Ce que nous enseigne le traitement médiatique des attentats de Bagdad

Les attentats de Bagdad, survenus le 3 juillet 2016, sont les attaques terroristes les plus meurtrières perpétrées par l’Etat Islamique depuis sa création : plus de 213 morts, autant de blessés, dont de nombreux enfants.

Comme nous le remarquons depuis de nombreux attentats, ceux qui surviennent « loin » de chez nous ne suscitent pas la même émotion que ceux qui frappent l’Occident, et celui-ci n’a pas dérogé à la règle : bien moins de sentiment d’horreur dans les médias que lors des attentats d’Orlando ou même d’Istanbul de ces dernières semaines, et évidemment aucune commune mesure avec les attentats de Paris.

Non seulement le nombre d’articles consacrés est bien moins grand et suscite bien moins d’intérêt d la part du lecteur, mais le traitement de l’évènement est complètement différent : l’insistance ne va pas sur la violence ni sur les  victimes ; on n’imagine pas du tout un hashtag #EnMémoire ni un grand format du Monde consacré à la vie de chacune des victimes, comme cela a été le cas après le 13 novembre. Dès les premières lignes de commentaire sur les attentats de Bagdad, les journalistes se concentrent sur « la nouvelle stratégie de l’Etat Islamique » ou « la fragilité du pouvoir irakien », alors que les éléments semblables d’analyse sont venus, dans le cas des attentats en France, bien après, laissant place d’abord à une émotion débridée.

Cette différence de traitement ne provient pas de la distance, comme l’ont montré les attentats d’Orlando. Ce qui compte, pour susciter notre horreur, c’est une proximité bien plus culturelle : nous sommes heurtés moralement par les attentats qui frappent l’Occident, les personnes que nous pensons plus proches de nous que d’autres cultures que nous connaissons moins.

Cela signifie une chose, qui est une évidence mais mérite d’être rappelé : les citoyens occidentaux sont encore loin de se sentir citoyens du monde et de réaliser l’idéal selon lequel chaque vie humaine a la même valeur. L’universalisme a encore beaucoup de chemin à faire, et l’on doit poursuivre avec vigueur le travail d’éducation pour que chacun ressente l’égalité de tous les êtres humains non comme un idéal, mais comme un fait.

Il faut également, quand on pense à l’Etat Islamique, réfléchir non pas simplement à nos personnes, à notre sécurité à nous, mais à l’échelle du monde ; car l’Etat Islamique, lui, a bien une stratégie mondiale.