L’EXPRESS publie un dossier intitulé « Les jeunes et l’alcool sans modération… » avec en première page ce chiffre « 46% des jeunes disent avoir bu plus de cinq verres à au moins une occasion au cours des trente derniers jours ».

D’après l’hebdo, les jeunes « boivent moins régulièrement mais avec plus d’excès que leurs aînés, une pratique collective qui culmine après les examens ou lors des soirées étudiantes » et sur laquelle se penchent spécialistes et grandes écoles, mais qui reste difficile à évaluer. Indiquant que 230 grandes écoles ont retenu le principe d’un code de bonne conduite « pour limiter les conséquences parfois dévastatrices des courses à l’alcool », le magazine précise qu’à la rentrée chaque établissement signera une charte visant à réfréner la consommation abusive, en bannissant les alcooliers des campus et en encadrant mieux les soirées.



La revue qui note que le sujet est tellement récurrent qu’il agace les spécialistes, rapporte que selon l’épidémiologiste Marie Choquet « en général on dramatise beaucoup ; tous les jeunes n’ont pas recours à ces pratiques », sachant par ailleurs que la consommation a beaucoup diminué en France depuis quarante cinq ans mais que la manière de boire a évolué. D’après le journal, la forme la plus extrême est le binge drinking où ce qui compte le plus est de se soûler « en groupe, devant témoins, entre initiés ».

Soulignant que ces soirées donnent parfois lieu à des défis comme celui qui consiste à jeter des dés avec nécessité pour le perdant, avant de rejouer, d’avaler des verres « cul sec » jusqu’à ce que la bouteille soit vide, le journal relève que le « binge » n’est jamais solitaire car c’est « une affaire collective supposée joyeuse ».
L’alcoologue Michel Craplet voit dans ce goût pour la consommation occasionnelle et démesurée « une attitude culturelle nouvelle et une forme d’harmonisation européenne ». Pour une psychologue de Polytechnique , le binge est « un phénomène de génération qui touche toute la population » et si « on en parle plus pour les grands établissements (…) les universités connaissent les mêmes difficultés ». Evoquant les principales fêtes étudiantes organisées à de multiples occasions par les Bureaux des étudiants (BDE) qui « s’occupent de tout » même d’obtenir des tarifs préférentiels, l’hebdo observe que la présence d’une marque d’alcool ne choque pas et que de leur côté « les professionnels du secteur se défendent de pousser aux abus ». « Nous ne cherchons évidemment pas à nous associer à des beuveries » affirme Alex Capitant, directeur d’Entreprise et Prévention, qui assure « les étudiants n’ont pas besoin des fêtes pour s’alcooliser, hors des fêtes, il n’est pas difficile et encore moins coûteux de s’approvisionner en alcool fort ».
L’Express qui signale qu’en raison de ces dérives les open bars sont désormais interdits dans les soirées, remarque que l’Insa de Lyon cherche à réguler les consommations, y compris hors des fêtes, en autorisant l’ouverture sur le campus d’un bar où on sert de la bière du vin et du champagne afin d’éviter que les étudiants ne se réunissent pour boire dans les chambres. Gros plan sur des étudiants qui boivent dans un bar branché de la capitale et ingurgitent un très grand nombre de tequilas en peu de temps.
Un étudiante anglaise dira plus tard « Je ne sais pas pourquoi on a bu comme ça : pour être avec les autres, pour participer à la fête. Et c’est amusant de perdre le contrôle ». Selon le président de la Mutuelle des étudiants « le coma éthylique est souvent le fruit de ces soirées où le but est de montrer qu’on tient bien l’alcool ». Marie Choquet s’inquiète « la vraie question c’est l’attaque de l’état de conscience. Au-delà d’une certaine quantité le discernement disparaît. On oublie ». Notant que cette volonté de « perdre la raison » culmine en période d’examen ou après les épreuves, le magazine indique que pour une psychologue de Paris V « au coeur de ces pratiques, il y a l’incertitude et l’angoisse de la sélection, l’angoisse du chômage (étant) latente ».
L’hebdo qui voit là une manière de « mettre le doute entre parenthèses » de « fêter l’instant pour l’instant », précise que la consommation ponctuelle et excessive touche aussi les jeunes mineurs puisque selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, 47% des jeunes de 17 ans déclarent avoir été ivres au cours des 12 derniers mois. Un chef de service aux urgences dit avoir « été surpris récemment par le comportement des adolescents » avec des comas éthyliques de jeunes ramenés par les pompiers.
D’après la revue, là aussi ça se fait en groupe, et les parents sont étonnés d’apprendre que leur enfant a bu une bouteille de vodka en plein après midi, sachant que ces cas restent rares mais « qu’ils touchent toujours les plus fragiles » selon le psychiatre Patrice Huerre. D’après le Dr Picherot du CHU de Nantes « l’alcool est au centre des polyconsommations avec par exemple le tabac ou le cannabis » et « il peut y avoir aussi des risques d’abus sexuels ».
Concernant l’ampleur réelle du phénomène, le magazine parle de « normalisation » chez ceux qui ont arrêté les études et travaillent, pour préciser que les spécialistes réfutent les analyses trop alarmistes. Michel Craplet qui affirme « qu’ aucun chiffre ne (..) permet de dire que les jeunes boivent plus tôt », estime aussi que les jeunes se comportent comme leurs parents au même âge avec toutefois cette « redoutable constante » de l’association fête – alcool, valable pour toutes les classes sociales. D’après l’Express, « le recours à des produits anxiolytiques (…) se nourrit la plupart du temps du contexte familial (…) comme si le « binge drinking » chez les jeunes était finalement leur façon à eux d’exprimer une morosité diffuse partagée par toutes les générations » avec l’impulsivité, la violence et le manque d’expérience propre à leur âge.

A noter des encadrés sur le Royaume Uni « patrie du binge drinking » sur les jeunes espagnols « Ivres de botellon », et sur ce « Mortel pari » en Allemagne où un lycéen s’est effondré, victime d’un arrêt cardiaque, après avoir bu 50 verres de tequila à la suite d’un pari.