Réalisateur : Dan Trachtenberg
Date de sortie : 16 mars 2016
Pays : USA
Genre : Thriller, SF
Durée : 103 minutes
Budget : 5 millions de dollars

Casting : Mary Elizabeth Winstead (Michelle), John Goodman (Howard), John Gallagher Jr (Emmet)

Michelle, jeune femme d’une vingtaine d’années, fuit son appartement avec des regrets, en fracas, mais à quoi veut-elle échapper ? Sur une petite route de campagne, il faut nuit, Michelle est fatiguée par les nombreuses heures de conduite, une voiture la dépasse et … c’est l’accident. A son réveil, elle se retrouve attachée au mur d’une chambre en béton austère. Son ravisseur, Edward, prétend être son sauveur car dehors la fin du monde est arrivée, l’air est devenu irrespirable depuis qu’une étrange attaque est survenue. Doit-elle le croire ? Faut-il se méfier de cet homme ? Une cohabitation forcée et une relation de confiance doit se construire tant bien que mal.

Attention claustrophobes, ce film n’est pas fait pour vous, il pourrait vous procurer des sueurs froides, des sensations fortes, des malaises et une envie frénétique de sortir de la salle. Ce qui est dommage car le film est un passionnant et inquiétant huis clos où le doute est permanent. L’imposant John Goodman possède une figure paradoxale, aussi bien physiquement que psychologiquement. Avec son allure de nounours bienveillant, on pourrait lui prêter nos enfants sans aucun problème, mais voilà le contexte joue en sa défaveur. C’est qu’Edward montre des signes de défaillance, des accès de colère incompréhensibles, des explications confuses sur certaines interrogations, une personne double comme on les aime dans ce genre de film. 10 Cloverfield Lane est brillant pour ce genre de chose, il sait malmener le spectateur. Dès que la confiance s’installe, que les trois résidents jouent et dînent en musique, qu’une forme de cohésion s’établit un petit élément vient tout chambouler et remettre les certitudes en question. Un puzzle, comme le génial chat avec un tuba dans un aquarium, que l’on est train de reconstituer mais où il manque bizarrement des pièces et, encore plus surprenant, d’autres ne conviennent pas. Déconcertant ! A l’instar de l’ambiance qui monte en intensité, où les regards sont noirs et les paroles acérées mais toute cette tension éclate comme un ballon grâce à l’humour dont le film est truffé (rideau de douche canard, puzzle). La musique suit également cette tendance, tantôt angoissante tantôt pop et entraînante, elle accentue la nature du film.

Plus l’histoire avance et plus une étrange impression jaillit, le personnage principal n’est pas Michelle ou Edward, mais il s’agit du bunker en question. Il est à l’image de son propriétaire, rassurant par cet idéal de salon familial reconstitué avec sa télévision, ses canapés, la collection de films, de livres, de jeux, de magazines féminins et de cd, sa cuisine tout équipée et son garde manger, mais flippant car verrouillé de partout et tributaire du système de filtration d’air.

Si un oeil interrogateur se penchait sur le fond de l’histoire, il serait aisé d’en faire une métaphore de l’Amérique. Un pays au demeurant sécurisant mais fermé sur lui même. Un pays gouverné par des personnes aux cheveux grisonnants hantés par des peurs classiques voire archaïques (invasion de russes, d’étrangers fanatiques voire même de martiens). Une frayeur de l’étranger qui autorise l’armement des civils. Un pays où les jeunes sont pleins de doutes, où leur avenir parait sombre et plein de remords, obligés de vivre avec et de rentrer dans le moule pour gagner de l’argent. Emmet en livre un brillant exemple dans sa confession à Michelle. Le film permet également une introspection sur la confiance, qui faut-il croire ? Doit-on avoir des doutes sur ceux qui agissent pour notre « bien »? Qui sont les « sauveurs » et d’où vient le danger ? Plusieurs questions abordées ici sans réellement avoir de réponse.

10 Cloverfield Lane met à l’honneur les femmes en la personne de Michelle. Mary Elizabeth Winstead est une vraie femme forte, débrouillarde, curieuse et ingénieuse, frôlant parfois l’absurde. Elle réussit à cacher ses faiblesses, ses peurs qu’elle fuit, pour parvenir à ses fins. Petite référence à Die Hard, sans doute pas voulue, car elle est la fille du couillu John Mac Lane et dans cette histoire, elle s’est retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment. La scène finale très ramboesque répond à plusieurs questions mais en fait apparaître des nouvelles. On est toujours aussi perdu dans cet univers rempli de mystères comme J.J Abrams les aime.