L’affaire n’est plus dans l’actualité, la remise de la légion d’honneur au comédien Dany Boon datant du 10 novembre dernier, mais ce que révèle le discours prononcé en cette occasion par le chef de l’Etat est si saisissant que nous nous en voudrions s’il n’en restait pas de trace dans les archives de Plume de presse. C’est Guy Birenbaum qui a mis en ligne la vidéo sur Le Post  : « Vous êtes fils d’un kabyle marié à une catholique picarde, d’un boxeur devenu chauffeur routier à Armentières… Ça commençait pas terrible, il faut bien le reconnaître (rires dans la salle)… Heureusement, la République vous a ouvert les portes… Disons que, question rêve, on part de loin ! » Il y a quelque chose du dérapage d’Hortefeux dans cette phrase du président : les rires gras, la bonne blague… Mais si la cible du ministre de l’Intérieur était les Arabes, le racisme de Sarkozy est social. Quel formidable mépris du peuple révèle en effet la "plaisanterie" de l’enfant des beaux quartiers de Neuilly ! En quoi "ça commençait pas terrible", qu’est-ce qui fait que "question rêve, on part de loin" ? Sont-ce les origines kabyles du cinéaste ? « Vous avez déjà choisi la fiction contre la réalité en préférant le nom de Dany Boon au très joli nom, le vrai, Daniel Hamidou. Bon, ça s’aggravait de plus en plus. Je peux me permettre, moi c’est Sarkozy. Mais Hamidou, quand même, allez faire une carrière avec ça », dit-encore Sarkozy. Quand on s’appelle Mustapha ou Mamadou, on part de plus loin en effet, mais est-il bien décent de s’en esclaffer ? Et les chauffeurs routiers d’Armentières, méritent-ils d’être moqués parce que le Nord n’est pas une région assez glamour, ni leur profession suffisamment prestigieuse ? Les catholiques picardes se sont-elles senties insultées elles aussi ? Que tout le petit peuple le sache, le parvenu de l’Elysée, bouffi de suffisance et ne connaissant que les valeurs bling-bling, rigole que les gens simples soient mal barrés dans la vie, trop mal nés ou issus de parcours incertains. Les difficultés des milieux populaires sont tournées en dérision. L’injustice sociale fait rire le président-de-tous-les-Français. En dans le même temps, toute sa politique vise à conforter les privilèges des nantis, à choyer les héritiers, à cajoler les milieux d’affaires, à engraisser l’oligarchie économique. Dans ce contexte, ses plaisanteries lourdes sur les kabyles chauffeurs routiers, donnés comme hilarants prototypes du looser social, nous les trouvons simplement à vomir.