Je viens parler ici de Tahr Ben Jelloun. Je suis une très grande fan de ce qu’écrit ce grand Monsieur. Du premier au dernier de ses ouvrages, tous m’ont complètement conquise. Je viens donc vous présenter le destin de cet homme hors du commun qui a réussi à transmettre par ses écrits la souffrance d’un peuple, mais également la joie et les coutumes sans tomber dans des stéréotypes classiques. Les sujets dont il traite sont des sujets relativement tabous, mais il manie tellement bien le verbe…

Tahar Ben Jelloun est né à Fès au Maroc le 1 décembre 1944. Il entrera à l’école à Fès, mais il obtiendra son certificat d’étude primaire à Tanger, ses parents y ayant déménagé. Après avoir obtenu son baccalauréat, il intègre l’université et y poursuit des études de philosophie. En mars 1965, Tahar Ben Jelloun sera arrêté suite à une manifestation et des émeutes d’étudiants. Suite à cet évènement, il sera donc envoyé en camp disciplinaire durant un an et demi. 

C’est durant cette période qu’il écrit son premier poème intitulé "L’aube des dalles", qui sera publié lors de sa première année en tant qu’enseignant au Lycée Mohamed V à Casablanca.

1970, il publie son premier recueil de poésie, "Homme sous linceul de silence" aux éditions Souffle.

1971, Tahar Ben Jelloun est contraint de partir à Paris pour se spécialiser suite à l’arabisation de la philosophie. Il restera donc à Paris où il écrira plusieurs articles prestigieux pour le journal ‘Le Monde’. Par la suite, il obtiendra un doctorat en Psychiatrie sociale.

A partir de là, il commencera à écrire pas mal de recueils de poésie, mais aussi des oeuvres complètes. C’est en 1985 que sa carrière d’écrivain prendra un nouveau tournant. En effet, avec son livre, "L’enfant de sable", il devient célèbre. Avec la suite de ce premier livre, "La nuit sacrée", il décroche le prix Goncourt en 1987. Et dire que je venais à peine de naître, il m’aura fallut attendre une quinzaine d’années pour découvrir ce magnifique récit!

Depuis, ce ne sont pas moins de 41 ouvrages et 4 recueils de poésie qui ont été publiés! Les récompenses pleuvent sur son passage, après le prix Goncourt, il décroche le prix Ulysse, le prix Impact, le prix international de poésie Argana ainsi que la prix de la paix Erich Maria Remarque. Outre ces récompenses, il faut noter que Tahar Ben Jelloun devient membre de l’Académie Goncourt, Docteur Honoris Causa de l’Université de Montréal puis de l’Université catholique de Louvain! Le premier février 2008, le Président de la République le gratifie d’une ultime récompense, il se voit attribuer La croix de grand officier de la légion d’honneur. Puis en mai de cette année, il devient Commandeur de l’ordre du national du Mérité.

   

Face à tout cela, il est raisonnable de se demander jusqu’où ira notre écrivain… Ses récits font le tour du monde et reçoivent toujours un fameux accueil. 

Je vous recommande bien sûr de lire l’un de ces ouvrages far, "Le premier amour est toujours le dernier", un récit poignant qui tient le lecteur en haleine de bout en bout, ou encore son recueil de poésie "Les amandiers sont morts de leurs blessures". Il est très difficile de faire un choix parmi ces ouvrages, tant je les apprécie tous… "L’enfant de sable", "La nuit sacrée", "La nuit de l’erreur", "Partir" ou encore "Harrouda" laisse un goût tout à fait particulier. On ne ressort jamais indemne d’une lecture de Tahar Ben Jelloun tant ces récits sont emprunt tantôt de sincérité, tantôt de gaieté, ou encore de tristesse, et parfois le tout unit dans un fameux mélange homogène… 

     

Pas besoins de vous en dire plus, la lecture d’un seul ouvrage vous fera plonger dans son univers si particulier, plus jamais vous n’aurez envie d’en sortir. J’admire ce grand Monsieur, il demeure l’écrivain contemporain que j’apprécie le plus…

Je vous invite vivement à consulter son site internet, www.taharbenjelloun.org, vous apprendrez à mieux le connaître. Son site présente tous ses écrits, et vous avez même la possibilité de lui adresser des messages auxquels il prend grand plaisir à répondre. Un homme proche de son lectorat et à l’écoute, un homme qui mérite amplement la distinction qu’il a reçu, à savoir le prix de la tolérance qui lui a été décerné par le Secrétaire Général des Nations Unies en 2005 pour son ouvrage ‘Le racisme expliqué à ma fille’.

 

Voici deux extraits de son recueil, "Les amandiers sont morts de leurs blessures".

Capu nero

 

Les filles

à la chevelure rouge

attendent

l’âme voilée

elles lisent la ligne de la mer

derrière le voile blanc du songe

l’enceinte et les parfums des sables

allongées sur les méandres

bleues de la bise

des moineaux

se perdent dans leur chevelure

tressée de patience

 

 

Quel oiseau ivre

 

Quel oiseau ivre naîtra de ton absence

toi la main du couchant mêlée à mon rire

et la larme devenue diamant

monte sur la paupière du jour

c’est ton front que je dessine

dans le vol de la lumière

et ton regard

s’en va

sur la vague retournée

un soir de sable

mon corps n’est plus ce miroir qui danse

alors je me souviens

 

tu te rappelles

toi l’enfant née d’une gazelle

le rêve balbutiait en nous

son chant éphémère

le vent et l’automne dans une petite solitude

je te disais

laisse tes pieds nus sur la terre mouillée

une rue blanche

et un arbre

seront ma mémoire

donne tes yeux à l’horizon qui chante

 

ma main

suspend la chevelure de la mer

et frôle ta nuque

mais tu trembles dans le miroir de mon corps

nuage

ma voix

te porte vers le jardin d’arbres argentés

 

c’était un printemps ouvert sur le ciel

il m’a donné une enfant

une enfant qui pleure

une étoiles scindée

et mon désir se sépare du jour

je le ramasse dans une feuille de papier

et m’en vais cacher la folie

dans un roc de solitude