De manière générale, on peut relier l'évolution d'un phénotype (le caractère présenté) à celle du génotype. Cette correspondance s'applique aussi pour la vitesse d'évolution. Chez l'homme, l'organe qui a évolué le plus rapidement est le cerveau. On s'attend donc à ce que les gènes exprimés dans le cerveau aient eu une évolution aussi rapide. Une étude de Wang et coll., qui paraîtra dans le PLoS de février, apporte des nuances à nos belles certitudes.

En comparant l'évolution des gènes exprimés dans le cerveau à celle des housekeeping genes[1], l'équipe de Wang a mis en évidence que leur évolution était très lente chez les mammifères. Ce qui est en contradiction apparente avec notre idée de départ.

L'équipe de Wang a donc mis en place des tests entre différentes espèces (Souris vs. Singe africain vs. Homme, et Singe africain vs. Chimpanzé vs. Homme), pour affiner la compréhension du phénomène. Ce qui ressort de ces tests est assez surprenant (que dis-je, émerveillant!). L'évolution est de plus en plus rapide au cours de l'évolution, sur l'ensemble du génome. En clair, notre évolution, au niveau moléculaire, est plus rapide que celle de la souris.

En revanche, pour les gènes exprimés dans le cerveau, cette vitesse d'évolution est au mieux égale, souvent inférieure à la moyenne génomique. Et même dans les gènes exprimés dans le cerveau, il y a des différences. Tout d'abord, les gènes cerveau-spécifiques ont une évolution plus lente que les gènes exprimés dans le cerveau, et dans d'autres tissus (comme le rein, par exemple). Mais les gènes dont le produit est impliqué dans le transport des électrons ont eu une évolution inhabituellement rapide.

Autre trouvaille : à l'intérieur du gène, les éléments n'évoluent pas à la même vitesse. Alors que les séquences codantes évoluent lentement, les séquences régulatrices (c'est à dire celles qui vont déterminer quel gène sera exprimé, ou et quand, en présence ou en absence de quoi, etc…) ont eu une évolution rapide. Alors, notre cerveau, une super machine de guerre pleine de choses compliquées, ou des éléments simples agencés de manière élégante (je vous laisse deviner ma solution préférée…)

Et pour finir, puisque nous en sommes rendus à parler de cerveau, pourquoi ne pas lire le billet de Matthieu sur le libre-arbitre?

S'il vous reste un peu de temps, consacrez le sans hésiter à la lecture de l'essai Balancing Robustness and Evolvability, de Lenski, Barrik et Ofria. Trois petites pages, et c'est bien écrit, vous auriez tort de vous en priver!

Notes

[1] Les gènes dits de ménage sont ceux qui tiennent la maison, et qui sont exprimés dans toutes les cellules, indépendamment des conditions. Par exemple, les composants du cytosquelette