Oh là, quelques jours sans Wifi ni rien, et comme je saute toujours dans un train à la toute dernière minute, je n’ai pu vous présenter, mardi soir, le sommaire de Siné Mensuel nº 16, ni l’acheter ce soir… Qu’à cela ne tienne. J’improvise et mieux votard (je plébiscite) que nein, mais… (vous me suivez, ja?). Or donc, deux dossiers à ce sommaire : l’histoire des patrons de presse vus par quelques journaleux qui ne les portent pas trop dans leur cœur, et un spécial « gros richards dégoulinants de pèze ».
Ne l’ayant pas vu au sommaire (enfin, à son résumé communiqué par l’équipe des relations presse de Siné Mensuel), ne l’ayant pas (déjà) acheté, je ne sais si ce nº 16 évoque l’affaire Cahuzac autrement qu’en dessin (ou pas du tout).
C’est « rigolo » de constater que les infos de Mediapart à propos du présumé compte à l’étranger (Suisse, Singapour) de Jérôme Cahuzac inspirent peu les titres fauchés (ou les formations politiques pas trop à l’aise, du Front de Gauche au Front national).
Bref, est-ce hors-sujet ? Pourtant, ce Siné Mensuel nº 16 comporte un dossier « Enquêtes chez les ultrariches, riches, riches… ». Bienvenue chez les rupins !
Chez les rupins de Chez Rupin, même.
Avec sa collection de tocantes pour collectionneurs que Julien Dray lui-même lui envie, Jérôme Cahuzac n’avait pas sa place dans ce dossier ? Pourtant, l’affaire de sa douzaine de montres était connue avant la mise sous presse.
Ce qui ne l’était pas, connu, à temps pour en faire état, c’est l’histoire de la chemisette en or massif de Datta Phuge. Je vous la livre donc ici en quasi-exclusivité continentale européenne. Le gars est un petit joueur, même pas capable de comprendre que, quand on se fait faire sur mesure un vêtement de torse tout en or, on opte généralement pour les trucs à manches longues, avec boutonnières, histoire de parader avec des boutons de manchettes en diams. Remarquez, Datta Phuge, usurier (prêteur sur gages de son état), se rattrape avec des bracelets maousses aux poignets, une ceinture, et quelques colliers un peu voyants. Cela n’a coûté que le tiers du prix qu’auraient facturé les frères Chaumet de la place Vendôme. Seulement 240 heures de travail abattues fissa-fissa par 15 joailliers : nous sommes en Inde, le Smic n’existe pas dans la convention collective des bijoutiers, ni les 72 heures de travail hebdo donnant droit à la RTT. Or donc, la chemisette par elle-même ne vaut là-bas que dans les 15 000 euros.
Une bagatelle par rapport aux morceaux choisis du dossier de Siné Mensuel. Genre Mercedes sertie de diamants équivalant à un millénaire environ de Smic malgache ou ceylanais (233 ans de Smic de cheu nouz’autres). Les tongs à 3 700 euros de chez Hermès (ou la paire de lunettes d’Audrey Pulvar), c’est quand même quasiment du bas de gamme comparées à cette chemisette ou à la montre tout diams dont je vous avais parlé précédemment (à près de 5,5 millions d’euros, voir dans les archives de Come4News).
Dans ce dossier spécial Bienvenue chez les rupins, cela fait Ch’ti besogneux, le café macéré par des éléphants (les grains sont recueillis sous la queue mais la photo officielle est photoshoppée pour éliminer les gouttes de laxatif). Siné Mensuel préfère évoquer le thé à 27 000 euros les 500 grammes : le compost est uniquement composé de déjections de pandas. Quand à l’hôtel particulier à 31 millions d’euros, je doute que ce soit le pied-à-terre le plus cher du marché mondial (murs nus, bien sûr).
Eh oui, on estime à 30 000 milliards d’USD le fric planqué dans les paradis fiscaux. De quoi claquer sans complexe et faire jaillir, après secousses, le mousseux des mathusalems de roteuses enrichies aux paillettes d’or (pas le « col », le flacon, mais la bibine).
Charb et l’chèque
Je glisse ici au passage que Siné va beaucoup mieux et que ses 85 ans, en dépit d’un cancer, assez bien traité, l’amèneront sans doute, l’an prochain, à même date, au passage d’une 86 année (symbolisée par 4,3 bougies, car il n’est plus capable d’en souffler davantage sur le gâteau d’anniversaire). Du coup, je ne trouve plus si malséant la couv’ de Charb lui souhaitant une bonne année 2013. D’accord, cela pourrait se discuter sans fin.
N’empêche, je me demande quel petit journaleux a pu tirer 90 000 euros d’un licenciement abusif, même en fin de carrière, comme Siné l’a fait. Pour un ouvrier du Livre aux 32 heures, je ne dis pas (mais les ouvriers, eux, savaient se mettre en grève). En plus, Siné n’a pas obtenu le remboursement de ses frais de procès (les pires, ceux intentés par la Licra, tous perdus par elle, mais elle s’acharne). Du coup, c’est quasiment une affaire blanche. Fallait pas être dessinateur de presse, M’sieur Sinet, fallait être metteur ou rotativiste.
Transition glissante pour évoquer le second dossier de ce Siné Mensuel nº 16, « Cette année, ce sera la fête à la presse… les patrons vampires lui ont sucé le sang ». Pas faux. Pas qu’à la presse, aussi aux épargnants, déposants… Voyez la famille de Philippe Hersant : largement soutenue par les banques, incités à le faire par les pouvoirs publics, qui se tire d’une faillite retentissante avec assez de pognon pour faire la nique à la France. Les salariés (surtout les employés de presse et les journaleux) n’ont pas été les seuls à se faire enfumer. Véronique Brocard, ancienne de Libération et Télérama, et Jean Stern, auteur de Les Patrons de la presse nationale : tous mauvais (La Fabrique éd.), ancien de la presse économique, expliquent pourquoi.
Autre sujet, les réfugiés demandeurs d’asile politique ayant été torturés dans leur pays que regroupe (s’il le peut) le Centre Primo Lévi. Derniers arrivages : les Syriens de l’année écoulée. Tiens, cela me fait penser que le site de La Maison des journalistes (dite aussi « des plumes brisées ») est en rade. Des journalistes ayant été parfois torturés y étaient (sont encore ?) accueillis. J’espère qu’Odile Ohayon, qui l’a fondée voici dix ans, a trouvé de quoi tenir le cap. Bah, sinon, elle pourra s’adresser à Gérard Depardieu… sa première visite en Russie sera sans doute pour les journalistes des camps…
Siné a retrouvé l’hôpital Avicenne pour y finir le mois. Et ce n’est pas le mois qui va le finir. Donc, histoire de ne pas oublier, et comme mieux vaut tôt que tard : bon mois de février, Siné ! Bon, même si ce n’était que pour placer un peu de texte en soutien du dessin de Large (et de travers), intitulé « Siné en rémission comp(l)ète », cela part aussi d’un bon sentiment.
Au fait, vous retrouverez l’entretien donné par Siné le neuf décembre dernier sur le site de Siné Mensuel. Cela se termine par « n’écoutez jamais les vieux ». Mais on peut regarder leurs crobards.