Réalisateur : Liza Johnson

Date de sortie : 20 juillet 2016

Pays : USA

Genre : Comédie, historique

Durée : 86 minutes

Budget : N.C

Casting : Michael Shannon (Elvis Presley), Kevin Spacey (Richard Nixon), Alex Pettyfer (Jerry Schilling), Johnny Knoxville (Sonny), Colin Hanks (Egil Krogh)

1970, Elvis Presley est l’icône la plus sacrée que la planète puisse accueillir, même le sol est honoré de pouvoir le supporter. Les Etats-Unis vont mal, ils sont en proie aux drogues, aux mouvements identitaires violents et à un esprit de contestation nourri par la guerre du Vietnam qui s’éternise, s’enlise et se meut en catastrophe. Ce contexte pousse la star du rock, inquiète vis à vis de la jeunesse, à vouloir se mobiliser. Le pays a besoin de lui, il le sait, il veut servir et pour mettre les choses en place, il sollicite un rendez-vous avec le président américain afin d’obtenir son appui et son accord.

Ce film n’est pas historique, il n’est basé que sur des spéculations et sur une photo montrant les deux hommes se serrant la main. Des rumeurs faisant du King un agent gouvernemental indépendant usant de son statut d’icône pour faire de la propagande antidrogue à destination des jeunes gauchistes et des hippies. Ce film court, plaisant et léger est une vrai bouffée d’air frais qui nous embarque dans une aventure cocasse. Durant la première moitié de l’histoire, le scénario est organisé autour d’une seule question : malgré ses efforts et ses arguments, le King va-t-il décrocher un entretien avec le locataire du Bureau Ovale, même si la réponse paraît évidente ? La suite découle de la réponse que nous garderons secrète pour ceux qui veulent voir le film. Afin de rendre cette hypothétique histoire plus crédible, des images d’archives sont insérées lors des transitions entre les différentes séquences. Nous sommes pleinement au début des années 1970, le décorum est là. Le tout est rythmé comme un documentaire ou une enquête, avec dates et lieux s’affichant en bas de l’écran. Tout en restant minimaliste, peu de décors, peu d’acteurs et une courte durée, ils évoquent des lieux prestigieux (Graceland et la Maison Blanche), met à l’écran des acteurs renommés (Shannon, Spacey et Hanks) et profite d’un timing idéal pour offrir un sujet bien mené.

Un gros travail de documentation a été fait en amont du film, notamment sur Elvis Presley. On y apprend qu’il est ceinture noire de karaté, pratique le taekwondo, est shérif de son comté, semble être un défenseur du droit du port d’arme (il en a toujours caché dans sa veste et sa chaussette) et est pétri de religiosité et d’altruisme. Il paraît dans Elvis et Nixon comme un doux dingue, grand enfant susceptible. Il veut à tout prix son badge d’agent spécial, prend la mouche et quitte la pièce quand le directeur de la lutte anti-drogue lui conseille d’acheter une réplique parfaite dans un magasin dont les jeunes raffolent. Même s’il s’agit d’une fiction, on peut se rendre compte, dans une certaine proportion, l’aura exceptionnelle que dégageait la star, réussissant à mettre dans sa poche femmes, hommes et enfants. Il se dégage de lui une certaine forme de messianisme. Le Christ en costume excentrique reproduit de nombreuse fois un geste étrange, une pseudo croix comme s’il bénissait ses ouailles avant de quitter une pièce. Il se permet même d’aller manger des donuts et de griller la politesse à un client dans un café chaud tenu par les Black Panthers. Cette interprétation ne serait rien sans le talent de Michael Shannon, plus habitué aux drames qu’à la comédie, qui, même si la ressemblance physique n’est pas flagrante, porte les chemises col pelle à tarte, la cape, les lunettes siglées et la ceinture tape à l’oeil de façon convaincante. Au final la fusion est parfaite.

A ses côtés, l’autre partie du titre, Nixon sous les traits de Kevin Spacey. Après 4 saisons à briguer le mandat présidentiel dans House of Cards, il occupe ici le siège suprême. Aigri, austère, bougon, peu enclin à l’amusement, avec Elvis c’est le choc. Deux mondes a priori opposé, mais qui se révèlent bien proche. Progressivement, le film distille un côté humain à ce bloc peu sympathique. Il a ses petites manies, des M&M’s, du Dr Peppers, ses siestes après déjeuner et se révèle être un papa poule. Les deux hommes se retrouvent dans un esprit réactionnaire partagé. Le casting est complété par des personnages secondaires drôles et attachants, à l’image de Dwight et d’Egil, les deux hommes du président chargés de préparer la rencontre tant attendue. Puis il y a l’ami d’Elvis, celui dont l’utilité scénaristique se limite à montrer que derrière tous ces atours, Presley est un homme et non plus un personnage. Cet ami reste moins intéressant, moins drôle et affublé d’une love story peu passionnante. Elvis et Nixon est un film singulier racontant une parenthèse dans le destin de ces deux hommes, une parenthèse imaginée mais probable.