Santé, Retraite, Famille et Solidarité par la répartition et la redistribution…

Tous les indicateurs économiques et sociaux nous démontrent que la progression des dépenses sociales entre 2000 et 2040 peut aisément être financée, même avec une croissance faible de 1,7 % par an. A condition que l’on affirme le choix de société de la redistribution et de la répartition, celui de la République sociale qui génère meilleure croissance, développement durable et bien être intergénérationnel. Et que l’on cesse enfin de mentir au peuple.

Il faudrait quand même que l’on m’explique… Pourquoi la France "ne pourra plus se payer" un système de santé, de retraite et de solidarité par la répartition et la redistribution ? Comment ce qui était possible en 1945 (1) ne le serait plus en 2010 …ni en 2020 ou 2040 ? Le vieillissement de la population ? Le rapport actifs cotisants / inactifs jeunes et retraités qui se dégrade, nous dit-on ? Non, ce ne sont que mensonges d’Etat, enfumages et manipulations, pour éviter de mettre sur la table la seule problématique qui compte : le financement, possible ou pas, du social par la croissance de l’économie française (2).Comment se fait-il qu’une augmentation prévisible des dépenses sociales de 9 % dans le PIB en 40 ans (de 30 à 39 %) ne puisse être financée par une augmentation nette des richesses produites de 100 % sur la même période ? LE GATEAU A PARTAGER SERA DEUX FOIS PLUS GRAND En effet, on estime, en hypothèse basse de 1,7 à 1,8 % de croissance annuelle, que la production nationale, le fameux PIB (3), va au moins doubler entre 2000 et 2040, passant de 1441 à 2900 Milliards d’Euros minimum. En conséquence, "le gâteau" à partager sera deux fois plus grand, en Euros constants ! Mais cela, on ne le dit jamais aux Français. Pourquoi ?… En fait, on sait que c’est le partage de ce gâteau qui pose problème !… Il est même au cœur des politiques de répartition et de redistribution qui devraient différencier néolibéraux-conservateurs et progressistes-sociaux au pouvoir. En effet, la Valeur Ajoutée produite par le travail dans les entreprises, "le gâteau", doit être partagée entre rémunération du travail (salaires et autres rétributions), cotisations sociales,  impôts et taxes, frais financiers, profit des actionnaires, autofinancement des investissements, recherche, provisions pour risques et avantages financiers divers, parfois indécents (stocks options, primes en tous genres, "parachutes dorés", retraites chapeau payées par l’entreprise…). LE SOCIAL UTILISERA UN TIERS DE LA CROISSANCE En 40 ans, entre 2000 et 2040, les ressources de "l’entreprise France" (PIB) vont donc augmenter de 100 % minimum, en € constants. Qu’en est-il pour l’ensemble des dépenses sociales et leur évolution prévisible entre 2000 et 2040 ? Selon les experts et en maximisant les dépenses (bases avant "réformes" santé-retraites 1993-2006), les besoins pour la retraite passeraient de 180 à 510 M€ (4), la santé de 140 à 370 M€ et la solidarité (famille, handicap, chômage, logement, exclusion…) de 110 à 260 M€, pour un total général de dépenses sociales qui passeraient de 430 à 1140 M€ en 40 ans. Cette forte progression est-elle supportable pour la France et son économie, sans compromettre sa compétitivité ? En 2000, ces 430 M€ de dépenses sociales globales représentaient 29,8 % (retraites 12,5 %, santé 9,7 %, et solidarité 7,6 %) d’un PIB de 1441 M€, permettant d’affecter 1011 M€ pour les autres utilisations: sa­laires et autres revenus du travail, profits, impôts et taxes, investissements, recherche…En 2040, les dépenses sociales se monteraient au maximum à 1140 M€, soit 39,4 % (retraites 17,6 %, santé 12,8 % et solidarité 9 %) d’un PIB de 2900 M€, les autres destinations se répartissant 1760 M€.Remarquons qu’entre 2000 et 2040, le PIB annuel aura progressé de 1460 M€, les dépenses sociales augmentant de 710 M€ et le disponible pour les autres utilisations progressant de 750 M€. On peut donc considérer que l’accroissement des dépenses sociales utilisera, en moyenne, le tiers d’une croissance faible de 1,7 à 1,8 % pendant les 40 années à venir : de 29,8 % du PIB en 2000 à 39,4 % en 2040. Par ailleurs, l’excellente natalité française et l’immigration, "choisie" ou pas, permettront à la population active d’être plus nombreuse que prévu, pour améliorer encore la productivité et la croissance de "l’entreprise France". Si l’éducation-formation et la recherche-innovation sont au rendez-vous… 

"L’INVESTISSEMENT SOCIAL EST ECONOMIQUEMENT FORMIDABLE"

 La progression des dépenses sociales entre 2000 et 2040 est donc très supportable par l’économie française. Elle est même souhaitable car cette redistribution, qui est un choix de société, sera pres­que entièrement utilisée pour la consommation intérieure qui est le principal moteur de la croissance car "l’investissement social est économiquement formidable" (5). De plus, il alimente la spirale du dévelop­pement humain vers le bien-être intergénérationnel recherché par le peuple (santé, retraite, solidarité).Donc, nul besoin de "réformes", synonymes de régression sociale comme depuis les années 90, mais plu­tôt d’une consolidation plus juste des acquis sociaux pour l’ensemble la population. Car, à quoi doit servir la croissance, si la France souhaite demeurer "une République indivisible, laïque, démocratique et sociale" (Art . 1, Constitution 1958) ? L’économie n’est elle pas au service de l’être humain ?  Mais peut-être faudrait-il, enfin, une volonté politique affirmée, pour baser les cotisations sociales employeur sur la Valeur Ajoutée produite par l’entreprise et non sur les salaires (6) et réhabiliter l’impôt progressif sur le revenu au niveau de l’Etat. Car les ressources sociales destinées à la répartition-redistribution doivent progresser au même rythme que la croissance du PIB et être financées par la production nationale …et non par la consommation des ménages (TVA sociale…) ou des taxes. UNE PRATIQUE RECURRENTE DES NEOLIBERAUX Il faudrait donc arrêter de mentir au peuple, en affirmant que les besoins sociaux augmentent et que les ressources stagnent. Sans événements catastrophiques, imprévisibles actuellement (guerres, épidémies, phénomènes naturels…), il n’y a aucun problème de financement de la protection sociale française pour les 30 années à venir (7). Sauf à considérer une pratique récurrente du capitalisme financiarisé et des gouvernements néo-libéraux …que l’on nomme lutte des classes. Même si ce terme n’est plus "tendance", il y a toujours une lutte sans merci entre actionnaires, rentiers, capitalisme spéculatif, soutenus par la droite politique, et le peuple (salariés, besoins sociaux, services publics…), pour la répartition du "gâteau", c’est à dire la Valeur Ajoutée produite par le travail dans les entreprises (8). Les premiers faisant tout pour organiser des déficits sociaux structurels conduisant à des régressions baptisées "réformes", en vue de privatisations, avec leurs conséquences néfastes pour les populations et l’économie (9). Marx n’est-il pas toujours d’une actualité brûlante ?… Les privilégiés, spéculateurs et gouvernements néo-libéraux semblent le relire, le comprendre et le pratiquer à leur profit bien mieux que le Peuple !… 

Et si tout ce que je viens d’écrire n’est ni vrai, ni fondé, démontrez-moi le contraire. Expliquez-moi… (10)

 

(1) sur le Programme du CNR (Conseil National de la Résistance, 1945): http://jerpel.fr/spip.php?article63  ; http://jerpel.fr/spip.php?article194    (2) concernant la "réforme-régression" des retraites 2010,  nous ne comprenons pas que les Partis progressistes et les syndicats salariés puissent laisser dire, sans s’indigner ni dénoncer un mensonge d’Etat, que l’évolution démographique deviendra intenable pour le paiement des retraites au niveau actuel, car il n’y aura en 2040 que 1,5 actifs pour payer un retraité, contre 2,3 actifs pour un retraité en 2000. Les promoteurs de la "réforme" omettent  soigneusement de dire qu’en 2040, 1,5 actifs produiront autant que 2,8 actifs en 2000, en € constants !En effet, en 2000, 26,8 millions d’actifs ont produit un PIB de 1441 Milliards d’€ alors que, même avec une croissance très faible de 1,75 % par an en moyenne, 28,5 millions d’actifs produiront 2884 Milliards d’€ en 2040, en € constants (prévisions INSEE). Grace à la croissance et à la productivité du travail.L’arithmétique est donc limpide. En 2000, un actif  produisait 53 768 €. En 2040, il produira 101 192 €. Toujours en 2040, 1,5 actifs produiront donc 151 788 €, soit ( 151 788 / 53 768) l’équivalent de 2,8 actifs en 2000.En conséquence, le ratio "équivalent nombre d’actifs 2000 en valeur produite" pour un retraité évolue très favorablement, de 2,3 en 2000 à 2,8 en 2040. Ce n’est pas le nombre d’actifs qui compte mais la valeur qu’ils produisent. Il n’y a donc aucune difficulté pour financer les retraites sur la base 1993 (avant régressions programmées par les gouvernements néolibéraux), entre 2010 et 2040. A condition de répartir, avec plus d’équité, les fruits de la croissance par des cotisations sociales actualisées, indexées sur la production qui augmente (PIB et Valeur Ajoutée des entreprises) …et de réformer en profondeur, pour le clarifier et le simplifier, cette "usine à gaz" que constitue le système de retraite par répartition à la française (une quarantaine de régimes !) qui demeure cependant le  meilleur du monde. (3) PIB: Produit Intérieur Brut. 1441 Milliards d’€ en 2000, 1643 Milliards d’€ en 2008, soit + 1,65 %/an, puis chute à 1607Milliards d’€ en 2009, suite à la crise entièrement provoquée par la spéculation financière. (4) M€ = Milliards d’Euros, en valeur constante 2000.  (5) pour la croissance économique, la redistribution sociale est un "investissement formidable" (Maurice Kriegel-Valrimont: http://dsedh.free.fr/transcriptions/kriegel-valrimont103.htm) qui stimule la consommation, l’activité des entreprises et l’emploi, comme pendant "les 30 Glorieuses" françaises (1945-1975). (6) progressivement, les cotisations sociales employeurs liées aux salaires seraient supprimées et remplacées par la "cotisation sociale d’entreprise", proportionnelle à la Valeur Ajoutée produite. Cette déconnexion des salaires permettrait de réduire le coût de la main-d’œuvre de 30 %, pour favoriser l’emploi et la progression des salaires.Bien entendu, les salariés continueraient à payer leurs cotisations sociales "employé".Ce nouveau système reste à l’écart des impôts et taxes, pour conserver le principe de socialisation et de gestion paritaire des ressources sociales entre les syndicats de salariés et les patronats.  (7) Michel Husson, "Pas de problème de financement…" voir: http://hussonet.free.fr/finass.pdf  (8) en 23 ans, de 1983 à 2007, la part des salaires et cotisations sociales a baissé en France de 9 points dans la Valeur Ajoutée du secteur marchand, passant de 72,4 % à 63,5 % , ce qui représente au moins 150 Milliards d’Euros par an qui manquent à la population (85 pour les salaires et 65 en cotisations sociales).Au niveau de l’OCDE (15 pays dits développés), la part des salaires et cotisations sociales dans la valeur ajoutée des entreprises est passée de 67,3 % en 1981, à 57,4 %  en 2006 (source OCDE). (9) voir Frédéric Pierru  http://www.rue89.com/2008/06/09/comment-se-prepare-la-privatisation-de-la-secu . Aux USA, les dépenses de santé dépassent 15 % du PIB mais 43 millions d’Américains n’ont aucune protection sociale, car la santé est privatisée à 92 %, les 8 % restants étant "la charité publique".  (10) le détail du chiffrage peut être affiné mais cela  ne change rien à l’ordre des grandeurs et tendances.