L'avouerai-je ? Oui, dans un premier temps, je n'ai rien vu de sexiste dans les pubs du loueur allemand de véhicules Sixt. Et j'ai même gentiment rétorqué, ici et là, à celles ou ceux qui s'en offusquaient, qu'il ne fallait pas être plus chien·ne que les Chiennes de garde. J'avais tort. En fait, les responsables mercatique de Sixt sont des misos (ou du moins des propagateurs de clichés misogynes), et des récidivistes…

Du réchauffé ? Et comment !

J'admets bien volontiers, cette histoire de la publicité de Sixt, le loueur de véhicules qui « loue aussi aux femmes », c'est du réchauffé. Voici quelques jours, voire semaines, que les sites du quotidien Le Monde et celui de la filiale de son groupe, Le Monde Interactif (Lepost.fr) s'ornent de bandeaux et d'inserts vantant Sixt et ses petits modèles ou ses utilitaires. L'information n'a donc rien d'originale. D'ailleurs, sur Le Post comme sur Rue89, diverses visiteuses et maints internautes avaient – vigoureusement – protesté. Pas moi. Au contraire, même ! Mais au moins, faute de vigilence, le ridicule d'avoir apporté la contradiction à Pascal Riché, de Rue89, m'a-t-il été épargné.Ce n'est que voici peu que son article « Le loueur Sixt invente la fausse-vraie pub sexiste ».

Et j'ai eu le bon réflexe de me livrer à une recherche sur le sujet avant de déposer un commentaire du genre « misandre, vous avez dit “misandre” ? Comme c'est androphobe… ». Il se trouve que je n'avais pas vu les mêmes publicités que Pascal Riché, pour diverses raisons. D'une part, j'utilise divers navigateurs qui m'épargnent les trucs au format Adobe Flash et les bandeaux publicitaires, d'autre part je suis rétif aux images qui bougent-qui bougent (je préfère lire à visionner, surtout, d'ailleurs, pour m'informer, et le diktat de l'illustration superflue ou trop longuette me navre). D'autre part, je pensais pouvoir faire confiance à Florence Montreynaud, du réseau « Encore féministes » et des Chiennes de garde, pour m'alerter si cette publicité (ou plutôt ces publicités) étaient résolument sexistes. Il n'en avait, il n'en est, à ce jour (lundi 11 mai au matin), rien. Un oubli, peut-être ?

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Responsable, non coupable ?

De même qu'on devrait prendre le temps de lire posément, de se renseigner plus avant, de s'interroger si la contribution manie l'ironie ou le xième degré avant de la commenter, de même aurais-je dû prendre celui de visionner tout le document Adobe Flash de la campagne Sixt pour Le Monde et Le Post, et de faire une recherche. En fait, je n'avais vu que de grosses bouzines, des véhicules de mecs « qui en ont » (des pépettes, du flouze, du pognon), de m'a-tu-vu ?

Et en particulier celle de la limousine qui avait fini dans l'escalier d'une bouche de métro du xvie arrondissement de Paris.
Or, je me souvenais de cette photo, et du fait que le conducteur en était un (et non une conductrice).

Comme, de plus, sur les publicités initiales, on vantait une petite Smart, le message publicitaire était bien pour moi celui que Konstantin Sixt sert complaisamment, en parfait Tartuffe, à qui veut bien l'entendre. « Les Français n'ont pas compris l'ironie du message. on a fait la même campagne en Allemagne il y a dix ans… ». Le Post, bénéficiaire de ces publicités, ne va bien évidemment pas chercher plus loin. Konstantin Sixt nous joue l'air de la fausse contrition, Le Post et le groupe dit de La Voix de son Minc s'en contentent, évidemment. Or, depuis les premières, les publicités se font plus ouvertement misogynes au premier degré (au second, on tente de se rattraper). Plus de petite Smart mais un utilitaire, plus de grosses limousines mais aussi de petites voitures mal garées ou n'ayant pu éviter un obstacle, et puis aussi, des femmes en situation, ce qui peut laisser penser qu'elles étaient les conductrices des véhicules accidentés.

Du passé, faisons table rase…

Et puis, et puis, Konstantin Sixt a la mémoire sélective. Or, les précédentes campagnes du loueur allemand ont laissé des traces. Sixt n'est pas en reste lorsqu'il s'agit de mettre de jolies créatures en valeur pour fourguer des contrats de location. Et de jouer – oh, certes, « finement », avec une certaine délicatesse (ach, fouala que je tombe et succombe dans grosse, kolossale ficelle uchée jousqu'à la kord, personne n'est donc exempt ?) – sur les clichés sexistes. J'admets aussi que la plus salace m'a fait sourire. Et il s'est peut-être trouvé alors, parmi les féministes hédonistes (voire bissexuelles et triolistes, pourquoi pas) qui se considèrent, elles aussi, encore féministes, toujours féministes, des femmes à trouver, d'emblée, sans chercher plus loin, ni tenter de se renseigner plus avant, que la publicité sur le test était amusante. Roycod, sur son blogue-notes , est d'un avis similaire… à l'époque. Et il réfrène ses critiques parce qu'un internaute a réalisé le montage donnant le mot de la fin. Oui, mais, auparavant, que retiennent les clients (voire les clientes) de Sixt. Un aguichage à caractère très leste bien dans la lignée des publicités Sixt flattant le macho qui sommeille (enfin, d'un œil seulement).

Alors, pour moi, pour la prochaine location de bahut pour déménager ou acheminer des matériaux sur le chantier, à tarif similaire, ce ne sera pas Sixt. Je n'ai plus vraiment les moyens de faire acte financier militant, mais ce qui est sûr, c'est que je ne jetterai pas la pierre aux Chiennes de garde si elles venaient à critiquer ce genre de publicité. Est-ce encore trop faire de la publicité à Sixt que d'en faire état ? Peut-être. Tout le monde fait des erreurs ; la preuve, je suis tombé dans le panneau publicitaire de Sixt dans un premier mouvement. J'ai vraiment vu une publicité qui prenait les clichés sexistes à rebrousse-poil (car j'en avais un dans la main, négligeant de faire preuve de vigilance, de vigiler, donc…). Ma repentance n'ira pas plus loin. Mais je vais tenter de faire mieux la prochaine fois. Et vous ?