Ah, la bonne blague ! Parce qu’Eric Besson, zélé ministre des expulsions et de la préservation de l’identité nationale, a dans une autre vie appartenu au PS ; parce que Carla Bruni, actuelle épouse de notre Prince-Président, a plein d’amis artistes de gôôche ; parce que Jack Lang, star vieillissante des années Mitterrand, s’ennuie de ses amis scrogneugneu qui campent dans l’opposition, et n’en finit pas de tresser des louanges à notre bien-aimé souverain… le vénérable hebdomadaire (de droite) « Le Point », se demande fiévreusement si notre Prince-Président (que grâce lui soit rendue), n’aurait pas quelques tendances à virer du côté obscur des « partageux ». Le péril rouge menacerait-il à travers la personne de notre petit Nicolas présidentiel (que Dieu le protège du malaise vagal) ? Si l’URSS existait encore, notre Leader incontesté et incontestable, serait-il prêt à faire défiler les chars soviétiques sur les Champs-Elysées ? Que « Le Point » se rassure, je pense qu’on en est loin… Démonstration en quelques points.

 

Il y a « gauche » et « gauche ». Or, Nicolas Sarkozy ne l’aime que quand elle est… de droite ! Exemple : Bernard Kouchner, ou encore mieux, Eric Besson, devenu plus sarkozyste que les sarkozystes (hier il critiquait la politique d’immigration du ministre Sarkozy, aujourd’hui il est encore plus inflexible que son prédécesseur UMP Brice Hortefeux, et juge très positivement la récent alliance de l’UMP avec les villiéristes droitiers). En fait, tout ce qu’il y a de plus crispant dans la gauche, Sarkozy l’adore : pour le dire comme Jean-François Kahn, c’est la « gauche caviar, la gauche plume-dans-le-cul » qui l’intéresse. Autrement dit celle qui fréquente la très haute société, se rencontre aux cocktails, signe les mêmes pétitions pleines de bons sentiments dans la presse, et aime à passer ses vacances dans quelques lieux ne payant pas de mine (une simple villa à Marrakech fait bien l’affaire). Milieux d’affaires, artistes et intellectuels «branchés » en font partie, qui jettent de temps en temps quelques regards apitoyés à la France d’en bas. La question sociale ne l’intéresse pas, si ce n’est pour dire que bien sûr, il faut « réguler » le capitalisme, ce qui ne mange pas de pain. L’immigration, elle est pour, parce que le racisme c’est mal, mais bon, « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde », alors si les affidés du prince-Président font le sale boulot, on ne va pas en faire un plat. En revanche, quand il s’agit de punir les méchants pirates Internautes, on est à fond derrière le Prince ! Les principes les plus élémentaires du droit (qu’on aime bien quand on est un artiste de gôôche) ont beau être bafoués par le projet Hadopi, il est quand même question de pognon, merde !

 

Si Nicolas Sarkozy était de gauche, il ne chercherait pas à étendre le travail le dimanche, qui pour certains salariés en zone touristique ne sera même pas le synonyme d’une paie plus élevée !!! Un néolibéral n’en a rien à foutre que plus aucun espace commun n’existe, qui échappe aux exigences de la production marchande. Un homme de gauche, au contraire, se félicite qu’au moins un jour dans la semaine soit disponible pour faire vivre les liens sociaux constitués par la famille, les amis, une association, une activité sportive ou culturelle… De plus, un homme de gauche cherchera à préserver les emplois des artisans et petits commerçants menacés par l’ouverture des supermarchés de la grande distribution moche, polluante et précarisante.

Si Nicolas Sarkozy était de gauche, il passerait des discours aux actes en ce qui concerne les « bonus » des traders et autres excès de la finance. Il paraît que la mondialisation l’interdit, n’empêche que d’autres pays, comme les Pays-Bas, sont passés par la loi sans que les patrons ou les cadres supérieurs émigrent masse. Plus simplement, Nicolas Sarkozy aurait pu suivre l’exemple de Gordon Brown, qui en aidant les banques en a profité pour entrer dans leur capital et leur conseil d’administration.

Si Nicolas Sarkozy était de gauche, il renoncerait à la loi « Tepa » désastreuse en période de crise, puisqu’elle décourage l’embauche (en rendant plus profitable les heures supplémentaires), et coûte extrêmement cher à l’Etat. Elle tend à favoriser les ménages les plus riches et les salariés installés, beaucoup plus que les classes moyennes et les salariés précaires. La lutte contre les « miettes d’emploi » et la refonte d’une fiscalité réellement progressive seraient déjà plus convaincantes.

 Si Nicolas Sarkozy était de gauche, il ne s’allierait pas avec la droite nationaliste et réactionnaire représentée par Philippe de Villiers, d’autant plus que le parti politique de l’illustre Vendéen a déjà été un « sas » emprunté pour passer du Front national à l’UMP. De Villiers est un partisan du rétablissement de la peine de mort, dont l’abolition est une grande conquête de la gauche, désire l’abrogation des 35h et une forte baisse de l’impôt sur le revenu, l’abrogation de la loi SRU qui impose aux grandes villes la construction de logements sociaux, et envisage la suspension de toutes les constructions de mosquées. L’idéal pour lui serait qu’à l’école primaire les enfants soient sensibilisés à l’art français, voire européen, mais en s’arrêtant là (il est vrai que passées les frontières européennes, tout n’est que barbarie « yankee », musulmane ou « bridée »…). (1)

 

(1) toutes ces propositions sont réelles et ont été faites lors des dernières élections présidentielles.