Son nom est sur toutes les lèvres mais peu de monde se soucie de savoir qui est ce personnage, auteur du fameux rapport qui porte à controverse, plaidant pour un regain de compétitivité en sacrifiant certains des paramètres qui font de la France un pays vivant au-dessus de ses moyens.

 

 

Louis Gallois est né le 26 janvier 1944 à Montauban.  Ce haut fonctionnaire a connu de grandes responsabilités, au sein de la SNCF qu’il a présidé dix ans, de 1996 à 2006, puis au sein d’EADS qu’il a co-présidé.

 

A la SNCF, tout le monde se rappelle de Louis Gallois, en particulier les syndicats qui avaient obtenu des mesures jugées satisfaisantes pour répondre à leurs revendications. Le Nouvel Obs en 2005 rapportait :

 

« Les quatre fédérations de cheminots sont sorties "satisfaites" de leur rencontre avec Louis Gallois.

"Nous avons obtenu des mesures concrètes qui doivent être mises au crédit de la mobilisation des cheminots. Les assemblées générales décideront mercredi matin de la reprise ou non du travail. Il n’est pas question de décider à la place des cheminots des suites du mouvement même si nous émettons un avis positif", a déclaré le secrétaire générale de la CGT-Cheminots, Didier Le Reste. »

 

 

L’homme aujourd’hui clive, puisqu’il a été nommé par le gouvernement pour rédiger un rapport qui visiblement, n’est pas du goût de tous. Jean-Luc Mélanchon est ainsi indigné par le document, qu’il estime bon pour la poubelle :

"Tout est à jeter, il faut reprendre la copie à zéro"

 

Le Point explique que le co-président du Parti de Gauche va plus loin, assurant que

 

            "Ce qui coûte cher en France, c’est le coût du capital. On paye deux fois plus d’argent pour les dividendes aux actionnaires qu’on en paye pour les cotisations sociales"…"De Louis Gallois, qui a été à la tête des plus grands entreprises du pays, les plus innovantes, on attendait mieux que cette misérable redite de la propagande du Medef".

La droite, elle, a depuis longtemps raillé l’initiative du PS de commander un tel rapport, et n’a eu de cesse de reprocher à François Hollande de vouloir enterrer le compromettant document. Coup de poker politique pour les uns, puisque personne n’a réellement lu le compte-rendu. Ridicule diront les autres, qui entendent là souffler le vent de la communication.

Jean-François Copé, lui, persiste et signe, s’amusant : « Si jamais François Hollande venait à changer de cap" en reprenant les propositions de Louis Gallois, "quitte à se renier lui-même, il doit savoir que naturellement je serai à ses côtés, dans l’intérêt de la France ».

Si le document reste toujours aussi énigmatique, Jean-Marc Ayrault a livré une version (personnelle ?) de celui-ci. Il est difficile pour les Français de savoir si les déclarations du Premier Ministre reprennent fidèlement les propositions du grand patron, ou s’il s’agit d’un remaniement de suggestions délicates à soutenir pour une majorité de gauche, afin des les assouplir et les rendre plus présentables.

La mesure phare proposée concerne le crédit d’impôt de 20 milliards d’euros.  Il est censé soutenir la compétitivité et l’emploi, de grandes catégories bien abstraites pour la plupart des gens : quel emploi, et l’emploi de qui au juste ? Ainsi, une baisse des cotisations sociales devrait concerner les salaires compris entre 1 et 2.5 smic. Quid des auto-entrepreneurs, parle t’on uniquement des salariés ?  Le rapport Gallois préconisait pourtant d’aller jusque 3.5 fois le smic selon les Echos.

Cette baisse des coûts du travail devrait s’accompagner d’un effort sur les dépenses publiques, une hausse de la TVA et une nouvelle fiscalité.  Logique difficile à comprendre : d’un côté on baisse les cotisations sociales (ce qui devrait bénéficier aux entreprises employant des salariés), de l’autre on augmente le taux de TVA pesant sur la plupart des biens et services. Enlever à un endroit pour reprendre à un autre, moins visible immédiatement pour le consommateur ? Les plus sceptiques y verront un nouvel écran de fumée.

 

Apprentissage, travail : faire comme l’Allemagne ? Pourquoi ?

 

Enfin, Jean-Marc Ayrault ressort la ritournelle désormais lassante pour l’électeur du modèle allemand et de l’apprentissage en fixant un objectif de 500 000 apprentis en France. Quand il est avéré que la plupart des apprentis se voient fermer les portes des entreprises qui préfèrent prendre des stagiaires, il est légitime de douter du bien fondé de la proposition.

En effet, tant qu’il sera possible d’exploiter des jeunes dans la précarité en les payant 400 euros pour faire le même travail qu’un salarié junior en CDI (le cas récent du stage au PSG est un nouvel exemple de la pratique), tout en les traitant avec dédain et en pouvant les licencier à tout moment sans se justifier, on voit mal comment l’apprentissage pourra avoir le vent en poupe. Il se murmure que le recrutement d’apprentis est « blacklisté » dans certains groupes du CAC40, pourtant pas les plus mal lotis en termes de financement public de l’apprentissage.

On ne peut alors que s’indigner de l’hypocrisie de Laurence Parisot, qui plaide pour un modèle allemand, alors que la plupart des plus grands adhérents au Medef ne jouent pas le jeu.

En définitive, le rapport Gallois semble effectivement être un bel écran de fumée, et pose surtout une question : pourquoi systématiquement faire appel aux grands patrons pour prendre les décisions qui fixent le cap pour notre pays?