Au cours des dernières années, nous avons fait donner des cours particuliers à notre fille qui éprouvait quelques problèmes scolaires en raison de difficultés passagères.

Nous pensions qu'il valait mieux faire un petit sacrifice financier  et payer  quelques heures de cours plutôt que de voir de petites lacunes se transformer en lagunes. Les études sont un investissement réalisé pour nos enfants.

Ces cours ont été dispensés par une étudiante et deux enseignants vacataires. Il s'agissait bien entendu de paiement de la main à la main. Nous n'avions pas d'autre choix compte tenu de l'absence d'autre offre. Cela ne nous dérangeait pas outre mesure car il ne s'agissait pas de sommes énormes. Ce n'était que quelques heures de temps à autres lorsque notre fille en ressentait le besoin.

Cette année, nous avons fait redonner quelques cours de français à notre fils. Il a eu la malchance d'avoir plusieurs années de suite des professeurs malades ou dépressifs.

Nous avons eu la surprise de trouver un enseignant autoentrepreneur. Il nous délivre des factures que nous réglons par chèques. Enseignant et autoentrepreneur. Quelle  surprise!

Nous avons discuté de ce principe avec lui. Il en est très satisfait car ce moyen lui permet "de mettre un peu de beurre" dans les épinards tout en restant dans la légalité. Nous avons été quant à nous très contents car notre fils a pu bénéficier de cours individualisés, dispensés lorsque nous le souhaitions (en fonction des disponibilités communes) et moins chers que ceux dispensés chez les spécialistes.

Nous avons été très surpris car nous pensions qu'il n'y avait des autoentrepreneurs que dans des spécialités bien définies telles que le bâtiment, l'entretien, la mécanique et le commerce.

Nous  connaissons quelques personnes qui se sont déclarées autoentrepreneur. En fait, elles l'ont fait pour régulariser leur situation. Avant elles faisaient quelques heures "au noir", dans la crainte de se faire dénoncer pour compenser la baisse de leur pouvoir d'achat, maintenant, elles le font sans crainte.

Cet enseignant nous a assuré que cette activité se développait rapidement  parmi les jeunes enseignants compte tenu du temps libre dont ils disposent mais aussi en raison de la faiblesse de leurs revenus en début de carrière. Difficultés augmentées par le fait que bien souvent, ils obtiennent leurs premiers postes loin de chez eux et qu'il leur faut se loger à des prix souvent élevés.

L'autoentreprise compte pourtant beaucoup de détracteurs.

A commencer par les artisans, les commerçants et les entreprises qui considèrent qu'il s'agit de concurrents dont les charges, les coûts sont inférieurs aux leurs.

L'argument le plus souvent cité dans le bâtiment est le manque de vérification des qualifications des intervenants et les risques encourus par les clients. Ces arguments me surprennent un peu lorsque je considère les problèmes que l'on rencontre pour trouver un artisan pour faire un travail ou quand on juge la qualité du travail réalisé par certains. Et puis, il ne faut pas oublier que bien souvent dans le bâtiment, les autoentrepreneurs sont des personnes qui exercent la même spécialité que celle qu'elles font durant leurs journées de travail.

L'opposition (à en juger par ce que j'ai entendu à la télévision)  considère que l'autoentreprise est une mauvaise chose car elle fragilise un peu plus le monde ouvrier et permettrait aux patrons de moins payer leurs employés puisse que ceux ci pourraient avoir des revenus supplémentaires autres. L'opposition est tout simplement dans son rôle d'opposition.

Le professeur qui a donné des cours à mon fils pense quant à lui que c'est tout simplement un moyen d'augmenter légalement ses revenus.

Nous avons un ami qui vient de s'installer en qualité d'autoentrepreneur . Il a choisi quant à lui la tonte de pelouse, l'entretient paysager et le nettoyage des tombes.  Il a de fortes convictions de gauche et ne s'en cache pas. Il est même syndiqué dans l'entreprise où il travaille.

Il considère qu'avec le statut d'autoentrepreneur, on lui a  donné le droit d'essayer de se mettre à son compte et de se libérer de la "dictature" de son patron.

Un syndicat ouvrier bien connu, par la voix de sa représentante a déclaré encore hier que l'autoentreprise allait devenir un moyen pour le patronat de récréer le travail à la tâche en proposant à des employés de quitter la "boite" pour se mettre à leur compte en leur promettant du travail. Ils pourraient ensuite faire baisser leurs charges en payant ces nouveaux sous-traitants toujours moins chers.

Un spécialiste "en je ne sais plus quoi" considère quant à lui que l'autoentreprise est une erreur car elle ne permettra pas à terme de faire face au grand défit qui est celui de la menace économique que représente la Chine. Il pense que le seul moyen de survivre est la course en avant technologique, la recherche, les technologies de pointes. Ce brave homme ne doit pas se rendre compte que tout le monde n'a pas les capacités de faire des études et qu'il y aura toujours des spécialités que l'on ne pourra pas délocaliser: l'aide aux personnes âgées, l'entretien de pelouse, l'entretien automobile, la rénovation de maison, la construction…

Il semble finalement que les seuls qui soient satisfaits de l'autoentreprise soient :

– Le gouvernement mais cela n'est pas une surprise car même si le principe n'avait pas fonctionné, il s'en serait félicité. Politique oblige!

– Les autoentrepreneurs et leurs clients.

Nous sommes clients d'un autoentrepreneur et nous sommes très satisfaits.