Je sais, je sais : « nouvelle », dans le titre est abusif. De plus, je n'ai pas testé pour vous cette parisienne boutique japonaise de livres, CD et DVD d'occasion. Et pour tout vous avouer, j'ignorais jusqu'à l'existence des deux autres boutiques de cette chaîne japonaise à Paris. En revanche, vendre des bouquins, je connais. Et ce qui vaut pour Paris vaut aussi pour d'autres villes.

Amusant, ce « dossier » du Figaro vu sur le site du quotidien : « Négocier un meilleur salaire, malgré la conjoncture… ». Avec ce chapeau rigolo : « C'est la crise, mais ce n'est pas pour autant le moment de vous contenter de ce que votre patron vous offre… ». On s'attendrait à ce que l'on vous conseille de placer des bonbonnes de gaz sous les machines et de négocier aprement quelques dizaines de lei par mois pour votre nouveau boulot en Roumanie. Mais non, vous avez bien lu : il s'agit d'obtenir plus et mieux à l'embauche, ou d'arracher une augmentation.

En fait, vous êtes plutôt sans boulot pour le moment et prêt à accepter jusqu'au tiers de votre salaire antérieur. Et comme un peu tout le monde, vous pensez à vendre vos bouquins. En commençant par les albums de BD, ce qui s'écoule le mieux. Effectivement. La plupart des librairies spécialisées BD pratiquant la vente d'occasions reprendront vos albums. Tentez de ne pas vous précipiter, d'observer un ou deux samedis de suite s'il y a des clients réguliers. Proposez-leur de venir voir votre bibliothèque BD. Et fourguez le reste ensuite.

J'ai encore, dans la librairie d'occasions et d'anciens de la rue Bressigny à Angers, quelques bouquins qui ne me seront jamais payés. Ils étaient en dépôt-vente et lors de mon dernier passage, la propriétaire m'a rappelé qu'il faut venir vérifier les ventes dans un délai d'un an. Passé ce délai, elle ne répond plus de rien. Je n'ai pas été vérifié si ses conditions de vente étaient léonines ou légales, ou si elle venait de les inventer ad hoc. Toujours est-il que, pour l'ancien, tentez de voir en ligne ce que vaut votre précieux bouquin. Peut-être était-il dans la bibliothèque d'un personnage célèbre dont les héritiers dispersent le fonds lors d'une vente aux enchères. La mise à prix sera un bon indicateur. Pour les vieux dictionnaires, et même la récente édition de l'Encyclopédiæ Universalis, ne vous faites pas d'illusion… Ce n'est en aucun cas des denrées recherchées par les libraires d'anciens, sauf s'ils sont vraiment anciens et très spécialisés.

Reste la vente du tout venant. Déjà, les CD, même musicaux, s'écoulent très mal. N'en attendez pas grand'chose. Pour les DVD, c'est un peu mieux. Et pour les bouquins, vous avez plusieurs cas de figure.

Les Parisiens connaissent bien les deux sites Gibert Jeune (bd Bonne-Nouvelle et Saint-Michel), le point de revente de Gibert Joseph, et les bouquinistes situés, bd Saint-Michel, entre les deux Gibert. C'est là que les journalistes, spécialisés ou non, fourguent d'abord les livres récents qui ne portent pas la mention « service de presse » ou « interdit à la revente ». Un manuel récent, s'il n'est pas déjà trop présent dans les rayons, se revendra bien. Tout dépend de l'état des stocks. Vous pouvez tenter de nouveau votre chance plus tard, mais, attention, car un manuel d'informatique devient rapidement obsolète. Le parcours idéal, à Paris, consiste à faire la queue chez Gibert Jeune, puis de tenter Gibert Joseph. Là, sachez que les manuels munis de CD (devenus rares, les exemples et exercices sont de plus en plus souvent disponibles en ligne) ne seront pas repris.

La tentation est grande, tant vous êtes chargé de nanars, de les déposer dans les boîtes réservées à cet effet chez les deux Gibert. Grossière erreur. D'une part, vous pouvez tenter de les brader pour dix ou vingt centimes d'euro chez les soldeurs situés entre ces deux magasins. D'autre part, rien ne vous interdit de tenter les bouquinistes des quais. Certains solliciteurs d'invendus le font, s'offrant de vous débarrasser de votre charge. Ils filent ensuite chez ces bouquinistes en espérant avoir, dans le lot, un truc qui sera repris un ou deux euros. N'y croyez pas trop, mais, sait-on jamais ? Et si vous avez du courage, conservez les refusés en vue du prochain déballage de quartier, pour la brocante d'un quelconque village par exemple. Ce qui suppose de disposer d'un véhicule. Réfléchissez : le produit de la vente couvrira-t-il les dépenses en carburant ?

Fin juin, me promenant faubourg Saint-Antoine, entre les deux bouches de la station Ledru-Rollin, j'ai reçu d'une jeune japonaise une pochette de mouchoirs en papier ornée  d'une réclame pour la librairie Book Off et mentionnant son ouverture en juillet 2009. C'était aussi un coupon valant un euro de réduction pour tout achat d'une valeur égale ou supérieure à deux euros. Or donc, je n'ai pas testé, mais je me doute que si le prix du livre d'occasion débute à deux euros, c'est que la reprise s'effectue à un prix au moins inférieur à la moitié de celui affiché. Et en cherchant en ligne, j'ai vu que les livres sont repris généralement entre quelques dizaines de centimes et un ou deux euros. Cela vaut-il d'élargir votre périmètre et de claquer un ticket de métro pour venir de Saint-Michel à Bastille ? À vous de voir. Mon conseil, que j'appliquerai à moi-même : prendre quelques livres, un Vélib, et faire un premier essai sur un échantillon restreint pas trop lourd à trimballer.

Comme le manifeste la capture d'écran ci-dessus, il y a désormais trois boutiques Book Off à Paris. Et la chaîne japonaise dit ambitionner de s'étendre en région parisienne… En fait, l'une des librairies du quartier de l'Opéra est un établissement vendant surtout des livres neufs (mangas, mais pas seulement, bien au contraire) rédigés en japonais ou traitant du Japon et des Japonaises et Japonais. L'autre, tout comme celle du faubourg Saint-Antoine, reprend des livres déjà lus. La reprise, comme partout ailleurs, dépend de l'état des stocks (inutile de s'encombrer si tôt d'une quarantaine d'exemplaires d'un livre très couru : les remises ne sont pas extensibles.).

L'état du livre entre bien sûr en ligne de compte. Une dédicace de l'auteur sera prisée… si l'auteur était vraiment célèbre et décédé de longue date. En fait, on prise surtout l'exemplaire pouvant être offert sans rougir. Donc, pas d'empreintes digitales, de pages froissées, de notes dans les marges (sauf dessin de Picasso, par exemple, mais là, allez plutôt à l'hôtel Drouot ou chez un commissaire priseur). Perso, je recherche tous les bouquins portant une dédicace du genre « Pour Carlita, affriolante sirène aux pratiques inventives et aux charmes inépuisables, ton Lolo… ».

Mais je doute fort que la Première dame fourgue les bouquins que lui offrit Laurent Fabius dans les poubelles du métro. L'album vinyle « à la langue rouge » dédicacé par Mick Jagger à Carla Bruni-Sarkozy ne se trouve sans doute pas chez Book Off. Mais sait-on jamais ? Un simple « hommage de l'auteur absent de Paris » signé de Michael Jackson, s'il en était, vaut la peine d'être cherché en feuilletant les pages de garde des livres d'occasion. Ne rêvez pas : je n'en ai jamais trouvé de tel, mais des dédicaces d'auteurs quasi oubliés ou pratiquement inconnus, si. Et fort nombreuses. Et ce genre de découverte, même si elle n'est aucunement lucrative, vous fera mieux apprécier votre visite.

Et pour le « solde », celui dont personne ne veut, pensez à donner. Donnez à la bibliothèque d'un quartier, d'un village, d'un hôpital (téléphonez d'abord si vous pouvez, car certaines structures de ce genre débordent de livres dont elles ne savent plus que faire). Donnez à des associations (Bibliothèques sans frontières, par exemple, mais il en est d'autres, facilement trouvables en ligne). Vous pouvez aussi déposer sur un banc public, proposer à un charmant piéton ou une jolie passante. Bref, faites de la place dans vos rayons car, en ces temps de crise, la lecture reste une activité passionnante, et pas que sur C4N. Et vos rayons risquent fort de se regarnir… avec des livres donnés ou trouvés à proximité des lieux de revente.