Trois souvenirs de ma jeunesse, film d’Arnaud d’Esplechin

Dans son dernier film Arnaud Desplechin nous revient avec son Paul Dedalus incarné respectivement par Antoine Bui, Quentin Dolmaire, Mathieu Amalric, au gré des âges. Souvenirs, souvenirs. Il braque sa caméra sur ces souvenirs phares de toute vie. Ceux qui vous prennent d’assaut à la moindre"madeleine" sans doute pour avoir participé activement au façonnement de la personnalité. Ceux restés intacts et desquels l’on puise à la fois forces et  faiblesses. 

Pour embrasser une nouvelle carrière au quai d’Orsay, Paul met fin à sa vie d’anthropologue au Tadjikistan. C’est lors d’un contrôle à la douane française où il sera question d’une certaine usurpation d’identité que se déclenchera en lui une déflagration, synonyme de coup d’envoi de la traversée de la mémoire. S’ensuivra une brève escale du côté de l’enfance à Roubaix entre un père veuf inconsolable, un frère pieux et une soeur mal dans sa peau ; puis un détour dans les années 80 en URSS lors d’un voyage scolaire haut en couleurs ; et enfin Esther et Paul, (Lou Roy Lecollinet et Quentin Dolmaire), le coeur même du film : le début d’une romance , d’une passion adolescente tour à tour tumultueuse et apaisée. 

Lui a des envies d’instruction en plus de celles de vivre d’amour et d’eau fraîche. Elle qui se plaît à se regarder vivre,  à s’écouter parler, ne trouve pas son compte; elle souffre de l’éloignement géographique entre eux ; elle joue à la charmeuse à ses heures perdues sans jamais se départir de cette moue qu’ont les personnes atteintes d’une forme de syndrome d’intolérance aux odeurs de boules puantes. 

Une bonne partie du film gravitera autour de la correspondance qu’entretiendront les deux tourtereaux. Chacun lira face caméra sa lettre et Esther semble s’être fourvoyée à cet exercice sans doute pour avoir cru que romanesque rime avec maniérisme forcené. Un foisonnement de dialogues qui se veulent intello mais qui parfois, ont le malheur de sonner le creux à l’oreille du commun des mortels. Quentin Dolmaire quant à lui, à l’aura irrésistible, à l’étoffe des grands, s’avère être une révélation ! 

Admirablement filmé, ce long métrage qui n’est pas sans rappeler le style Truffaut s’achève en beauté grâce à la prestation saisissante de Mathieu Amalric. Un film français signé Arnaud Desplechin ne se boude pas même si une petite erreur de casting semble avoir plombé certaines séquences sans pour autant altérer cette magie que sait instiller tout en finesse Arnaud Desplechin…  

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