Des tableaux à 500.000 € aux fonds d’enquête et de surveillance, l’affaire Claude Guéant,

montre un visage de la Sarkozie.

 

On sait que la droite aime récompenser ceux qu’elle juge bons serviteurs de ses intérêts. Elle manie à la perfection le bâton et la carotte surtout dans la police au point que la réduction des effectifs n’aurait pas réduit le coût de ce ministère. Comme on veut faire des réformes structurelles on réduit les effectifs, cela fait plaisir à Bruxelles, mais comme il faut quand même des résultats on arrose de primes ceux qui restent, c’est la récompense au mérite. On connait la suite, les attaques aux personnes augmentent, moins de policiers, et l’encouragement au zèle conduit à des excès fâcheux sur une certaine population qui se trouvent ainsi marginalisée par des contrôles permanents, il ne fut pas bon, un temps, de s’appeler Ben ou Mohamed, maintenant c’est silence complet ?

L’affaire Guéant c’est autre chose tellement elle s’apparente à un innocent vaudeville sous couverture de la sarkozie. Tout d’abord une métastase de l’affaire du tribunal arbitral de Bernard Tapie Adidas Crédit Lyonnais, Christine Lagarde, aujourd’hui devant la Cour de justice de la république pour une mise en examen. Il s’agit du tribunal arbitral qui octroya 403 millions avec les intérêts en réparation du préjudice moral que Bernard Tapie subit dans cette affaire, donc payés par le contribuable, ainsi que des suites du financement de la campagne de 2007 de Sarkozy.

Le 27 février toujours très tôt le matin la brigade financière est allée au domicile de Claude Guéant perquisitionner sur des traces de cette affaire, comme s’il avait à y voir quelque chose.

L’après midi même, ce sont d’autres magistrats qui se pointent chez lui. Il s’agit de la division nationale des investigations financières qui, dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte en janvier, enquête sur des éventuels versements libyens en décembre 2006 et janvier 2007 de 50 millions pour la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Elle permit de mettre à jour, de façon impromptue, grâce à la saisie de relevés de comptes bancaires, la trace d’un virement de 500. 000 euros depuis un compte à l’étranger. Il s’agissait seulement de trouver des documents qui accréditaient le financement de la campagne de Sarkozy comme l’affirma Ziad Takiéddine, intermédiaire dans les négociations des contrats d’armement, mais pas un virement de 500.000 € à un compte à l’étranger. Takiéddine ne fut pas seul à révéler ce financement. Le site Mediapart révèla, le 03 mai via l’avocat de Maître Béchir Essid de l’ancien chef du gouvernement libyen, Baghdadi Ali al-Mahmoudi, l’existence de la note que Mediapart publia, ainsi que le déblocage d’une somme de 50 millions d’euros en 2007, par le régime Kadhafi, pour Nicolas Sarkozy.

Le 30 avril, le Canard enchaîné révéla également que les investigateurs découvrirent, en épluchant les comptes bancaires, que les 500.000 euros avaient pour provenance un compte à l’étranger. Ils trouvèrent trace de nombreux et conséquents paiements de factures en liquide. Claude Guéant aurait pour habitude de payer en cash. Interrogé par Le Monde, il confirma l’existence de ce virement, à partir d’un compte ouvert en Malaisie par un confrère avocat.

Selon lui, les 500 000 euros proviendraient de la vente en 2008 de deux tableaux du peintre hollandais Andries van Eertvelt à un confrère avocat. «Cela n’a rien à voir avec la Libye», c’est une affaire privée déclara-t-il. Le problème est qu’il fut Directeur général de la police nationale puis secrétaire général de l’Élysée, puis ministre de l’intérieur de quoi se poser des questions. Avant ce ministère, Claude Guéant homme de confiance de Sarkozy, fit des missions secrètes en Libye, en Arabie Saoudite, ou en Afrique noire, devenant l’homme «Afrique». De là, à imaginer, des transferts d’argent, il n’y a qu’un pas.

En cédant ces deux œuvres, dont l’une est intitulée «Bateaux dans la tempête», il ne se cacha pas d’avoir fait une bonne affaire. Ce peintre flamand du XVIIème siècle est coté sur le marché de l’art, mais, selon le site spécialisé Artprice, le prix de ses tableaux en ventes publiques oscilla ces dix dernières années entre 12. 000 et 140. 000 euros. Cette découverte conduisit le parquet de Paris à ouvrir une information judiciaire confiée à trois juges d’instruction.

Mis en cause sur la vente de ses deux tableaux pour un total de 20.000 à 25.000 €, il n’aurait jamais demandé de certificat d’exportation pour ses deux tableaux, indiqua jeudi 2 mai le ministère de la culture à l’AFP. Comme le rappelle le site spécialisé La Tribune de l’art, Guéant a-t-il obtenu un certificat d’exportation pour ses deux tableaux ?

Tout tableau d’une valeur supérieure à 150. 000 euros doit obtenir un certificat du ministère de la culture pour être autorisé à sortir de France. Interrogé par le site Mediapart Guéant affirma posséder ce certificat, mais refusa de donner des explications détaillées. Pour le président du syndicat national des antiquaires, «il peut toutefois arriver qu’un particulier, à la différence d’un professionnel, ne connaisse pas la nécessité d’obtenir ce certificat». Il risque alors une amende pour infraction douanière. En revanche si les tableaux sont restés en France aucun certificat n’est nécessaire.

Pour Libération.fr, Claude Guéant déclara détenir les pièces justificatives de la vente de ces deux tableaux à la disposition de la justice, estimant qu’il est «anormal que le secret de l’instruction ait été bafoué et que des fuites aient été organisées dans la presse pour me nuire avant que j’ai pu apporter des explications au juge qui n’allait pas manquer de me convoquer».

Sur la valeur des tableaux il y a polémique. La «valeur type» d’une huile sur bois de 30 cm sur 60 cm du peintre représentant des bateaux en mer, comparable aux tableaux évoqués par Claude Guéant, «est de 15. 127 euros», assura le jeudi 2 mai à l’AFP Artprice, en fonction des ventes passées en enchères publiques depuis 1989. Pour Christian Deydier, le président du syndicat national des antiquaires, un prix de 500. 000 euros ne le surprennent pas pour deux tableaux flamands ! Or la vente d’œuvres d’art est règlementée de taxes sur les plus values.

Si Claude Guéant a bien acquis ces deux tableaux «il y a une vingtaine d’années» avant leur vente en 2008, et s’il est en mesure de prouver leur date d’achat, il est normal qu’il n’ait pas payé de taxe sur cette vente. S’il peut prouver la durée de détention, après la deuxième année, un mécanisme d’abattement de 10 % par année de détention aboutit à une exonération au bout de douze ans. Mais «les œuvres d’art sont aussi un moyen fantastique pour transférer de l’argent de manière masquée», dans la mesure où «il est difficile d’établir qu’il est fictif de faire une très forte plus-value dans un laps de temps exceptionnellement court».

Ou l’affaire se complique c’est pour les factures payées en liquide. Pour se défendre des soupçons qui pèsent sur les versements de 20.000 à 25.000 €, Claude Guéant expliqua qu’il aurait perçu des primes en liquide à l’époque où il dirigeait le cabinet de M. Sarkozy à l’intérieur. Ses explications furent confuses mélangeant deux choses, les sommes en liquide que peuvent toucher certains policiers pour leurs investigations, Frais d’Enquête et de Surveillance FES, et qui perdurent….? Et les versements de primes aux membres de cabinets, ces fameuses Indemnités de Sujétions Particulières ISP déclarées qui en sont issues. Mais, ce n’est pas tout, Le Monde.fr publie le 14/05/13 que Claude Guéant aurait reçu un virement suspect 25.000 € de la Jordanie.

Concernant ces factures payées en liquide, Claude Guéant explique qu’il a bénéficié jusqu’en 2006 d’un système de primes en espèces instauré de manière occulte au ministère de l’intérieur. Au cours de cette période explique-t-il, je vivais chichement et ne dépensais presque rien, et j’ai amassé des espèces. En particulier de 2002 à 2004 lorsqu’il dirigeait le cabinet de Sarkozy à l’intérieur. Puis de 2005 à 2006 période durant laquelle il occupait les mêmes fonctions. Le problème est que ces versements en liquide furent supprimés par Lionel Jospin en 2002, et furent remplacés par des virements bancaires. Ces sommes n’ont donc jamais été déclarées au fisc, Guéant en convient, mais il se défend de toute malhonnêteté.

Daniel Vaillant prédécesseur de Sarkozy à l’intérieur, de déclarer, «il existait depuis 1946 des primes de cabinet, gérées par les chefs de cabinet, qui recevaient de l’argent venant de Matignon, qui le prenait à la Banque de France. Ces primes étaient distribuées dans chaque ministère». Ce système des fonds spéciaux gouvernementaux a perduré jusqu’à la fin 2001, date à laquelle Lionel Jospin, alors premier ministre, décida de le supprimer. Il estime que M. Guéant entretient une confusion entre les fameux «fonds secrets» ou «fonds spéciaux» et les «frais d’enquête et de renseignement».

Plusieurs de ses anciens collaborateurs au ministère de l’intérieur sous Sarkozy affirment ne jamais avoir reçu d’argent en liquide. Pour l’ancienne ministre Chantal Jouanno, membre du cabinet de 2002 à 2004, «je ne touchais que des primes sur mon compte bancaire, rien en liquide», assura-t-elle au Monde. Rachida Dati, qui fut, elle aussi, membre du cabinet de Nicolas Sarkozy, a démenti, au Monde, tout versement en liquide. Christophe Crépin, du syndicat UNSA-Police, est dans le premier cas. «C’est un fantasme depuis 2002, nous n’avons plus ce genre de pratique. Les primes sont versées sur le compte des fonctionnaires, chaque centime dépensé au ministère est tracé». Quant à Roselyne Bachelot, «soit c’est un menteur, soit c’est un voleur».

La dessus le Canard enchaîné du 7 mai titre, «la note de Guéant qui piège Guéant».

L’introduction de l’article est fort, «c’est un affreux coup de poignard dans le dos de Claude Guéant !». L’article reproduit un extrait de la note dans laquelle, «il interdit l’utilisation des frais d’enquête et de surveillance pour verser des compléments de rémunération», cette note est datée du 3 février 1998, signé, Claude Guéant Directeur de la Police nationale.

Cette lettre fut adressée à tous les chefs de la police. Les modalités d’application y sont soigneusement détaillées. «Ces fonds peuvent être utilisés pour le recueil de renseignements, la rémunération d’informateurs, l’acquisition de matériels, ou la mise à disposition de moyens d’investigation», selon le patron de la police. Mais, attention, écrit-il, «en aucun cas ces crédits ne doivent être considérés comme permettant d’alimenter un régime indemnitaire !», c’est le coup de massue. En clair, Claude Guéant interdisait que ce fonds serve à financer des primes occultes non déclarées. Claude Guéant a réagi, «le Canard dit ce qu’il veut, par contre la date m’intrigue un peu car j’ai quitté mes fonctions de directeur général de la police nationale au lendemain de l’assassinat de Claude Erignac ?».

Manuel Valls a diligenté une enquête administrative sur ces primes, confiée à l’inspection générale de l’administration et à l’inspection générale de la police nationale. Plusieurs syndicats ont réagi après les déclarations de Claude Guéant, l’un d’eux, FO-Centrale des personnels du ministère de l’intérieur lui demandant de «rendre l’argent», la CGT-Police évoquant elle un «détournement de fonds publics».

Le Monde.fr publie un article sur ces indemnités de sujétion particulière, ISP qui sont issues des FES. Ces ISP sont désormais déclarées et fiscalisées. Ces primes sont versées aux membres des cabinets ministériels, mais aussi aux personnels dits de, fonction support, chauffeurs, gardes du corps… qui travaillent avec les ministres. Elles ont atteint, en août 2012, un montant de 24,8 millions d’euros, lire la suite sur Le Monde.fr.

Pendant des années, ces FES furent illégaux, cachés aux impôts, sans contrôle, une véritable anarchie tendant à diviser entre les bons et les mauvais flics suivant celui qui avait le pouvoir de les distribuer. On voit qu’elles subsistent sous une autre forme, mais légales avec un autre nom ISP. Pour en dire plus, il faut attendre les conclusions de l’enquête administrative, pour le moment Claude Guéant n’a rien fait d’illégal.