Alors que la campagne fait rage, il n’est pas mauvais de prendre un peu de recul pour observer les débats d’un peu plus loin et avec un autre angle. En traversant la Manche par exemple.
English breakfast à Kensington. Pour moi ce sera café, croissant, journal, comme d’habitude. La campagne électorale française ne passionne guère. Dans les tabloïds du dimanche, on parle certes un peu de Sarkozy, en insistant surtout sur la montée en puissance de l’électorat des banlieues qui pourrait lui causer du tort. C’est maigre. Ici, le sujet du moment, c’est le témoignage à 200.000 pounds de la soldate britannique sur sa capture en Iran. Iran, Darfour, Chine : la valse des sujets de notre campagne délaisse les enjeux majeurs pour se focaliser sur les origines hongroises de Nicolas Sarkozy, sur la prétendue future amnistie de Chirac ou sur le pseudo CPE de Ségolène Royal. Rase campagne.
House of Parliament. Imposant. A côté, notre Assemblée Nationale semble bien petite. Bien sur, on a l’habitude chez nous aussi que les grandes institutions démocratiques et républicaines siègent derrière les dorures des anciens palais royaux mais le contraste est encore plus frappant ici. Mais il ne faut pas se tromper, la révolution est à l’intérieur. Tony Blair a plus changé la physionomie de la séculaire Chambre des Lords en dix ans que nous n’avons réussi à changer la poussiéreuse institution qu’est le Sénat en France. Le conservatisme n’est pas toujours là on l’on croit. Méfier vous des apparences.
Downing Street. Surprise de taille, le numéro 10 est inaccessible, bien caché derrière les façades solennelles des ministères. Très différent de ce que l’on a l’habitude de voir à la télé : ce n’est pas cette petite porte d’un immeuble en brique rouge dans une petite rue bucolique de Londres de laquelle on s’attend à voir surgir un Hugh Grant ou un Tony Blair avec un sourire de cinéma. Qui d’ailleurs pour succéder à Tony Blair ? Notez que depuis que j’ai parlé de Gordon Brown dans mon dernier article, les choses vont de plus en plus mal pour lui. Sur fonds de polémique à propos de la réforme du système de retraite anglais qui a laissé des milliers de retraités sur la paille, la succession semble se compliquer. Des initiatives internes au Labour se multiplient sur un air bien connu chez nous de « TSB », qui de ce côté ci du Channel ne signifie par « tout sauf Bayrou » mais « tout sauf Brown ». Gouverner est partout un art bien difficile.
Tate Modern. Remarquable. Pour la richesse et la répartition thématique et pédagogique des collections. Pour l’architecture du musée surtout : transformer une centrale électrique en musée d’art moderne avec à son sommet une immense baie vitrée qui s’ouvre sur la City. Tout un symbole. L’industrie qui s’efface de nos paysages, le défi de l’énergie, la force de l’art qui s’adapte au temps, la puissance de la finance et des services. Saisissant paysage de l’East end fait d’immeubles modernes à l’architecture audacieuse, des grues, beaucoup de grues, un immense chantier à ciel ouvert et, trônant au milieu, dominante malgré tout, Saint Paul’s Cathedral. Sur les fondations de nos civilisations, le monde change. Nos candidats s’en rendent-ils compte ?
merci …
vous avez raison de remettre les vrais sujets qui auraient du animer notre campagne … j’adore votre style, j’ai l’impression de me balader dans les rues de londres 🙂