-Mer détruit par la tempête du 19 juin, les Américains durent imaginer des solutions de rechange, la plage fut donc utilisée par des chalands mais aussi par des échouages volontaires de bateaux de plus fort tonnage, repris ensuite par la marée montante. Le quartier général de cette unité de génie fut durant les premières semaines établit dans le premier blockhaus pris aux Allemands. Sur celui-ci s’élève aujourd’hui le monument à la mémoire des hommes de la 1ère brigade de génie.
L’USS Nevada bombardant des positions Allemandes près d’Utah Beach le 6 juin, les troupes Américaines débarquant le 6 juin document Wikipédia .
L’avancée sur Cherbourg.
Le 18 juin, la 9ème division d’infanterie Américaine atteint la côte ouest de la presqu’île, isolant ainsi les 709ème et la 243ème divisions d’infanterie Allemandes au nord. En 24 heures, les 4ème, 9ème et 79ème divisions d’infanterie Américaines avancèrent vers le nord sur un large front, sans beaucoup d’opposition depuis l’Ouest de la péninsule tandis qu’à l’Est, aux environs de Montebourg, l’ennemi, épuisé par une dizaine de jours de combats, s’effondra. À Brix, plusieurs caches de V1 furent découvertes ainsi qu’une installation de V2. En deux jours, Cherbourg fut à la portée d’une attaque des divisions Américaines. Le commandant de la garnison Allemande, le lieutenant-général von Schlieben, disposait de 21.000 hommes. Cependant, la plupart de ses effectifs furent recrutés à la hâte dans les unités de la marine ou de travailleurs, ou encore provinrent des unités de combats fatiguées et désorganisées qui furent battues et en retraite sur Cherbourg. Vivres, carburant et munitions manquèrent. La Luftwaffe essaya de faire le ravitaillement, mais largua surtout des articles comme des croix de fer pour remonter le moral des troupes. Toutefois, von Schlieben refusa de se rendre et l’amiral Hennecke entreprit de démolir le port pour qu’il ne puisse servir aux Alliés. Le général Collins lança l’assaut le 22 juin. La résistance fut vive, les combats se déroulèrent dans les rues et au large entre les cuirassés Alliés et les canons Allemands. Mais, lentement, les Américains chassèrent les Allemands de leurs bunkers et de leurs blockhaus. Le 26 juin, la 79ème division prit le Fort du Roule, qui dominait la ville et ses défenses, mettant ainsi fin à toute action organisée des troupes Allemandes. Von Schlieben et Hennecke signèrent la reddition à 16h au château de Servigny. Les troupes qui défendirent les fortifications du port et l’arsenal se rendirent au bout de quelques jours, et certaines troupes Allemandes à l’extérieur des fortifications résistèrent jusqu’au 1er juillet. Voir sur over.blog.com les photos de la prise de Cherbourg
Le bilan.
En raison de la rapidité d’intervention des Alliés et des ordres incohérents d’Hitler, les Allemands subirent une lourde défaite. Ce n’est pas moins de 39.000 soldats Allemands qui furent faits prisonniers à la suite de cette victoire Alliée. Côté américain les pertes furent également lourdes, sur les 135 officiers et les 2.838 hommes dont disposa le 325ème régiment d’infanterie et de planeurs de la 82éme division aéroportée, il ne resta le 2 juillet, plus que 55 officiers et 1.245 hommes puis, le 6 juillet, 41 officiers et 956 hommes. De la compagnie de chasseurs la plus importante seuls 57 hommes restèrent et pour la plus meurtrie seulement 12. À l’évidence la traversée du bocage normand s’avéra difficile et périlleuse. Les Allemands eurent si consciencieusement démoli et miné le port, que les premiers navires n’y accostèrent qu’à la fin de juillet. Il fallut attendre à la mi-août pour que le port fut en partie opérationnel. Alors que Hennecke se vit décoré par Hitler de la Croix de chevalier de la Croix de fer pour «un exploit sans précédent dans les annales de défense côtière», le général Friedrich Dollmann , commandant la VIIème armée, mourut d’une crise cardiaque le 28 juin après avoir appris que la prise de Cherbourg lui valut la cour martiale, ou se suicida les raisons de sa mort ne furent pas clairement établies.
La suite 68 portera sur les batailles de Caen et Avranches et puis la bataille des haies
Les références peuvent être consultées sur mon blog au Monde.fr,