ce que l’on nous cache.

 

Je viens de consulter un blog du Monde.fr le «Bug Brother» qui nous montre que la France refoule 12 % des artistes Africains, voir ici .

Ancien Inspecteur général de l’Education nationale, troisième secrétaire général de la Confemen, la «Conférence des ministres de l’Éducation des pays ayant en partage le Français», la plus ancienne des institutions francophones, créée en 1960, de 1989 à 1993, Fadel Dia, 71 ans, voir son blog «le droit à la France», est Sénégalais, et écrivain, auteur de deux romans, dont «Mon village aux temps des Blancs», publié chez l’Harmattan, et un essai, «A mes chers parents gaulois», ou «La France et l’Afrique passées au crible du regard d’un ancien colonisé» :

Je suis un enfant de la colonisation, j’ai fréquenté les bancs de l’école coloniale, j’ai appris que mes ancêtres étaient des Gaulois, et on m’a initié à Chateaubriand.

Tout au long de ma carrière d’enseignant et de haut fonctionnaire, j’ai été amené à côtoyer des officiels Français aux yeux desquels je ne suis jamais resté qu’un sous-fifre.

Quand on lit ces deux phrases on ne peut s’empêcher d’avoir un pincement de cœur, comment faire admettre à ces hommes de couleur que les blancs sont leurs ancêtres ? Décidément nous ne reculions devant rien et l’on se demande comment des instituteurs pouvaient tenir de tels propos à ces élèves tous noirs. Bien sûr, c’est une interprétation, je n’étais pas en classe avec Fadel Dia, mais rien ne m’étonne plus d’autant que je ne vois pas comment pouvaient-ils enseigner l’histoire autrement qu’en assimilant ces enfants à des Français d’origine. De plus après les avoir colonisés nous ne reconnaissions pas en eux la qualité de Français à part entière puisque Fadel Dia, bien que haut fonctionnaire, estime avoir toujours été un sous-fifre, mais peut-être qu’il se faisait des illusions, nous obtenons tous notre bâton de maréchal quelque soit notre couleur de peau.

D’ailleurs un président de la république est un sous-fifre des Français ; il n’y pas lieu d’en avoir honte

Quoique qu’il en soit, il ne serait pas étonnant que pour un pays qui se fait le champion des droits de l’homme et du citoyen, que des officiels agissent de la sorte. Ces droits, que je tiens à rappeler sont pour les premiers des 30 articles, 

article 1,
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité,

article 2
1. Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
2. De plus, il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle, non autonome ou soumis à une limitation quelconque de souveraineté, la suite ici .

Il est évident que ces droits sont constamment bafoués quand on regarde l’étendue de notre misère et pas seulement entre blancs et noirs, nous expulsons à tour de bras et parfois sans ménagement les clandestins sur notre sol et qui y ont cherché un salut en venant chez nous. On ne quitte pas son pays sans regrets et un pincement de cœur. Nous ne donnons pas à tous, Français, un logement digne ou l’on peut vivre décemment.

On ne peut accepter toute la misère du monde à dit Rocard, c’est du bon sens, mais dans ce cas, rien d’étonnant que des artistes noirs et bien d’autres soient refoulés.

Bug Brohers fait un parallèle avec les enfants de Tchernobyl venant se faire soigner en France qui étaient bloqués à la frontière à cause de la nouvelle procédure administrative concernant l’obtention de visas biométriques. L’Association les enfants de Tchernobyl accueille chaque année environ 200 enfants qui passent, pour la plupart, 3 semaines de vacances en Alsace et dans les départements limitrophes (70, 88, 90). Ces enfants sont issus de familles défavorisées et habitent les régions d’Ukraine et de Russie, touchées par les retombées de la catastrophe…Voir l’Association ici.

Les enfants de Tchernobyl.

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Ce fait n’est pas nouveau, il était logique de penser que cette sécurité biométrique induirait des difficultés pour l’entrée dans notre pays. Comment lutter contre l’immigration clandestine contre la criminalité et le terrorisme, il était donc indispensable de recourir à cette sécurité, sachant que complémentaire à la sécurité du territoire, elle ne peut être parfaite. Malgré cela, d’autres pays y ont recours comme les pays maghrébins. Cette contrainte à bien entendu des conséquences, on ne peut rentrer aisément en France sans se prévaloir des conditions d’identité nécessaires.

Je suis en droit de penser que ce n’est peut être pas, par ce qu’ils sont noirs, qu’ils ont été refoulés, pourquoi le seraient-ils, la couleur de peau n’a rien à voir avec les conditions de délivrance d’un passeport biométrique. Il faudrait s’interroger sur l’identité de ces artistes.

Fadel Dia développe sur son blog le parcours du combattant qu’il a subit pour ne pas avoir eu le visa :

Le consulat et ses «coxeurs». Coxeur est un terme associé aux transports au Sénégal, tout voyageur qui débarque à Dakar, est frappé par la diversité des modes de transports et par les acteurs qui s’adonnent à cette activité. Les Coxeurs seraient considérés comme des parasites profiteurs de l’activité transport, voir ici .

La méthode est connue et repose sur la délocalisation des tâches subalternes. Vous achetez donc, à la banque, un code téléphonique (c’est votre premier investissement sans garantie de succès), déclinez votre identité, exposez les motifs de votre demande et les contraintes de votre déplacement. Une voix neutre et standardisée vous fixe un rendez-vous, c’est un mois et demi… Après la tenue de la rencontre à laquelle vous étiez convié ! Vous marquez votre étonnement ? «Oui, je vous ai bien compris mais je n’ai que ça pour le moment. Appelez de temps en temps, achetez une 2e, voire une 3e carte. Je prends note, mais nous ne sommes pas le Consulat !». C’est bien vrai, ils n’en sont que les «coxeurs», vous n’avez jamais le même interlocuteur et une fois sur deux, on vous assure que tous les opérateurs étant occupés, il vous faudra rappeler. Et puis quelle idée de voyager à cette période, c’est l’été monsieur, le consulat et toute la France sont en vacances et vous êtes trop nombreux à vouloir partir ! Français qui nous invitez, faites-le en hiver, quand il gèle et qu’il neige et non en été quand votre pays est en fête ! Cela m’a coûté prés de … 200 000 F, 365 €, de ne pas avoir eu le visa ! «Mais monsieur, on ne vous a pas refusé de visa, le consulat n’a même pas pris connaissance de votre dossier !». C’est bien le piège des mots, puisque le résultat est le même. «immigration choisie», certes mais par qui ?

Il est évident que les consignes sont de rendre difficile la venue en France qui n’est plus une «terre d’accueil», en fait devant la misère du monde on ferme notre porte on ne veut pas voir.

Alors, on éjecte ceux qui sont encore sur notre sol et la situation des migrants de Calais aux «doigts brulés» en est un exemple, voir Le Monde dipomatique ici.

Le fait est peu documenté. Et pourtant. En août 2008, Julie Rebouillat, du collectif de photo-reporters Contre-faits, publiait cette photographie,

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Photo : Julie Rebouillat, Contre-Faits (CC).

«Continuellement, précisait la légende, un feu est gardé allumé. Il permet de chauffer l’eau (pour le thé, la lessive ou la toilette), mais également d’y faire brûler des barres en fer avec lesquelles les migrants se mutilent le bout des doigts pour effacer leurs empreintes digitales».

Toujours en 2008, Nathalie Loubeyre et Joël Labat réalisaient un documentaire, No comment (Grand prix du documentaire au Festival international du film des droits de l’homme en 2009). Deux séquences montrent comment des migrants se mutilent les doigts, au fer rouge, et au papier de verre.

Le Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire vient de reconnaître que ses services, en 2008, ont refusé l’entrée à 12% des artistes Africains invités à venir se produire en France.

Les visas de court séjour sont le plus souvent délivrés en quelques jours ouvrés, sauf ceux qui doivent faire l’objet de consultations préalables des autorités Françaises ou des pays partenaires Schengen. (…). Au plan statistique, il apparaît que, en 2008, 2 238 visas de court séjour ont été délivrés à des artistes ressortissants des pays d’Afrique, sur les 2 536 demandés, soit un taux d’accord de près de 90 %. 2 238 visas accordés pour 2 536 visas demandés, soit 88,25% de visas accordés, ou 11,75% des visas refusés, et 298 des artistes africains invités à se produire en France mais refoulés l’an passé.

Le refus d’entrer a ces artistes Sénégalais est probablement l’arbre qui cache la forêt, combien sont ceux qui ne peuvent plus venir en France, et qui probablement ont de la famille qui y vit. La misère des uns engendre la misère des autres, mais que faire ? Nous ne pouvons accueillir tout le monde, nous avons notre propre misère sans que celle des autres vienne nous compliquer la tâche. Nos mesures ne sont pas parfaites et sans reproche mais elles sont nécessaires c’est une évidence même si elles sont génératrices de douleur.

Par contre, le zèle de certains Agents jouissant d’une certaine autorité pour se faire bien voir de leurs supérieurs est condamnable, s’il conduit par leur inertie, rejet, malveillance, à des difficultés pour l’entrée des personnes de couleur dans notre pays. Mais dans ces conditions, comment agir pour faire reconnaître son droit à venir en France dans le respect de nos lois ? Tout faire pour lutter contre l’immigration clandestine oui, mais aussi permettre à ceux qui le désirent et quelque soit la couleur de leur peau de venir dans notre pays, qui a toujours été une terre d’accueil.