Les voltes face de François Hollande et d’Arnaud Montebourg sur le dossier PSA,

pensait-ils vraiment ce qu’ils annonçaient ?

 

 

Le 14 juillet lors de son interview au ministère de la marine François Hollande déclara au sujet de la fermeture de l’usine PSA d’Aulnay «l’État ne laissera pas faire», voir, La réponse de François Hollande à l’ultimatum de Peugeot. «L’État ne peut pas rester indifférent, la direction de Peugeot a nié être dans la réflexion de ce plan, je considère qu’il y a eu mensonge, sur le "timing" de l’annonce, et report après les élections». «Je considère ce plan inacceptable». Mais ensuite «nous pouvons faire en sorte qu’Aulnay reste un site industriel, il faut que le nombre d’emplois soit réduits», sibylin, c’est déjà autre chose. Comment analyser ces propos au vu de l’évolution de ce dossier, ou il apparaît que l’État est bien impuissant pour faire ce qu’il prétendait de faire, c’est à dire ne pas laisser faire.

 

Ce qui choque c’est le terme «mensonge sur le timing», qui est accusé de mensonge ? La direction de Peugeot ou le gouvernement précédent qui aurait pu, par suite des élections, demander à Peugeot de retarder l’annonce de ces 8.000 suppressions d’emplois dont 3.000 sur le site d’Aulnay ? C’est probablement les deux qui avaient un intérêt politique à ne pas mettre cette bombe dans la campagne présidentielle. Mais est-ce un mensonge pour autant, non puisqu’ils n’ont pas été interrogés, ils n’ont donc pas mentis ! Ils ont tout simplement masqué la réalité à un éventuel président. Politiquement c’est malhonnête, mais pas un mensonge.

 

On sait qu’il y a eu un plan secret qui prévoyait la fermeture de l’usine d’Aulnay, titrait Le Monde le 09/06/11. C’est une note interne du 23 août 2010 rédigée par la direction des programmes et la direction industrielle qui dévoilait déjà le 08 septembre 2010 un plan secret, que le journal a pu lire puisque le syndicat CGT en avait les éléments.

 

 

François Hollande connaissait-il ce plan secret ? Si oui, il n’y pas a eu mensonge puisque Le Monde l’annonçait le 09/06/11, mais Le Monde n’est pas Peugeot qui par ailleurs démentait l’existence de cette note, si non, il y a eu simplement une manœuvre politique qui n’est pas réellement un mensonge, mais cela peut s’admettre. Curieux que François Hollande ne puisse connaître ce plan avec les moyens d’information à sa disposition ? Faut-il donc accuser François Hollande d’un propos irresponsable ? Difficile à prouver, et c’est l’opinion seule qui en est la juge.

Ensuite ce fut le ministre du redressement productif le 18 juillet, «nous avons un vrai problème sur la stratégie de Peugeot, l’alliance avec Général Motors, le comportement de l’actionnaire».

 

 

Puis, «nous n’avons pas confiance dans ce que nous dit aujourd’hui la direction de Peugeot, il y a eu des dissimulations», mettant en cause le versement de dividendes en 2010. «Je veux voir l’actionnaire savoir ou il va !». Tout cela sur un ton qui ne pouvait qu’irriter la famille Peugeot. Un manque de tact évident eu égard à une grande entreprise internationale qui a fait des fautes stratégiques, mais qui donne du travail à des centaines de milliers de personnes, des paroles comme celles là il y en a malheureusement trop. Mais sur le fond Montebourg a raison, il y a eu dissimulation, mais de versements de dividendes. Le dossier Peugeot est maintenant à gérer par le gouvernement avec les syndicats et au frais des Français, si des salariés se retrouvent au chômage. Comment croire que Peugeot puisse retrouver du travail à ses 8.000 salariés ?

 

Il faut savoir que depuis le 6 mai Peugeot reçoit des aides de l’État, et de ce fait l’État est engagé dans l’entreprise. PSA a bien remboursé le prêt de 3 milliards reçus en 2009 en échange duquel, il s’était engagé à ne pas fermer d’usine en France. Ses aides de l’État sont dans le cadre du crédit d’impôt recherche, et du chômage partiel. Mais, Peugeot a aussi bénéficié de la prime à la casse et du bonus malus pour les petits modèles. L’État a payé et paie encore, il a donc son mot à dire.

 

Dimanche 09 septembre au soir sur TF1 François Hollande avait des propos plus modérés, l’État «accompagnera» le mouvement de reconversion des salariés concernés par le plan social. Et d’ajouter, «lorsque ce sont des plans sociaux engagés, c’est aux partenaires de les négocier». «Ils doivent trouver des compromis pour qu’il y ait moins d’emplois supprimés et plus de reconversions, l’État accompagnera ce mouvement de reconversion», il entre dans le jeu de Philippe Varin. Il montre ainsi son impuissance, il n’a pas de moyen légaux pour empêcher la fermeture du site d’Aulnay. De plus, Peugeot est en sûr capacité de production par rapport a son carnet de commande et perd 200 millions d’euros par mois, et l’État ne peut lui apporter des commandes, mais ses aides lui donne un poids pour négocier le reclassement des salariés.

 

Il faut se rappeler le propos de Lionel Jospin lorsqu’il déclara en septembre 1999, «il ne faut pas tout attendre de l’État» à propos des 7.500 licenciements de Michelin, cette expression fit l’effet d’une bombe. Ajoutant, «je ne crois pas qu’on puisse administrer désormais l’économie. Ce n’est pas par la loi, les textes, qu’on régule l’économie». Reste que la situation de PSA est différente et que l’État possède des leviers comme nous venons de le voir, et s’il ne peut empêcher que le site d’Aulnay soit abandonné par Peugeot, il peut faire en sorte qu’il continue à vivre avec d’autres productions.

 

Et c’est là qu’intervient le fameux projet de loi qui devrait obliger une entreprise, qui veut fermer une usine, à chercher un repreneur. Projet de loi qui doit être présenté la semaine prochaine au parlement. Ce projet conditionne la poursuite de l’activité des établissements viables, notamment lorsqu’ils sont laissées à l’abandon par leur exploitant. C’était une promesse de François Hollande.

 

Le 11 septembre l’enquête sur la stratégie commerciale et la gestion économique de Peugeot tant attendue de l’expert Emmanuel Sartorius, nommé par Arnaud Montebourg, paraissait. Elle indiquait que la restructuration en cours était nécessaire. «La nécessité, dans son principe, d’un plan de réorganisation des activités industrielles et de réduction des effectifs n’est malheureusement pas contestable», jugeait M. Sartorius. Mais il jugeait aussi que le plan concocté par PSA ne doit pas porter uniquement à réduire les pertes en taillant dans les dépenses. Il déplora en outre le manque de dialogue entre la direction et les salariés avant cette décision de fermeture d’Aulnay-sous-Bois. Il reprocha de plus la stratégie concernant l’usine de Madrid, qui souffre de nombreux défauts, usine ancienne, faible capacité, en ville, éloignée des fournisseurs. Il faut savoir que l’usine d’Aulnay est une usine moderne, c’est donc pour un tout autre motif que Peugeot l’abandonne pour celle de Madrid. Le coût de la main d’œuvre probablement. Les sites de PSA en France ne sont pas assez compétitifs, et il va chercher ailleurs un coût de main d’œuvre plus faible même si l’usine n’est pas performante.

 

Pour Arnaud Montebourg le plan reste toujours inacceptable en l’état et de plus, il estime qu’il a validé ses propos. «La raison pour laquelle nous le considérons toujours inacceptable en l’état, c’est que nous ne savons pas si ce plan est un plan de rétrécissement, de repli, ou si c’est un plan de reconquête», a-t-il déclaré sur France Inter.

 

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Arnaud Montebourg par franceinter

 

Sous cet angle «inacceptable» ne veut signifier l’interdiction de licenciements des 8.000 salariées comme on aurait pu le penser au début du dossier, mais tout autre chose, la gestion du plan. Quand au mot reconquête, nous prendrait-il pour des imbéciles ? Finalement le plan est admis, alors qu’il ne l’était pas. Arnaud Montebourg en fin avocat, nous manipule sur le mot inacceptable.

 

Lors de son voyage à Rennes le même jour que la parution du rapport, François Hollande déclara devant les responsables syndicaux de l’usine PSA de La Janais près de Rennes, «que les pouvoirs publics feront tout pour pouvoir réduire l’ampleur des suppressions de postes». «La volonté qui est la mienne, c’est le sens du dialogue que j’ai eu avec ces représentants, c’est de dire que nous devons tout faire pour réduire le nombre de suppressions d’emplois». «C’est l’objet de la négociation qui va s’ouvrir». Il ajouta à ces responsables syndicaux que les pouvoirs publics interviendraient également pour «faire en sorte qu’il y ait un nouveau véhicule sur Rennes en 2016, avec un volume suffisant pour assurer non seulement la pérennité du site mais son avenir». «C’est un engagement du président de Peugeot», a-t-il souligné.

 

Quand au ministre du redressement productif, il a reconnu la nécessité du plan de restructuration de PSA, appelant à un dialogue social exemplaire. Montebourg reconnaissant que PSA est réellement en difficulté et a besoin de restructuration, et le ministre de proposer une négociation tripartite, État, syndicats, direction, pour rediscuter du plan social.

 

On est loin des déclarations du début, et c’est normal. Il faut que les divergences s’estompent, par une analyse plus raisonnable du gouvernement. Il est certain que le gouvernement se trouvait en infériorité par rapport à Peugeot qui tient les ficelles comme on dit. Peugeot est maître chez lui, et subit une crise. Ces 8.000 licenciements qui n’en seront peut être pas tous ne pèsent rien par rapport aux milliers d’emplois qu’il assure. Que ce soit un déchirement pour ces salariés c’est incontestable, mais maintenant il faut négocier positivement pour atténuer autant que faire se peut leur désarroi.

 

Le 20 septembre l’intersyndicale de Peugeot Aulnay fut reçue par François Hollande, alors que des salariés manifestaient dans la rue de l’Élysée aux cris, «le changement c’est le néant».

 

Document Libération.fr, Photo Bertrand Langlois. AFP.

 

Au cours de cette réunion, le président s’est engagé à des négociations tripartites syndicats, direction de Peugeot et État. Quand au gel des licenciements il n’y a eu aucun engagement du président.

 

«Nous sommes satisfaits d’avoir obtenu la réunion tripartite avec le soutien ferme du président, mais il ne s’est pas engagé sur un gel du plan le temps de ces négociations», déclara Tanja Sussest, déléguée du syndicat majoritaire à Aulnay, à sa sortie de l’Élysée. Quand au délégué CGT Jean-Pierre Mercier qui attaque tout azimut, «les négociations auront lieu site par site». «Il s’agit d’obtenir le maximum de garantie sur le maintien de l’emploi, c’est une revendication unanime des syndicats» a-t-il aussi déclaré. La première réunion tripartite devait avoir lieu avant le 15 octobre.