Entreprise : réunions

Les groupes, petits, moyens, grands et « gigantesquissimes » sont atteint d’une maladie : la réunionite aigüe.

Vous savez, c’est comme ces maladies aigües et néanmoins chroniques qui s’aggravent avec le temps : rhumatismes, arthrose et j’en passe qui pourrissent la vie des malades qui en sont atteints et qui les font atrocement souffrir.

La réunionite aigüe pourrit la vie de l’entreprise et fait souffrir les participants qui n’ont pas la possibilité de refuser les réunions, sauf, à terme, à se faire très mal voir ou pire, à être exclu de l’entreprise et à être obligé de pointer chez Polo.

Il semblerait, qu’il n’y ait aucun remède pour guérir cette maladie, dans l’entreprise répandue.

Une question à laquelle réponse doit être trouvée : il faut se réunir !

Un problème mineur à résoudre : réunissons-vous !

Il convient de faire un point sur un sujet : et hop une réunion !

Et fissa s’il vous plaît, il faut être disponible le doigt sur la couture du pantalon, le sourire aux lèvres, au garde à vous ! Sir yes Sir ! et asap – pour ceux qui pointent chez Polo depuis longtemps et qui ont tout oublié du monde de l’entreprise – grand bien leur fasse – asap = as soon as possible, c’est plus chic en anglais –  y compris à des heures indues, genre le soleil couché depuis longtemps ou pas encore levé.

La plupart du temps, une réunion informelle et rapide aurait dû permettre de répondre à la question, de résoudre le problème ou de faire le point.

Mais, c’est sans compter sur le fait que bien des salariés – des directeurs en général pour ne rien vous cacher, petits, moyens ou grands directeurs, je précise, ceux qui ne sont pas sur le terrain mais qui pantouflent dans de grands bureaux confortables au beau mobilier – je vais encore me faire des copains et des copines si, par le plus curieux des hasards, il y a, parmi les lecteurs et lectrices de mes chroniques, des directeurs ou directrices – doivent montrer qu’ils sont constamment occupés, que le nombre d’heures effectuées est nécessaire et qu’ils sont en mesure de justifier, par conséquent, leur existence dans l’entreprise et tant qu’on y est, dans le monde du travail et, soyons fou, dans le monde tout court.

De plus, les directeurs ont souvent un égo surdimensionné, ce qui n’est guère étonnant car, plus on monte dans la hiérarchie, plus il faut avoir de l’égo pour y parvenir.

Et ils pavoisent, que dis-je, ils jouissent à l’idée de se réunir, la réunion leur permettant de se positionner par rapport aux autres petits camarades directeurs, surtout s’ils sont le moteur de la réunion, de se donner en spectacle même parfois et de s’attribuer toute l’importance qui flattera leur statut durement acquis.

Statut, bien souvent acquis en dézinguant le petit camarade d’à côté, pas encore directeur, qui, lui aussi aurait aimé devenir directeur mais qui ne maîtrise pas le dézingage, faut-il le préciser ?

M’enfin, nous ne vivons pas dans un monde de bisounours chers lecteurs et chères lectrices et l’entreprise est une savane dans laquelle s’affrontent les grands fauves.

Il suffit d’observer les jeux de séduction, les croques en jambes, les intrigues dignes de celles fomentées dans la cité interdite du temps des empereurs chinois par les eunuques quand un poste de directeur se libère et qu’il s’agit de le pourvoir par un nouveau petit camarade directeur.

Il en est de même pour les hommes politiques. Pour devenir Président, il faut une sacrée dose d’égo sinon pas moyen et il faut avoir dézingué les autres hommes politiques, y compris les soi-disant potes.

De ce point de vue et à bien des égards, l’entreprise peut être comparée au monde politique. On y retrouve les mêmes dérives et les mêmes constantes.

Mais je m’égare très sérieusement …

Je pose donc la question qui en fâchera plus d’un : que seraient les directeurs sans les réunions qui les mobilisent des journées entières, ces directeurs enchaînant les réunions à la queue leu leu ?

Pas grand-chose.

Les petites mains des entreprises, ainsi que les petites et moyennes entreprises qui comptabilisent peu de salariés (pas les groupes donc, vous suivez ?) n’ont pas de temps à consacrer à des réunions stériles, longues et épuisantes, trop occupées qu’elles sont à être productives, afin que l’entreprise dégage suffisamment de pépettes pour vivre.

Dans les groupes et en particulier dans les grands groupes, le nombre de salarié est tel, qu’inévitablement, un nombre incompressible de salariés existe on ne sait pas trop bien pour quoi et avec, parfois, des titres bien ronflants.

Au cours de ces réunions, on retrouve grosso merdo, les mêmes archétypes :

  • Le participant qui s’écoute parler et qui se prend très au sérieux, comme si sa vie en dépendait. Il se croit seul dans la réunion et il parle longuement, incapable qu’il est de synthétiser sa pensée qui de plus, n’est pas toujours limpide. Celui-là ne se prend pas pour du caca boudin. Au bout d’un temps certain, les autres participants ont des envies de meurtre …
  • Celui qui est si soporifique, qui n’a aucun charisme, qui est incapable de captiver à minima l’attention, que les autres participants doivent lutter dur pour ne pas sombrer dans un sommeil profond – compte-tenu du nombre d’heures travaillées, dormir serait bienvenu !
  • Ceux qui ne comprennent rien à ce qui se dit et peinent à suivre, ils posent des questions à côté de la plaque et il faut expliquer et réexpliquer jusqu’à en devenir barjo !
  • Ceux qui sont indifférents et/ou qui font semblant d’écouter et jouent discrètement sur leur smartphone ou leur PC portable en faisant croire qu’ils prennent des notes
  • Ceux qui ont le don de transformer l’objet de la réunion, simple au départ, en une véritable usine à gaz ! Oh secours – planquez-vous ! Danger ! Danger ! BOUM !
  • L’intervenant qui conceptualise tant et si bien que personne ne comprend rien mais que tout le monde fait semblant de comprendre. Il ne faudrait pas passer pour des quiches tout de même !
  • Celui qui mène la réunion et qui demande l’avis des participants afin de passer pour un grand démocrate mais qui au final, ne tient pas compte des opinions des autres et impose ses décisions malgré les protestations et si tant est que protestations il y ait, ce qui est de moins en moins courant. Il ne faudrait pas se mettre le gourou à dos !

C’est bizarre, cela me rappelle un certain Président qui a développé tant et si bien cette pratique qu’il l’a érigé au rang d’art ! Vous aurez deviné, à n’en pas douter, à qui je fais allusion, ce n’est pas difficile, on est en plein dedans et pour un moment encore !

Le plus beau reste à venir :

  • Les salariés se plaignent que les réunions sont organisées sans ordre du jour ou objectifs clairement définis – ce qui revient à dire que ces réunions ne sont pas préparées – et se demandent à quoi servent ces grands moments de participation collaborative et cette multiplication de consultations à tout va
  • Dans les grands groupes, plus personne ou presque ne prend de décision, chacun ayant peur de prendre LA décision qui pourrait éventuellement lui coûter son poste ou bien redoute que cela l’engage sur des terrains glissants sur lesquels sa hiérarchie ne le suivra pas et que cela mette sa carrière en péril. Au final, des problèmes d’une simplicité enfantine traînent pendant des mois faute de décision pérenne
  • Enfin et quand YOUPI – ne vous réjouissez pas trop vite – les décisions sont prises et si tant est qu’elles soient concrètes ce qui est de plus en plus rare, les actions à mettre en œuvre, les tâches attribuées aux uns et aux autres et j’en oublie, tout cela n’aboutit pas et pour cause, les réunions s’enchaînant, nos directeurs n’ont absolument pas le temps de passer à la phase application ni même d’informer leurs sbires et de déléguer. Bref, ils n’ont pas le temps de faire quoi que ce soit d’autre que de se rendre à la prochaine réunion.

A la réunion suivante, on répète qu’il faudrait faire ceci et cela, en vain ….

Un sondage datant de 2014 révèle que 88% des cadres trouvent les réunions inutiles, cela ne s’est pas arrangé depuis, 75% font autre chose et 33% de bienheureux s’assoupissent !

Je me range d’office du côté des bienheureux !