Après avoir lu quelques critiques sur le dernier long métrage Tintin de Steven Spielberg, je suis allé me faire un avis sur ce film encensé par tout le monde. Je reste maintenant sceptique : certes, la prouesse technique est remarquable avec des animations plutôt fluides et un univers détaillé (malgré quelques petits ratages comme le visage de Tintin moins bien modélisé que les autres personnages ou quelques mouvements un peu rigides par moment), cependant je ne comprends pas pourquoi personne n’a parlé des gros défauts de ce long métrage.

D’abord, l’adaptation est qualifiée de fidèle à l’œuvre d’Hergé. Il est vrai qu’il est difficile d’adapter fidèlement un livre ou une BD et qu’on peut se permettre de s’éloigner du scénario original, mais là il y a trop de différences : pourquoi avoir éliminer le Professeur Tournesol de l’intrigue ? C’est un personnage important surtout à ce moment là ! On n’a pas oublié de mettre la Castafiore alors que son rôle est insignifiant et téléphoné ! Je vais tacher de ne pas mettre de spoil dans cet avis, mais un minimum de respect de la chronologie des aventures de Tintin aurait été plus judicieux. A la place, on a l’impression d’avoir affaire à un best of des personnages les plus populaires de Tintin, ceux qui rapporteront de l’argent.

 

C’est peut-être ça le problème de ce film : on sent qu’il a été fait pour rapporter un maximum ! Alors on insiste sur les graphismes, de bonne qualité, et sur l’action et l’humour potache. Cela fait rire les petits et les grands sont ravis de voir les héros de leur enfance. C’est un mécanisme de base, cependant quand on aime Tintin on apprécie moyennement de voir son univers ridiculisé. Certes, il y a de l’humour dans l’œuvre d’Hergé, mais pas des situations comiques de cours de récré ! Les personnages Dupont et Dupond, le capitaine Haddock ainsi que la Catasfiore sont totalement ridicules. Leur psychologie n’est pas respectée : on transforme les deux célèbres policiers en clowns décérébrés (ils ont quand même plus de cervelle dans la BD !), la Castafiore en diva sur le retour mal élevée (elle qui a tellement de prestance et d’éducation malgré un caractère très fort) et le capitaine en simple alcoolique rustre et déséquilibré. Certes, le capitaine a eu des problèmes avec l’alcool, mais il a toujours gardé un minimum de dignité et d’éducation. Pour gagner de l’argent facilement, on donne dans l’humour potache et pour ça il faut bien des personnages qui vont avec ! C’est malheureux et presque irrespectueux pour l’œuvre d’Hergé.

 

Un journaliste avait comparé Indiana Jones à Tintin et c’est comme ça que Spielberg a voulu acheter les droits, après avoir vu les chiffres de vente. L’argent est sa seule motivation. Alors, maintenant, on compare Tintin a Indiana Jones et cela se ressent fortement dans ce long métrage : on oublie l’intrigue pleine de rebondissements et de subtilité pour un scénario d’action permettant d’enchaîner les scènes à grand spectacle. Sauf que Tintin est pacifiste et non violent, alors cela fait bizarre de le voir tirer régulièrement (même s’il le fait parfois dans la BD, il préfère l’éviter autant que possible) et tout saccager sur son passage. L’intrigue part dans des délires mystiques qui n’ont jamais existé chez Hergé, ce qui fait également bizarre. Il est donc dommage d’avoir associé l’univers de Tintin à ce long métrage, qui reste un divertissement honnête si on oublie qu’il met en scène le célèbre reporter.

 

Cette adaptation a les mêmes défauts que les autres adaptations américaines : les américains n’arrivent pas à saisir l’essentiel, l’essence même de l’œuvre qu’ils adaptent et misent tout leur l’humour facile et l’action. Spielberg n’a pas remarqué que Tintin s’est adapté à son époque au fil des albums et si l’action des premiers se passe au début (ou dans la première moitié) du XXe siècle les derniers sont parfaitement contemporains. Il n’y avait donc pas besoin de situer l’action de ce film dans les années 1940-1950, ce qui fait un point commun supplémentaire avec Indiana Jones. D’ailleurs, on a plus l’impression d’un nouvel épisode de la vie trépidante du célèbre aventurier (afin de faire oubleir le désastreux 4e épisode) qu’une aventure d’un tout aussi célèbre reporter !

 

En bref, c’est sûr qu’il fallait donner un coup de jeune à Tintin et la technique employée suffisait, mais il fallait aussi penser aux fans qui, une fois la nostalgie passée, resteront sur leur faim car cette adaptation est loin de son objectif initial qui est de rendre hommage au superbe travail d’Hergé. De l’esprit original, censé séduire tout le monde de 7 à 77 ans par son aspect léger, il ne reste presque rien ce qui est regrettable pour les plus jeunes qui ne peuvent pas réellement découvrir l’univers si particulier et attachant de Tintin. Mais l’impitoyable marketting est en marche et ce sera à coup sûr un succès commercial qui appellera une suite juste pour rentabiliser un peu plus l’affaire.