Ma transhumance avec les vaches dans le Territoire…

 

Ma transhumance avec les vaches dans le Territoire…
 
Il m’aura fallu me lever assez tôt ce dimanche matin, 19 mai 2013, malgré un temps pluvieux et froid, pour me rendre dans le Territoire, marcher derrière les vaches.
Le Territoire, pour nous, Francs-Comtois et Alsaciens, c’est le neuf-zéro, le Territoire de Belfort !
On n’en connaît d’ailleurs, pour la plupart, que Belfort, la grande cité ouvrière, au dessus de laquelle trône le lion de Bartholdi à la Citadelle et qui rappelle le passé combatif de la cité, son passé de ville frontière.
 
Donc, revenons à nos moutons, ou plutôt à nos vaches… des Salers, pas des Montbéliardes, ni de ces si charmantes vaches de race vosgienne.
Aujourd’hui, était le jour décidé par le vacher pour les remonter à l’herbage après de longs mois d’étable. La pluie leur a frisé le poil roux ce matin à la sortie sur le macadam. Les petits veaux aimeraient sans doute se frotter les yeux ! Qui nous réveille ? Et pour quoi faire ? Où nous emmènent-ils, ces hommes revêtus d’un vêtement bleu d’anciens paysans, ou maquignons ?
Si c’est un concours de beauté, c’est un peu raté, quelques fessiers sont un peu bouseux… il pleut ! A la sortie du matin, Mesdames les vaches ont des besoins nécessaires dictés par la nature. La rue est vite crépie…
 
9h30 – GIROMAGNY (90) (470 mètres d’altitude, ville du quartz et de l’amphibole) – Le troupeau du public est agglutiné derrière les barrières de sécurité. La vapeur du troupeau bovin monte et indique que j’arrive bien au bon moment. Tout est prêt. La musique bat son plein: cors de chasse, cors des alpes, fanfare à l’accordéon accompagnée… La Mairie est pavanée de trois drapeaux: français, européen et allemand.
Les vaches sont très nerveuses, sous tension, sous pression, prêtes à foncer dès que l’on en donnera l’autorisation. Deux d’entre elles portent une couronne de fleurs (fausses). Elles portent toutes également des cornes impressionnantes (et vraies) !
Les veaux de l’année sont réellement inquiets, mal réveillés. Ils n’osent bouger, et restent un peu au chaud entre les mères. On aperçoit leur mine chafouine, toute dégoulinante de cette vilaine pluie.
9h45 – départ sous la pluie !
La grille s’ouvre, les vaches… foncent… et nous, humains, suivons au pas de courses, ou presque… 170 bestiaux dont 70 veaux !
 
Le mois dernier, j’ai suivi les chèvres lors de leur montée à l’herbage au fort de Planoise à Besançon (25). Suivi est un bien grand mot, car ces dames caracolaient loin en tête, ralenties par instant par les bergers. Je me pensais qu’avec les vaches, ça serait plus peinard… je me trompais !
Les vaches sentant l’herbe fraîche et se souvenant de la liberté en altitude écraseraient tout sur leur passage.

C’est donc parti, pour 10 bons kilomètres pour sortir de Giromagny, traverser Lepuix-Gy, passer sur la Savoureuse, découvrir au hasard d’un virage, une usine de textile (fermée), des jolis pavillons témoins d’un ancien prestige (fermés et "à vendre"), des croix de chemin et de jubilé, des ballons des Vosges couverts de sapins, des dégradés de verts sur les pentes… une station d’orchis mâle en bord de fossé, et constater l’invasion de renouée du Japon sur les berges de la Savoureuse…

11 heures – la pluie a cessé. Pause à Malvaux, rue de la Papeterie (fermée). Rassemblement du troupeau d’humains. Réunion avec les retardataires, pour la montée finale. Musique, fanfare, photographies, vidéos… La télévision régionale est là. Les vaches en Franche-Comté deviendraient-elles, comme partout ailleurs, une espèce en voie de disparition ? ok, ce sont des Salers, on n’en voit pas tous les jours ! Ce sont des vaches de montagne. 

Vente de vin chaud et autres boissons pour rassasier et réconforter les marcheurs, mouillés sur le matin, mais qui commencent à sécher dans tous les sens du terme. Petite pause et petit casse-croûte pour tous. Le plus dur reste à faire !
On m’annonce encore une heure de marche quand je demande le nombre de kilomètres… Si je savais… mais je me doute que ça va monter. Nous sommes au pied du Ballon.
 

11h15 ou presque, les deux troupeaux repartent. Les cavaliers sur leur monture empruntent un chemin détourné pour doubler les bovins qui s’enfilent dans le chemin. Ça monte ! D’anciens poteaux Michelin indiquent les kilomètres et l’altitude. Et ça va grimper en tortillant dans la forêt pendant une heure, 4km, 3.5km ? Il faut avancer. Le taureau, lui, rumine dans la bétaillère tirée par un tracteur, qui ramassera le long de la montée, une bonne dizaine de veaux qui n’en peuvent plus. Ils peinent les jeunes de l’année, mais quand les vachers veulent les faire grimper dans la bétaillère, ils ont encore de l’énergie pour se débattre. Pour les plus petits, un ou deux vachers suffiront, pour les plus de 50 kg, plein de muscles, ils doivent s’y mettre à 4, il ne s’agit pas de blesser l’animal non plus.

 
La voiture balai a déjà repêché des personnes essoufflées. Non, j’irai en haut, seule !
 
En haut !!!!

12 heures – Les vaches s’élancent dans la verte prairie, le Plain de la Gentiane, à 1060 mètres d’altitude, à 3kms du Ballon d’Alsace. Magnifique ! Les vaches rousses sur ce fond de paysage vert, les ballons vosgiens en arrière plan, c’est magnifique! On relâche le taureau qui ne demande pas son reste.

Les marcheurs sont épuisés mais HEU-REUX, les enfants émerveillés de pouvoir enfin, à l’air libre et frais, admirer les animaux. Les mères vaches lèchent leur petit, et tout le monde bovin broute enfin l’herbe forcément fraîche.

C’est l’heure du pique-nique pour ceux qui n’ont pas réservé le repas organisé par Transhumance et Tradition, l’association responsable de l’animation. Il fait 5°.

 
13h30 – pour ceux qui le souhaitent une navette a été affrétée pour la descente, retour aux voitures. Un père et sa fille vont redescendre les boucles de la route en vélo ! je les envie un peu, mais le vent est frais là-haut.
 
Voilà, ça y est ! j’ai fais la transhumance avec les vaches ! et j’espère y retourner l’an prochain !