Traditionnel, patriarcal, ancestral et populaire, d’origine paysanne et moyenâgeuse, voire sarrazine, – au VII° Siècle, avec l’introduction, par les troupes d’invasion berbères et musulmanes, dans le Sud et le Sud-Ouest de la France, de la culture d’une fève blanche, ( serait-ce le haricot ?) -, l’authentique « plat du pauvre », l’estofat, – ou le févoulet -, un ragoût rustique de viandes, – mouton et porc -, en sauce mijotant longuement auprès du feu, permettait d’accommoder les restes « viandiers(1) » avec des fèves, des navets et des herbes aromatiques. Le cassoulet de Catelnaudary, tel que nous le connaissons en nos temps présents, est réalisé avec des produits cultivés, élevés et conditionnés en « Pays Chaurien et Lauragués », cuisinés dans une poterie locale, « la cassolo ou la cassole », une sorte de jatte à bord évasé fabriquée par les potiers d’Issel au fondement de son nom, et longuement mijotés et mitonnés au four de boulanger chauffé avec du bois ou des ajoncs de la Montagne Noire.


La légende et l’histoire du cassoulet de Castelnaudary : le contexte historique.


Lors de la Guerre de Cent ans, les « Angli », – ou saxones -, attaquèrent et envahirent tout le Languedoc en 1355. D’après une chronique de Froissart, reprise par les historiens locaux, « …ce ne fut pas, à proprement parler une expédition militaire mais plutôt une invasion de paysans en armes, des bordelais, des basques et des landais mais peu d’angli » Fin Juillet de dite année, Édouard de Woodstock, dit le Prince noir, prince de Galles, comte de Chester, duc de Cornouailles et prince d’Aquitaine, fils aîné d’Édouard III d’Angleterre et de Philippa de Hainaut, mandaté par son père, débarqua sur ses terres gasconnes dont il était le lieutenant. Le 20 Septembre, il arriva à Bordeaux et, pour protéger le reste des possessions anglo-gasconnes en terres françaises contre les troupes de Phillippe VI qui avaient confisqué la Guyenne au roi d’Angleterre, pour félonie, en 1337, leva une armée de 1.500 lances, 11.000 archers et 3.000 soldats de troupes légères.


Au début Octobre, à la tête de ses va-nu pieds, il mena campagne dans tout le Sud-Ouest. De Bordeaux, à travers les comtés de Juillac, d’Armagnac et d’Astarac, il gagna le Lauragais. Saccageant, pillant, maraudant, détroussant les terres traversées, il ne s’attachait pas à conquérir et à soumettre à la couronne anglaise les seigneuries conquises, mais il s’en appropriait les richesses. Ses hommes armés commirent d’effroyables massacres parmi les populations proches de Toulouse que le Prince Noir prît soin de contourner. Ses troupes brûlèrent Castanet et Baziège, martyrisèrent et violèrent femmes et enfants à Montgiscard, et dévastèrent, ruinèrent et incendièrent Villefranche de Lauragais, Avignonet, le Mas Saintes Puelles.

Au derniers jours d’Octobre, suivant la Chronique de Froissart, « Il arriva devant Castelnaudary, une bonne grosse ville et bon château et remplie de gens et de biens. Mais elle n’était pas fermée, ni le château non plus, si ce n’est de murs de terre selon l’usage du pays. Les Anglais l’environnèrent, l’assaillirent, et… », le 31 Octobre, « la prirent. Et il y eut un grand massacre d’hommes et la ville fut toute courue, saccagée, pillée et tout le bon avoir pris et levé. Le prince et ses gens se reposèrent là une demi-journée et une nuit, et le lendemain ils continuèrent vers Carcassonne. »



Dans sa chevauchée sanguinaire, après avoir anéanti Fangeaux, il butta sur la cité de Carcassonne défendue par le Comte Aymeric. Se refusant à toute attaque, il choisit de s’emparer de Limoux, dépouillant, détroussant et ravageant la ville et l’incendiant pour parachever son œuvre destructrice. Contournant la cité de Dame Carcasse, il fondit, lors sur Narbonne à qui il réserva le même sort funeste. Le Comte de Carcassonne, pensant que tout danger était écarté et que les troupes du Prince Noir continueraient leur marche exterminatrice sur Béziers et Pézenas, baissa sa vigilence. Édouard de Woodstock, Prince de Galles et d’Aquitaine, profita de ce désintéressement coupable pour faire demi tour et fondre sur la place forte emblématique du pouvoir royal, et son bourg, les récoltes, les vignes et les arbres fruitiers devinrent la proie des flammes. Enfin, reprenant la route de Bordeaux qu’il regagna le 25 Décembre et d’où il écrivit à son père pour l’informer de son succès, il mis à sac et anéantit Montréal.


La légende et l’histoire du cassoulet de Castelnaudary.


C’est dans ce contexte que naquit la légende du « févoulet » à la chaurienne. En l’An 1355, à Castelnaudary, on l’appelait « Estofat », aujourd’hui « Cassoulet », mais sa recette est ancestrale.

Certes son origine est controversée, les villes de Castelnaudary, de Toulouse, de Carcassonne et quelques autres villes se l’ayant disputée tout au long du XIX° Siècle, persistant toujours au XX° Siècle mais avec plus de modération de la part des belligérants.

La légende veut que ce soit lors du siège de Castelnaudary, fin Octobre 1355, pendant la Guerre de Cent Ans, – 1337 à 1453 -, que le premier « estofat » aux fèves blanches fut cuisiné. Aux murailles de la ville, la bataille faisait rage et les assièges, affamés par la technique de la terre brûlée employée par le Prince Noir et ses troupes pour soumettre les défenseurs des cités et ainsi de mieux s’en emparer, commençaient à perdre pied et reculaient inexorablement devant l’assaillant.


Désireux de porter aide à ses valeureux soldats tenant la dragée haute aux troupes sanguinaires de l’Anglais, les consuls chauriens sommèrent les femmes de réunir toutes les réserves de nourriture encore disponibles et leur soumirent injonction de les cuisiner séance tenante arguant, en cela, qu’un repas chaud redonnerait cœur au ventre et forces nouvelles aux hommes harassés et fourbus qui se battaient valeureusement, au péril de leurs vies, pour la sauvegarde de la ville.

Fèves blanches et viandes diverses furent ainsi réunies et préparées, en un plat unique, dans de grandes « olles » et « cassoles » en terre cuite d’Issel. Après le plantureux repas englouti dans la précipitation et les fracas de la bataille, fort bien arrosé avec des vins et des alcools du pays, les chauriens sortirent de leurs murs et se précipitèrent sur l’armée anglaise qui, prise de panique, leva le siège et ne s’arrêta, selon la légende, que devant les rives de la Manche.


 

Cette légende conforte le sentiment nationaliste et fait, du cassoulet, un défenseur incontesté des valeurs françaises.


Notes.


(1) D’après Guillaume Tirel, dit Taillevant, cuisinier de plusieurs rois durant 60 ans, qui se serait inspiré d’un ouvrage arabe consignant une recette du ragoût de mouton à la fève blanche, rédigé par Mohamed de Bagdad en 1226 .