Mardi, chrétiens, c’est le jour solennel, où Sarkozy a perdu son latin. Il avait en effet employé référendum et ultimatum. En vain. Mais Brice Hortefeux, pince sans rire, affirme que le message – soit le massage du coup de pied au postérieur – de Nicolas Sarkozy au « fou furieux » et au « minable » a été entendu, que son souhait (ah bon ? un souhait ? plus un ultimatum ?) avait été exaucé. Dommage que Raffarin en soit réduire à penser que la création du Rump (frappée d’interdit par Sarkozy) est accessoire, et devienne « un élément de stimulation de l’accord » (déclaration au Figaro). C’est un peu sado-maso, ce mode de stimulation. Fillon fait mal, Copé en redemande ! Ils s’aiment, et se le prouvent en se balançant de torgnolles…
On rêve, on hallucine, en lisant Raffarin dans Le Figaro : « La Droite forte est présente dans l’équipe Copé comme dans l’équipe Fillon ». Quelles « divisions », la Droite forte, dans la bande à Fillon ? Ce qui est un peu foldingue, c’est qu’un Raffarin estime que « la clé de sortie de crise est entre les mains des seuls deux protagonistes ». Traduction : je compte pour du beurre, les parlementaires aussi, les militants, je ne vous en parle même pas, et Sarkozy, comment donc… Contradiction totale.
Les chefs décideront, oui, mais lesquels ?
Bref, seuls « les chefs » décident d’un avenir qui, selon Raffarin, « ne peut être que collectif ». Ah le collectif vanté par les entraîneurs des équipes de balle au pied (et dans le pied) !
Or donc, où en est-on ? La « quasi-totalité » des 72 députés du Rump ont demandé à reverser des fonds à l’UMP. Pour les autres, s’agit-il de retardataires ou de dissidents ? Le Figaro publie demain une sorte de pétition des pèse-peu, Nathalie Kosciusko-Morizet, Bruno le Maire et consorts pour un vote sous trois mois. Les députés non-alignés se réuniront chaque semaine jusqu’à ce que la force des baïonnettes les fasse rentrer dans le rang. À leurs frais, cette réunionite ?
Frédéric Lefebvre, comme Rachida Dati, y voit une tentative de remise en selle. Attention, Sarkozy va tancer les non-alignés ! « Grâce à la force de persuasion, grâce à la capacité de conviction de Nicolas Sarkozy… », psalmodie Goeffroy Didier (Droite forte). Ô président Sarko, tu es le plus beau, le plus fort, tu est la locomotive bleue et rouge lancée à toute vapeur sur les rails de la réconciliation de l’UMP, je t’aime !
En fait, aucun accord n’a été trouvé entre Fillon et Copé à l’issue de trois réunions en tête-à-tête, sans les claques. Seule concession : dans l’hémicycle, pas de jeu de chaises musicales, chacune et chacun est resté à sa place antérieure. Les 72 fillonistes se retrouvent donc parfois encerclés par les 123 UMP Canal historique, parmi lesquels des non-alignés.
Mais les deux pugilistes vont se retrouver pour un quatrième round, sans arbitre, ce mercredi. Il s’agit de déterminer une date pour… un référendum ? ou direct un nouveau vote ?
Il n’y a que Guaino pour estimer que ces face à face sont indécents. « On ne peut pas sortir de cette histoire avec un arrangement entre deux personnes dans un coin, derrière une porte fermée, ni par un arrangement entre deux états-majors, c’est une affaire publique. ». Meuh non. Pendant qu’il y est, pourquoi ne pas envoyer à Paris des délégués des fédérations pour former une constituante ? Mais qui jouera le rôle de la noblesse, du clergé et du tiers-État ? Il faudrait au moins un vote sur le vote pour en décider. Et qui l’organiserait ? Copé ?
NKM grivoise
NKM a eu ce mot : « deux hommes mettent tout sur la table, et je ne veux pas savoir ce qu’ils mettent sur la table ». Qui a la plus longue, la plus charnue, les plus grosses ou pesantes ? Le mieux serait de leur attacher les mains derrière le dos et qu’ils se la mordent. Élégamment, on ne dira pas que le châtré est le grand vaincu, et on ne saura rien du morceau resté entre les dents de l’autre.
Pour le moment, on ne voit guère Fillon sur la voie de renoncer à son groupe, à son financement, aux collaboratrices ou aides diverses. Les non-alignés vont-ils s’écharper avec les copéistes pour une répartition de la manne ? C’est envisageable.
Tiens, voilà Louise Courbin et Jens Vilumsen (de jeunes umpistes) qui rentrent dans la danse. La liberté « est devenue aujourd’hui plus qu’un droit, c’est une valeur. Une valeur sûre qu’il faut préserver, car grâce à elle les talents s’épanouissent, les idées s’échangent et s’enrichissent, les choses avancent. La liberté, celle de s’exprimer mais aussi de posséder et d’entreprendre. Cette dernière que l’on essaye sournoisement de nous enlever, nous devons nous battre pour elle. ».
À l’UMP encore mieux qu’ailleurs, la liberté consiste à l’ouvrir, la dictature à la fermer. Ils peuvent toujours l’ouvrir.
Mais au fait, l’aveu essentiel (qui peut n’être qu’une question d’appréciation personnelle), c’est celui de Raffarin : « la mort de l’UMP, ce serait l’avenir du FN ». Ah bon ? Mais pourquoi donc ? Serait-ce dire, sans le dire, que Sarkozy, avec l’assentiment verbal ou muet de Raffarin, a tellement fait le lit du FN dans les raisonnements de la base de l’UMP que tout est joué ? Qu’entre le FN et l’UMP, il n’y a qu’un conflit d’ambitions ? Bref, Fillon et les non-alignés, qui réclament leur part du gâteau, sont des pèse-peu : seule compte l’attraction du Front national.
C’est un peu vrai : jamais l’UDI ne fera de la place aux fillonistes ou aux non-alignés, en tout cas, pas sans leur faire subir un long purgatoire. Raffarin pourrait se rendre à l’évidence : pour que l’UMP ne fasse pas le lit de l’UMP, il faut que l’UMP se coupe de la branche pourrie qui plagie le FN.
Mais non, il s’est raccroché à la locomotive Copé, et ambitionne d’en être le tender (là, il peut toujours se brosser, la place est prise et disputée, et puis, la vapeur, c’est du passé).
Gare aux régionaux des étapes
L’UMP, si elle se survit, a un gros problème : Fillon n’est plus le chef incontesté pour celles et ceux qui pourraient s’être ralliés à lui, à un moment ou un autre, soit les NKM, Bertrand, Le Maire et autres. Si elle tombe – amputée – dans les bras de Copé, elle doit disputer des voix au FN sur les mêmes thèmes, les mêmes réflexes. Mais Copé n’a pas (ou plus du tout) le charisme d’une Marine Le Pen. Sarkozy s’est pris un camouflet. Juppé et MAM sont usés.
L’UMP (ce qu’il en reste) en est réduite à donner de la voix, comme Marc Le Fur, contre la hausse de la TVA sur les billets de cinéma. Bientôt, ses parlementaires vont s’opposer à ce que la Banque postale se substitue au CIF, parce que les socialistes le suggèrent, comme Michel Bouvard, Pdg du CIF, ancien député UMP, le propose. Et puis viendra le temps où les non-alignés, pour se distinguer et exister, voteront différemment du Rump et de l’UMP Canal historique. Ils se retrouveront sur quoi ? Sur l’opposition au mariage pour tous ? La belle affaire ! Sujet numéro un des préoccupations des Françaises et des Français ? Allons donc…
Le plus ridicule : on va voir, localement, des projets d’équipement ou autres, concoctés par les préfectures sous Sarkozy, contestés par les fédérations et élus territoriaux UMP. Sous Sarkozy, c’était formidable, sous Hollande, c’est la catastrophe. Voyez la liaison Lyon-Turin. Dord a maintenant des doutes : la gauche est pour, donc la droite avait tort.
D’un côté, on aura Xavier Bertrand soutenir que fusion entre département et région sont indispensables. De l’autre, des fédérations UMP assurer du contraire. En fait, sans le carcan d’un Copé ou d’un Fillon à Paris, dans les régions, des chefs de file territoriaux vont prendre de l’importance. La cacophonie guette. Et les ambitions vont s’exacerber. Attendez-vous à savoir que d’autres personnalités vont émerger dans leurs fiefs. C’est d’ailleurs le seul et unique facteur qui pourrait rabibocher Copé et Fillon : la crainte de l’émergence de concurrents dangereux.