Urei Kinen’bi

La formule est peut-être mal écrite, ne respectant pas les règles de la grammaire japonaise, mais l’idée est là. Un triste anniversaire que ce  11 mars 2012. Il y a un an jour pour jour, un peu plus de 14 heures, heure locale, 6h du matin chez nous, les forces de la Nature Vengeresse, voire Carnassière comme les japonais les perçoivent, ont déployées toute leur ire sur les côtes est du pays.

Le 10 mars 2011, Fukushima était encore une petite ville maritime, très loin des projecteurs, les habitants vaquaient à leur occupation quotidienne, personne à travers le monde ne connaissait son nom. Le soleil s’est couché puis un nouveau jour a commencé, une catastrophe a tout bouleversé. La terre a secoué, l’eau s’est infiltrée sur des milliers de kilomètres et des vies se sont envolées. Une centrale nucléaire a failli exploser et un hiver nucléaire être engendré.

Des mois durant, un élan de générosité et des journalistes par milliers ont déferlé sur le pays. Le monde entier a admiré la réaction de ce peuple fier qui a accepté la souffrance en silence. Un an a passé, l’heure des célébrations et des commémorations a sonné. Les dégâts restent considérables, on compte plus de 19000 morts et de nombreuses autres victimes sont toujours portées disparues. La peur est encore palpable et les tokyoïtes vivent dans la crainte du « Big One », le séisme ultime qui anéantira l’ensemble de l’archipel. Une crainte constante poussant des milliers de catastrophistes à se constituer un pack de survie. On ne sait jamais, au cas où. Un sac que l’on sera bien content d’avoir avec soi quand tous les magasins seront vidés par des survivants redevenus des animaux animés par leur instincts primaires. Une trousse de premiers secours, une lampe torche avec des piles, des conserves, des bouteilles d’eau, etc. Des petits malins ont senti le bon filon et ont décidé de se faire de l’argent en exploitant la peur. Le fabriquant Cosmopower a sorti une sorte de ballon gonflable jaune fluo pouvait accueillir 4 personnes. Un asile provisoire où l’on se réfugie en attendant que la crise se passe.

 

Selon les scientifiques, les (mal)chances qu’il se produise dans les 30 prochaines années est de 70%. Un chiffre qu’il faut prendre avec des pincettes car la géologie est une science mobile et les résultats fluctuent en fonction de la planète.

 

S’il avait lieu, il pourrait faire 11000 victimes et ravager plus de 850000 immeubles. Tokyo est une ville située sur une zone à risque où convergent 4 plaques tectoniques : Eurasiatique, Nord-Américaine, Pacifique et Philippines. Une zone à risque où le sol a déjà tremblé par le passé. 1923, terrible traumatisme pour l’empire du Soleil Levant, un tremblement de terre,  de 7.9 sur l’échelle de Richter, emporte avec lui 105000 âmes. Le Japon est blessé dans son orgueil et doit se tourner vers l’aide internationale pour survivre.

 

Les décennies ont passé ponctuées par de maintes secousses et des répliques de faible ampleur berçant la vie des habitants. Cependant à chacune d’entre elles, c’est le spectre de l’épisode de Fukushima qui réapparaît. Le sol se fissure, les murs aussi et les étagères se vident de leur contenu.

 

Malgré les meilleures normes antisismiques au monde, beaucoup de nippons migrent vers des habitations à l’intérieur des terres, jugées plus solides. Le risque de séisme est ancré dans l’éducation des jeunes, dès leur plus tendre enfance, ils apprennent les gestes qui pourraient sauver leur vie mais aussi celle des autres.

 

Un second problème de taille continue d’inquiéter les japonais. Il s’agit de la contamination des sols suite aux déboires de la centrale nucléaire. Des milliers de kilomètres carrés d’exploitations sont perdus pour des dizaines d’années. Des villages entiers ont été désertés, il n’y réside plus que des animaux abandonnés. Afin de laver ses terres impures, des centaines ouvriers et de pelleteuses œuvrent jours et nuits à décaper les lieux. L’opération porterait ses fruits et la radioactivité aurait baissée de 50%. Mais que faire des déchets stagnant à la vue de tous dans les rues et continuant d’émettre des mauvaises radiations ?

 

365 jours plus tard, le Japon a réussi malgré tout à se remettre debout. Un grand travail sur soi a été fait, des mesures économiques et écologiques ont été instituées et c’est avec une obéissance traditionnelle qu’ils s’y sont pliées. Un travail de groupe nécessaire, car c’est dans l’unité que l’on peut vaincre de l’adversité.