Nouveau suicide, ce vendredi 12 février, sur une voie de chemin de fer de l’Aisne, entre Paris et Compiègne. Un dimanche soir, voici un mois, c’était à proximité de la gare
Un suicide sur une voie de chemin de fer, c’est un drame humain terrible pour une famille et des proches, et de multiples petits drames, familiaux ou professionnels ou autres, pour des centaines de personnes, d’abord bloquées sur les voies, puis réacheminées, souvent par bus, vers diverses destinations parfois imprévues.
J’avais vécu, en pleine gare de la Ferte-sous-Jouarre, voici quelques années, un arrêt prolongé qui m’avait valu de ne pas participer à un voyage de presse le lendemain. Je m’étais fort bien dispensé de ce voyage, mais le train était bondé et je ne peux imaginer les conséquences du très fort retard subi par les autres voyageurs. La raison de l’attente fort prolongée était « simple » : la police était présente, les pompiers aussi, mais on attendait le procureur de permanence.
Voici un mois, c’est une personne revenant sur Paris d’au-delà de Compiègne qui me signalait qu’elle avait obtenu de pouvoir descendre à hauteur d’un passage à niveau proche de Viry-Noureuil et commander un taxi. Elle était proche de la demeure familiale, le train devait – au bout d’une attente incertaine – déposer ses passagers dans une gare où des bus, tard un dimanche soir, devaient les prendre en charge. « Où trouver autant de bus pour autant de monde un dimanche soir ? » s’était-elle interrogée. Elle avait donc rebroussé chemin et par chance elle n’avait pas d’obligations parisiennes matinales. Voici que la même, vers 13 heures ce vendredi, se retrouvait bloquée, cette fois à destination de Compiègne, au niveau
Début février 2009, la SNCF avait attiré l’attention sur les « énormes perturbations » provoquées par des suicides sur sa région Île-de-France. Jean-Pierre Faradou, responsable régional, avait organisé une conférence de presse. Il indiquait que l’ambition de la SNCF était de « dissuader les gens de choisir le train pour se suicider ». Contrairement à ce qu’on croit, on peut réchapper d’une telle forme de suicide : paralysé, handicapé et dépendant à vie (une « chance » sur dix de survivre). À l’époque, la SNCF comptait deux suicides quotidiens (chiffres 2008) sur l’ensemble de son réseau. La progression pour l’Île-de-France approchait le quart, d’une année sur l’autre. À défaut d’un procureur, un officier de police judiciaire doit être présent pour faire les constatations : il n’est pas toujours rapidement disponible, il faut souvent de plus trouver un remplaçant dans la motrice pour cheminot sous le choc. Certains cheminots vivent ce traumatisme jusqu’à sept ou huit fois dans une carrière assez courte (les conducteurs bénéficient d’un âge de départ en retraite anticipé par rapport à d’autres professions de la SNCF).
Récemment, l’AFA (association des fournisseurs d’accès Internet), publiait les chiffres du bilan 2009 de son site de signalement, Pointdecontact. En 2009, pour ce seul site, 294 sites « incitant à la violence ou au suicide » avaient été signalés, et sur ce nombre, 31 avaient été juridiquement reconnus comme tels. Cela représentait plus d’un doublement par rapport à l’année 2008. Faut-il y voir la conséquence de la crise économique ou de la dégradation des perspectives d’avenir depuis quelques années ? Il est impossible de corréler fidèlement des chiffres et des données beaucoup plus subjectives. Mais on peut s’interroger… Quant à déterminer ce qui pousserait des candidats au suicide à choisir ce genre de fin (ou de risque de très graves mutilations), hormis les taux de « réussite », ou la proximité d’une voie de chemin de fer aux alentours du lieu de vie ou de travail, c’est une gageure. Et il n’est pas du tout sûr que les campagnes d’information de la SNCF aboutissent à une diminution des cas. Pourtant, au Canada, pour les suicides dans les métros, des résultats avaient été constatés. Reste à voir s’ils ont été maintenus ou non…