Le livre de Tidiane N'diaye ne manquera certainement pas de faire grand bruit. Son enquête historique, "Le génocide voilé", parait aux éditions Gallimard et évoque "LA TRAITE NEGRIÉRE ARABO-MUSULMANE du VIIème au XX ème siècle", dénonçant au passage une vision partiale de l'Histoire de l'esclavage en Afrique, car uniquement orientée sur le commerce occidental. Selon Tidiane N'diaye, cet aspect de l'esclavage n'apparaît pas dans les récits historiques habituels à cause d'une solidarité de correligionnaire en Afrique même, mais sans doute aussi pour des raisons politiques. "Un tel holocauste, explique-t-il, chose curieuse, très nombreux sont ceux qui souhaiteraient le voir recouvert à jamais du voile de l'oubli, souvent au nom d'une certaine solidarité religieuse voire politique."

Les conditions que décrit Tidiane N'Diaye sont absolument sinistre, du trajet dans le désert avec trop peu d'eau et trop peu de nourriture, jusqu'au marché d'esclaves dans les villes arabes, à la condition servile d'eunuque, pour laquelle était bien entendu castrés les hommes esclaves, qui mourrait à 70 ou 80% de ce supplice. Le travail forcé n'était pas absent non plus de cette condition. Partant il évoque les castrations, les avortements pratiqués sur les femmes, parle d'infanticide et explique bien que tout était fait pour que les esclaves africains ne fassent pas souche dans les sociétés arabes. De fait, si les descendants d'esclaves sont bien présents en Amérique, ils ont presque totalement disparus des sociétés arabes.

Quelques extraits du livre sont disponibles sur le site Point de Bascule  :
"Sous l'avancée arabe, (…) des millions d'Africains furent razziés, massacrés ou capturés, castrés et déportés vers le monde arabo-musulman. Cela dans des conditions inhumaines, par caravanes à travers le Sahara ou par mer, à partir des comptoirs à chair humaine de l'Afrique orientale."
(…)
"Stanley constata que dans certaines régions d'Afrique, après leur passage [des négriers arabo-musulmans], il ne subsistait guère plus de 1% de la population. Dans le Tanganyika, les images des horreurs de la traite étaient visibles partout. Nachtigal, qui ne connaissait pas encore la région, voulut s'avancer jusqu'au bord du lac. Mais, à la vue des nombreux cadavres semés le long du sentier, à moitié dévorés par les hyènes ou les oiseaux de proie, il recula d'épouvante.

Il demanda à un Arabe pourquoi les cadavres étaient si nombreux aux environs d'Oujiji et pourquoi on les laissait aussi près de la ville, au risque d'une infection générale. L'Arabe lui répondit sur un ton tout naturel, comme s'il se fût agi de la chose la plus simple du monde : « Autrefois, nous étions habitués à jeter en cet endroit les cadavres de nos esclaves morts et chaque nuit les hyènes venaient les emporter : mais, cette année, le nombre des morts a été si considérable que ces animaux ne suffisent plus à les dévorer. Ils se sont dégoûtés de la chair humaine. »"

 

Sur son blog, Tidiane N'Diaye développe déjà son propos et fatalement la traite occidentale et la traite orientale y sont comparés "Si la Traite atlantique a duré de 1660 à 1790 environ, les Arabo-musulmans ont razzié les peuples noirs du VIIème au XXème siècle. Du VIIème au XVIème siècle, pendant près de mille ans, ils ont été les seuls à pratiquer la traite négrière. Aussi, la stagnation démographique, les misères, la pauvreté et les retards de développement actuels du continent noir, ne sont pas le seul fait du commerce triangulaire, comme bien des personnes se l'imaginent, loin de là. De même que si des guerres tribales et de sanglantes représailles eurent lieu tout au long des siècles, entre tribus voire entre ethnies africaines, tout cela restait modeste à bien des égards, jusqu'à l'arrivée des « visiteurs » arabo-musulmans."

(…)

"L'une de ces « techniques de guerre » consistait à ceci : après avoir encerclé un village en pleine nuit, les guetteurs éliminés, un meneur poussait un cri afin que ses complices allument leurs torches. Les villageois surpris dans leur sommeil étaient mis hors d'état de se défendre, les hommes et les femmes âgées massacrées ; le reste était garrotté en vue du futur et long trajet. Ceux qui avaient réussi à s'enfuir étaient pourchassés par les molosses dressés à la chasse à l'homme. Il arrivait que des fugitifs se réfugient dans la savane, à laquelle les trafiquants mettaient le feu pour les débusquer. Ensuite pour les rescapés commençait la longue marche vers la côte ou l'Afrique du Nord, à travers le désert impitoyable. Les pertes estimées à environ 20 % du « cheptel », étaient inévitables."

 

Il est à noter que Tidiane N'Diaye n'est pas le seul à avoir écrit sur ce sujet. Malek Chebel a écrit récemment un autre livre qui l'évoque, estimant à 22 milions les esclaves de la traite musulmane, c'est à dire deux fois plus que la traite atlantique. Il revient également sur la traite des esclaves européens, notamment slaves, évoquant aussi trois ou plus codes musulmans sur les esclaves, codes analogues au fameux Code Noir. L'esclavage en islam a duré, selon Malek Chebel (qui n'est pas soupçonnable d'être partisan, étant musulman lui-même), XIV siècles, au nom du Coran explique-t-il, avant d'ajouter qu'il s'agit d'une lecture erronée du livre. Les deux auteurs sont d'accord pour dire que l'esclavage existe encore en Afrique, Malek Chebel parle même de marché clandestins, toujours en Afrique, toujours tenus par des musulmans.
Ces écrits rejoignent une certaine actualité française : en effet récemment Nicolas Sarkozy avait demandé dans un discours  à ce que l'Histoire de la traite occidentale soit enseigné à l'école primaire, laissant de côté la traite orientale, ce qui avait fait jaser, d'autant que dans les faits les enfants l'apprennent déjà. Mais si la France condamne la traite occidentale comme un crime contre l'humanité, en aucun cas elle ne fait mention de la traite orientale. Eric Zemmour, face à Taubira, rappelait quelques uns de ses propos : selon la femme politique, il ne faut pas revenir sur la traite orientale pour ne pas monter les jeunes arabes et les jeunes noirs les uns contre les autres, ce qui est pour le moins une vision idéologique et partiale de l'Histoire.
LE GENOCIDE VOILÉ  – Gallimard, Tidiane N'diaye
L'esclavage en terre d'Islam, 498 pages, Ed. Fayard Malke Chebel
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