Qui a eu cette idée folle?

Je ne peux m'empêcher d'écrire un mot un peu plus personnel sur l'idée saugrenue d'engager les enfants de CM2 à conserver la mémoire d'un des 11000 enfants juifs morts gazés durant la dernière guerre, idée lancée au cours du dîner annuel du crif par le Président lui-même, estimant ce jour-là que "Rien n'est plus intime que le nom et le prénom d'une personne, rien n'est plus émouvant pour un enfant que l'histoire d'un enfant de son âge." Ce qui signe bien l'aveu que l'opération consiste à manipuler des enfants dans leur sensibilité, sensibilité qui ne devrait pas jouer dans l'apprentissage de l'Histoire ainsi que le demande les historiens eux-même. Bien des articles de presse relatent des réticences à cette idée, craignant d'éventuels troubles psychologiques de cette charge trop lourde pour un enfant. D'autres se félicitent de l'initiative au nom du sacro-saint devoir de mémoire.

N'est-il pas pourtant consternant, au delà de cette idée somme toute assez sordide -que de mettre sur les épaules d'un jeune enfant le poids d'un autre, mort dans des conditions atroces- que personne ne s'offusque du rôle demandé à l'école primaire? L'école a normalement pour fonction d'enseigner aux enfants des choses utiles et pratiques, comme le bon usage du français, les mathématiques, les langues étrangères autant que possible et de leur permettre de pouvoir évoluer dans la vie en se débrouillant seul avec l'atout que constitue le savoir dans une tête bien faite. C'est d'ailleurs précisément ce qui est reproché à l'école de nos jours : tel ministre souhaitait revenir aux fondamentaux, c'est à dire lire (sic), écrire (resic) et compter (reresic!!!). Chaque année la "méthode Bosher" est littéralement dévalisée des rayons de la fnac par des parents inquiets de l'évolution de l'apprentissage de la lecture pour leurs enfants.
Mais la démagogie des hommes politiques les amène à user de toutes les possibilités qu'offre l'école pour faire entrer dans les têtes des plus jeunes enfants les principes moraux de notre époque : la lutte contre le racisme ou l'antisémitisme en est un exemple, mais petit à petit on tente de leur enseigner aussi que l'esclavagisme "ce n'est pas bien", que la colonisation c'est mal aussi et d'autres sermons viendront sans doute plus tard. Cette attitude revient à monter les petits enfants noirs contre les petits enfants blancs et les petits enfants maghrébins contre les petits enfants juifs, ici à cause des désaccords israélo-palestiniens, dans une surenchère de la victimisation. Cela ne date pas d'hier et personne ne s'en offusque : en effet quel sera l'idiot qui ira s'opposer à ce qu'on enseigne des grandes idées morales? Mais par là même, quel est l'imbécile qui ira prôner à ses enfants que la colonisation est une bonne chose et qu'il faut remettre le couvert, que le racisme est une vertu et que la détestation des juifs est salutaire???
Toute la question est là : est-ce bien le rôle de l'école que de s'occuper d'élever des enfants? Son rôle d'enseignement est déjà bien suffisamment important pour qu'elle n'aille pas empiéter sur le domaine des parents. Elle ne les remplace d'ailleurs pas à en croire les rapports sur l'école qui font état des difficultés à enseigner la shoa justement auprès des enfants d'immigrés, sensible aux évènement du proche-orient, des enfants maintenus par l'école elle-même dans une culture que leurs parents ont quitté. En effet les parents d'enfants suivant les cours de l'école primaire se voient proposer des cours différents, comprenant les langues et les cultures des pays d'origine, dans cet élan multiculturaliste idéaliste qui personnalise nos élites dorées. Pour ne pas faire de différence, on préfère donc compartimenter.
Et la série continue malheureusement avec le nouveau Président, qui pourtant s'était élevé contre la repentance, avec cette nouvelle idée. Il eut été plus judicieux peut-être de donner en exemple les villages entiers qui cachaient des juifs avec tous les risques que cela comportait. Car le devoir de mémoire ressemble de plus en plus à un concours : les descendants d'esclaves ne comprennent pas qu'il ne soit pas plus fait allusion au drame qu'ont vécu leurs ancêtres, les Vendéens réagissent par rapport au véritable génocide que la région a connu après la Révolution, etc, etc… Il serait peut-être temps de se réunir autour de grandes figures qui réuniraient toutes les composantes de la société, plutôt que de chercher, avec les meilleures intentions du monde, ce qui la morcelle en communautés.

4 réflexions sur « Qui a eu cette idée folle? »

  1. @ Blaise
    Blaise, mille excuse de répéter ce commentaire ici… Mais, cela me semble être tout à fait le sujet

    Je ne suis, ni enseignant, ni spécialiste de l’enfance et de l’adolescence, ni psychologue, ni parent d’élève, ni… tout simplement… père de famille…

    Cependant, j’aurai un avis partagé…

    Il convient d’enseigner la Shoah aux enfants en leur expliquant les responsabilités des Nazis et des dirigeants de l’Etat français !
    Mais, il convient également d’enseigner, à ces enfants, que d’autres : hommosexuels, tziganes, catholiques réfractaires au nazisme, gaullistes, socialistes militants, membres de minorités, furent, aux côtés des Juifs, victimes de cette épuration massive ordonnée par Adolf Hitler et ses complices…
    Il convient d’enseigner également, à ces enfants, que, plus tard à l’entrée de l’URSS dans le second conflit mondial aux côtés des Alliés, les communistes furent également victimes de cette épuration-là !

    Mais, n’oublions pas les autres génocides :

    – le génocide de 1915 perpétré par les Turcs à l’encontre des Arméniens,

    – les génocides commis au nom du Léninisme, du Salinisme, du Communisme,

    – les génocides perpétrés dans le conflit de l’Ex-Yougoslavie (par Milosevich…),

    – le génocide du Rwanda…

    Il s’agit de faire acte de Mémoire, ce, pour que tout ces génocides ne se reproduisent plus…
    Malheureusement, l’Histoire semblant être un éternel recommencement, il est à craindre d’autres génocides !

    Puis, peut-on demander, aux enfants de CM2, un acte de repentance ?
    Ne serait-il pas plus avisé de laisser les enseignants faire ce nécessaire devoir de mémoire ?
    A-t-on réellement besoin de l’Etat, d’une loi pour que ce nécesaire devoir de mémoire puisse se réaliser ?

    Puis, une question grave se pose dans cette polémique qui s’installe : les enfants, sont-ils prêts psychologiquement à « à prendre en charge » un enfant mort dans les camps nazis ?
    J’en doute…

    Quoiqu’il en soit, le Gouvernement devra se montrer très prudent en se penchant sur les éventuels problèmes psychologiques que ces enfants de CM2 devront supporter !

  2. Bonjour Dominique, j’ai déjà répondu sous l’autre article, mais juste une précision : je ne suis pas pour le devoir de mémoire systématique, qui est devenu un moyen de pression sur les peuples qui furent puissants. C’est d’ailleurs souvent très sélectif.

    Pour parler des allemands, qui sont un peuple que j’estime, et qui sont tout à fait traumatisés de la dernière guerre pour ce qu’ils ont fait, je suis convaincu que la génération d’aujourd’hui serait tout à fait incapable de faire ce que l’ancienne a fait. Et puis nous pourrions aussi parler de notre Révolution et de la Terreur qui a suivi, mais par idéologie personne ne le fait. Ce serait d’ailleurs grotesque tout comme ce l’est aujourd’hui, mais nous ne nous en rendons pas compte…

  3. @ Blaise
    Blaise, je suis tout à fait d’accord avec vous ! Puis, j’ose me lancer en estimant que nos Gouvernants veulent nous imposer, à coups de lois et de décrets, la Mémoire et la Repentance.

    Pour moi, le meilleur moyen de perpétuer la Mémoire, sans pour autant parler de Repentance, c’est de laisser les historiens, les chercheurs et les enseignants écrire l’Histoire en portant des analyses objectives sur des évènements passés…

    Ce dont j’ai peur, avec cette dernière lubie du Président Sarkozy, c’est qu’il risque d’y avoir une montée des communautarismes religieux et ethniques et un repli identitaire…

  4. BLAISE
    Je ferai bien, comme Dominique, et vous remettre le commentaire que je vous avais déjà mis sous l’article précédent, je n’y changerai pas un mot. Je vais juste répéter que je suis CONTRE cette initiative du Président de la République, pour les raisons que je donnais dans mon commentaire!!!!
    Cette idée « SAUGRENUE » du PARRAINAGE NOMINATIF, d’un enfant Juif, mort pendant la sinistre période de la Déportation est une abérration, qui va réveiller bien des HAINES!!!, dans une France ou le métissage (dans le bon sens du terme!)multiculturel, multireligieux est en plein « essort » (et c’est tant mieux) comment voulez vous que l’on parle d’intégration, et du respect de Chacun!!!
    BLAISE, votre mise au « point » courageuse vous HONORE, il est si facile de relater des faits, mais quand on y met un peu de son « AME » c’est LA que l’on voit le VRAI JOURNALISTE que vous êtes!! BRAVO, BRAVO, BRAVO!!!!

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